«Il est vital de s'exposer au soleil», «ne fuyez plus le soleil, il vous protège du cancer». Non, vous n'avez pas la berlue. C'est bel et bien là un extrait de la couverture d'un ouvrage très sérieux. Et si le soleil n'était pas si méchant qu'on le croit?

Soleil, mensonges et propagande, publié aux Éditions Thierry Souccar (à qui l'on doit déjà Vaccins, Lait, et Cholestérol, mensonges et propagande, dans le même veine), semble, de prime abord, aller à l'encontre du message de santé public martelé depuis des années.

Quoi, le soleil ne tue pas? Oui, mais non, pas toujours, ni de la même manière pour tout le monde, nuance l'auteure, Brigitte Houssin, médecin spécialiste en réadaptation, à Paris.

«Le soleil dont on abuse favorise les cancers de la peau. Le soleil en quantité raisonnable protège du cancer en général», précise-t-elle.

Mieux, ou pire: «Une recommandation collective peut faire du bien à certains et du mal à d'autres. C'est tout le paradoxe des recommandations sur l'exposition solaire.»

Mais encore? «Ce que je dis, explique-t-elle, c'est qu'il faut s'exposer au soleil, oui, mais très peu, et tous les jours. Je respecte en ce sens le message de santé public, qui est très bien fait, mais qui oublie de dire quelque chose de très important: il faut quand même aller un peu au soleil!»

Un peu, pour pouvoir bénéficier d'un précieux apport en vitamine D (le sujet de maîtrise de l'auteure), dont on ne soupçonne pas tous les bienfaits. Son livre en répertorie d'ailleurs plusieurs, certains logiques, d'autres plus surprenants: réduction des risques de cancer (en inhibant notamment la prolifération des cellules), amélioration de la santé des os (en permettant aux minéraux d'être absorbés par les os), augmentation de la force musculaire, réduction des risques d'asthme, des douleurs menstruelles, des troubles d'humeur, etc. Même la calvitie serait due, en partie, à un apport insuffisant en vitamine D! «Depuis la parution de mon livre, il y a encore une étude, danoise cette fois, qui conclut que toute la machinerie immunitaire se mettrait en route que s'il y a une quantité suffisante de vitamine D dans le corps. Je dis souvent que le seul défaut de la vitamine D, c'est qu'elle ne coûte rien!» Du coup, il existe en effet bien peu de campagnes publicitaires en sa faveur, signale-t-elle, cynique.

À chacun sa prescription

Mais quelle quantité faut-il exactement pour bénéficier de ces précieux pouvoirs? C'est là que repose en fait le noeud du problème. Car il est impossible de donner une prescription générale. «Cela dépend du type de peau, de la qualité de la peau, de l'alimentation de chaque individu.» Ainsi, cela peut aller de moins de cinq minutes sur l'heure du midi, pour quelqu'un à la peau blanche très sensible, à une bonne vingtaine de minutes pour les peaux plus mates. Seul mot d'ordre: «Il ne faut pas que la peau rougisse.»

Elle recommande aussi d'exposer la plus grande partie du corps possible, un petit peu, donc, et ce tous les jours. L'hiver, un supplément s'avère nécessaire.

Et la crème solaire, dans tout cela? «Moi je prône plutôt l'ombre ou des vêtements couvrants», dit-elle, signalant par ailleurs ne jamais crémer sa fille. Car ne l'oublions pas, la crème solaire créée une protection «illusoire», ne protégeant que de «5 à 20% du rayonnement solaire». Le reste, notamment les infrarouges et la lumière visible, «tout aussi mauvais pour la peau», passant au travers. Si vous ne pouvez pas faire autrement, au ski ou en bateau par exemple, «vous pouvez en mettre, mais il faut savoir que la protection n'est que partielle».

Et surprise! Au pays, tant l'Association canadienne de dermatologie que la Société canadienne du cancer préconisent la même chose, à quelques nuances près: une courte exposition au soleil au quotidien (dans le cadre des «activités quotidiennes» seulement, précisent les dermatologues) et des suppléments l'hiver.

Alors pourquoi n'entend-on parler que de protection, et rarement de l'importance de l'exposition? «Parce que pour les gens, l'exposition signifie: je m'étends au soleil, déplore André Beaulieu, porte-parole de la division Québec de la Société canadienne du cancer. Nous on dit: une exposition minimale suffit! Je ne pense pas qu'on sous-estime la vitamine D, mais on a encore du mal à convaincre les gens que le soleil est dangereux!»

Rappelons que le cancer de la peau est le cancer le plus fréquent au pays. L'an dernier, 75 000 nouveaux cas ont été décelés, dont 20 000 au Québec. Conclusion? Entre ultra protection et surexposition «il faut trouver un équilibre», conclut le porte-parole.

Soleil, mensonges et propagande, de Brigitte Houssin, Éd. Thierry Souccar, 192 pages, 29,95$