La proportion des adolescents américains ayant des problèmes d'ouïe a augmenté d'un tiers entre 1988 et 2005, et affecte maintenant une jeune sur cinq, selon une nouvelle étude américaine. Les problèmes modérés à graves ont progressé deux fois plus vite. Tout porte à croire que l'engouement pour les baladeurs est responsable de cette tendance.



«On ne peut pas encore établir de lien de cause à effet», explique Sharon Curhan, épidémiologiste à l'Université Harvard et l'une des auteures de l'étude dévoilée hier par le Journal de l'Association médicale américaine. «Curieusement, lors de la vague précédente de popularité des baladeurs, dans les années 80, il n'y avait pas eu d'étude rigoureuse sur la question. Mais il est certain que les habitudes d'écoute des adolescents les exposent à des niveaux sonores qu'on sait nocifs pour l'ouïe. Ce qu'il faut savoir, maintenant, c'est le niveau sonore auquel les amateurs de baladeurs sont réellement exposés.»

À l'Hôpital de Montréal pour enfants, le chef du département d'oto-rhino-laryngologie, Sam Daniel, n'est pas surpris par les conclusions de l'étude. «On voit de plus en plus d'adolescents qui ont des problèmes d'ouïe, dit le Dr Daniel. On ne peut pas pour le moment prouver que c'est à cause de la vogue des baladeurs. Mais on sait que contrairement aux baladeurs des années 80, les modèles numériques gardent un bon son, sans grésillements, même à des niveaux élevés. Ça peut pousser les adolescents à écouter leur musique plus fort.»

Environnement

Il y a six mois, l'équipe du Dr Daniel a fait une étude sur les habitudes des adolescents. «Quand il y a du bruit, par exemple dans la rue ou le métro, ils ont tendance à augmenter le volume de six à dix décibels. C'est énorme. Dans un environnement calme, seulement 6% des usagers choisissent un niveau sonore très élevé sur leur baladeur, mais dans un environnement bruyant, c'est 80%. Une solution serait d'utiliser des écouteurs supprimant le bruit environnant. Avec ce type d'écouteurs, seulement 20% des usagers choisissent un niveau sonore très élevé dans un environnement bruyant.»

Les épidémiologistes de l'Université Harvard ont analysé les dossiers de 3000 adolescents ayant participé à une étude entre 1988 et 1994 et de 1800 adolescents ayant participé à une étude identique en 2005-2006. La prévalence de problèmes de diminution d'ouïe a augmenté de 14,5% à 19,5% entre ces deux périodes. La prévalence de problèmes plus importants, «légers ou pires», correspondant à une perte d'audition de plus de 25 décibels, a bondi de 3,8% à 5,5% de l'échantillon. «En d'autres termes, un adolescent sur 20 a des problèmes ayant potentiellement un impact sur sa performance scolaire», dit le Dr Curhan.

De plus, l'étude sous-estimait les problèmes d'ouïe en excluant les cas graves, d'origine probablement génétique. Les personnes ayant des appareils auditifs ne pouvaient y participer.