De même qu'il existe des groupes sanguins, trois types de signatures liées à la flore intestinale de l'homme ont été identifiées, ce qui pourrait faciliter le diagnostic de l'obésité ou de maladies inflammatoires de l'intestin, selon une étude publiée mercredi.

Dix fois plus nombreuses que nos propres cellules, les bactéries vivant dans notre intestin permettent de différencier les individus en trois groupes distincts ou «entérotypes», selon des travaux paraissant dans la revue scientifique Nature.

Ces signatures bactériennes s'avèrent indépendantes de l'origine géographique, de l'âge ou de l'état de santé, selon l'étude qui a porté sur la flore intestinale de plusieurs dizaines d'Européens, Américains et Japonais.

Les trois types de communautés bactériennes peuplant nos intestins «pourraient expliquer pourquoi les effets de médicaments ou d'aliments varient d'une personne à l'autre», explique Jeroen Raes (Université de Bruxelles VUB), un des principaux auteurs de l'étude effectuée par un consortium international.

L'homme a quelque 100 000 milliards de bactéries dans son intestin, ce qui représente un poids de 1 à 2 kg, «plus que son cerveau», relève Stanislav-Dusko Ehrlich, coordinateur du projet européen MetaHIT (Metagenomics of Human Intestinal Tract).

Ces bactéries, qui nous aident à assimiler vitamines et aliments, c'est comme «un bon organe», ajoute ce chercheur de l'Institut national de recherche agronomique (INRA), laissant entrevoir la possibilité d'aller «vers une médecine personnalisée» grâce à une meilleure connaissance de ce «microbiome» intestinal.

Le génome de notre flore intestinale compte 3,3 millions de gènes, soit 150 fois plus que le génome humain, rappelle M. Ehrlich qui a coordonné les travaux de séquençage dont les premiers résultats ont été publiés en mars 2010 dans Nature.

«On nait stérile», mais en quelques jours, l'intestin du nourrisson est colonisé par des bactéries et vers l'âge de 2 ans, il a une flore intestinale ressemblant à celle d'un adulte, précise le chercheur.

La distinction faite entre les trois «entérotypes» humains va permettre de «comparer des gens comparables», lors d'études sur des aliments, les probiotiques, la maladie de Crohn ou d'autres maladies inflammatoires chroniques de l'intestin. Il faut comparer malades et personnes saines «appartenant au même entérotype», a précisé M. Ehrlich.

«L'étude semble montrer qu'on peut identifier les marqueurs biologiques qui nous permettraient de faire le diagnostic», explique-t-il. L'espoir c'est aussi d'arriver à «repérer les individus à risque, y compris pour l'obésité».

À plus long terme, «l'objectif, c'est de voir comment intervenir, guérir» lorsqu'il y a une «perturbation de l'écosystème» complexe que représente la flore intestinale. Il pourrait s'agir de «stimuler la croissance des bonnes bactéries» tout en freinant celle des «mauvaises». «On ne sait pas le faire aujourd'hui», souligne M. Ehrlich.

Déjà, «on peut prédire avec une bien plus grande précision si quelqu'un est obèse ou pas en regardant les gènes des microbiotes (bactéries) plutôt que les gènes de notre génome», explique-t-il.

Une expérience sur des souris avait montré dès 2006 le rôle des bactéries intestinales dans l'obésité.

Celles dont l'intestin jusque là stérile avait été colonisé par la flore de souris obèses étaient devenues plus grasses que leurs congénères ayant reçu la flore de souris maigres.