Des médecins canadiens envisagent d'interdire les traitements de fécondation in vitro aux femmes obèses, prétextant que les risques de complications médicales sont trop élevés. Une situation totalement inacceptable, selon différents intervenants québécois.

Les membres de la Société canadienne de fertilité et d'andrologie sont réunis ces jours-ci à Toronto. Dans le cadre de cette rencontre, certains médecins ont fait connaître au quotidien The Globe and Mail leur intention d'interdire l'accès aux traitements de fécondation in vitro aux femmes obèses. Car selon eux, différentes études ont démontré que les risques de complications médicales sont plus élevés chez ces femmes.

Déjà, certaines cliniques refusent de traiter des clientes obèses. Au Centre de fertilité d'Ottawa, les femmes présentant un indice de masse corporel supérieur à 35 ne sont pas traitées. Un individu est considéré comme obèse lorsque son indice de masse corporel dépasse 30.

La vice-présidente de l'Association des obstétriciens-gynécologues du Québec, la Dre Isabelle Girard, souligne que de telles situations n'existent pas au Québec et qu'aucune discussion en ce sens n'a lieu. Rappelons que Québec rembourse les traitements de fécondation in vitro depuis août 2010.

Si certains médecins militent pour l'interdiction de la fécondation in vitro chez les femmes obèses, d'autres jugent cette position discriminatoire et mentionnent que tout comme on ne peut refuser de traiter une fumeuse sous prétexte que sa grossesse sera plus à risque, on ne peut refuser de suivre les personnes obèses. Le Dr Anthony Chung, expert en fertilité à l'Université de Colombie-Britannique, ajoute que l'âge avancé est un bien plus grand facteur de risque que l'obésité pour la fécondation in vitro.

Au Québec, l'Association des couples infertiles du Québec (ACIQ) rappelle que l'infertilité a été reconnue comme une maladie par l'Organisation mondiale de la santé et qu'un médecin qui refuse de traiter une patiente obèse «signifie un refus de traiter une personne malade». «Toutefois, dans les cas où le médecin recommande une perte de poids préalable, dans le but de favoriser l'état de santé général de la patiente et le succès du traitement, nous encourageons les patientes à suivre les recommandations du médecin», explique Marilyne Héroux, responsable des communications de l'ACIQ.

La Coalition contre l'obésité morbide indique pour sa part que «si la fécondation in vitro est source de danger pour la santé d'une personne, il revient au spécialiste de le déterminer et de bien expliquer à sa patiente ce qui motive ou non une intervention».

Le Dr Marc Zaffran, du Centre de recherche en éthique de l'Université de Montréal, croit que les règles d'accès aux traitements de fécondation in vitro doivent être déterminées «par les législateurs et la collectivité, pas seulement par les médecins». «Un comité scientifique et éthique comprenant des gens de différents milieux devrait se consulter et prendre une décision qui ne serait pas juste basée sur des critères médicaux», propose-t-il.