La quasi-totalité des jeunes transgenres sont victimes d'insultes à l'école. La moitié a déjà été harcelée physiquement, et le quart, carrément attaqué. Sans surprise, les deux tiers ne se sentent pas en sécurité dans leur milieu scolaire.

C'est ce qui ressort de la toute première enquête du genre, réalisée aux États-Unis auprès de 295 jeunes transgenres âgés de 13 à 20 ans.

 

Intitulée Harsh realities, l'enquête a été menée par le Gay, Lesbian and Straight Education Network.

Sociologue et professeure associée à l'UQAM, Line Chamberland fait actuellement une recherche similaire, quoique à plus petite échelle, sur l'homophobie en milieu scolaire. Dans le cadre de cette étude, elle souhaite interroger une dizaine de jeunes transgenres âgés de 16 à 19 ans. Sur un échantillon qui n'en compte jusqu'ici que cinq, elle confirme certaines tendances. «C'est très, très clair. Les jeunes transgenres subissent plus de harcèlement que les homosexuels, dit-elle. Ils sont doublement stigmatisés: à cause de leur apparence de genre, et possiblement de leur orientation sexuelle.»

Et cette stigmatisation fait mal. «La majorité des jeunes n'ont pas ou ont peu de souffrance par rapport à leur identité, fait valoir la psychologue Françoise Susset. Ce qui cause leur souffrance, c'est la réaction de la famille et de l'école.»

Fait à noter: les cheminements les plus positifs sont souvent vécus par ceux qui n'ont pas eu à sortir du placard. «Ce sont ceux qui ont fait leur transformation en dehors de l'école, entre le primaire et le secondaire, entre le secondaire et le cégep. Ils recommencent avec une nouvelle identité», signale Line Archambault.

C'est d'ailleurs l'option à laquelle la mère de Laura*, 14 ans, va se résigner. Voilà moins d'un an, sa fille lui a annoncé qu'elle avait un trouble de l'identité de genre. Cela fait moins d'un an que, entre les quatre murs de sa maison, elle ose s'affirmer, qu'elle ne se fait plus appeler Laurent*, mais Laura. Sauf à l'école. En quelques mois, sa double vie est devenue insoutenable. Résultat: elle n'a pas mis les pieds à l'école depuis décembre et passe ses journées enfermée. «Une année scolaire, ça peut se reprendre. Une vie, ça ne se reprend pas, croit sa mère. Il va falloir couper les ponts, déménager, trouver une autre école. Je ne vois pas d'autre solution. Parce que, en ce moment, quand je pars le matin, ma grande question, c'est: est-ce que mon enfant va être encore en vie ce soir?»