Oubliez les chips au fromage cheddar enrichies de calcium et le cola à la vitamine D pour l'instant. Santé Canada veut revoir le projet de règlement qui aurait permis à l'industrie alimentaire d'ajouter vitamines et minéraux dans ses produits, même dans les aliments qui ont de faibles valeurs nutritives.

C'est pourtant dans l'air du temps. Aux États-Unis, le Diet Coke Plus contient des vitamines B6 et B12, du zinc et du magnésium. « Les consommateurs demandent de plus en plus des produits santé, et la réponse de l'industrie est de leur présenter des aliments dans lesquels on a ajouté des vitamines «, déplore Suzie Pellerin, présidente de la Coalition sur la problématique du poids. Elle se réjouissait hier du fait qu'on ne verra pas le Diet Coke Plus et ses semblables traverser la frontière.

 

Santé Canada devait publier son projet de règlement au mois de mars 2009, mais avait préféré attendre un peu. De nombreuses voix s'étaient élevées contre cette « fortification universelle «.

Il y a de la vitamine D dans le lait ou les boissons de soya, explique Suzie Pellerin. Ces ajouts dans des produits de grande consommation répondent à des questions de santé publique. « En permettant l'enrichissement facultatif, c'est plutôt un argument marketing qu'on donne à l'industrie alimentaire, explique-t-elle. Et cela permet les dérives comme l'enrichissement de produits de malbouffe. «

Les porte-parole de Santé Canada confirment maintenant que le projet est en suspens. Ottawa retourne à l'étape de la consultation auprès des groupes concernés. « Les pressions des grandes entreprises alimentaires sont fortes «, dit Suzie Pellerin.

Les fonctionnaires canadiens sont pris entre les représentants de l'industrie, qui invoquent des arguments de développement de marché et qui ont déjà dans leurs valises toute une gamme de produits à présenter, et les professionnels de la santé, qui émettent de sérieuses réserves.

Dans son journal, en mai dernier, l'Association médicale canadienne s'est déjà élevée contre l'ajout de vitamines dans les aliments. Une nouvelle étude publiée dans le Journal of Nutrition indique maintenant que l'enrichissement des aliments courants pourrait même mener à une surconsommation de certains minéraux et vitamines.

À la Coalition sur la problématique du poids, on se réjouit de ce nouveau délai, tout en étant conscient qu'il ne s'agit que d'un délai.

Les eaux vitaminées échappent à la réglementation puisqu'elles n'entrent pas dans la catégorie des aliments, mais plutôt dans « les produits de santé naturels «, tout comme la plupart des boissons énergisantes. C'est ce qui explique qu'elles sont déjà bien présentes dans les rayons. Les chips et boissons gazeuses ne peuvent pas utiliser cette voie de contournement...