Au Québec, l'usage du condom est plutôt stable depuis 20 ans. La récente étude réalisée par Dennis Fortenberry, de l'Université de l'Indiana, montre en fait que les adolescents américains viennent de rattraper ceux d'ici.

«Ici, l'usage du préservatif n'a pas vraiment bougé depuis la fin des années 80, observe le Dr André Dontigny, directeur de la santé publique à Québec. On pense que le sida est maintenant vu davantage comme une maladie chronique que comme une catastrophe et que ça fait baisser la garde à certains jeunes. Mais les chiffres demeurent stables.»

Par contre, une étude réalisée à l'automne 2009 montre que plus de la moitié des 15-19 ans au Québec exigent qu'un nouveau partenaire passe un test de dépistage d'infections transmises sexuellement (ITS) avant de délaisser le préservatif. «La moitié ne le font pas, mais c'est certainement un changement par rapport à il y a 20 ans», dit le Dr Dontigny.

Au gré des études, entre les deux tiers et les trois quarts des adolescents utilisent un préservatif lors des relations sexuelles, particulièrement avec des partenaires occasionnels ou d'un soir, ou avec un nouveau partenaire. Les filles y recourent moins souvent parce qu'elles doivent convaincre leur partenaire de le mettre.

Pourquoi les jeunes adultes utilisent-ils moins le préservatif que leurs cadets? «Il semble y avoir des lacunes en matière de prévention au cégep, dit le Dr Dontigny. On approche la sexualité au secondaire. Il faut réfléchir à la manière de rejoindre les clientèles plus âgées.»

Selon le Dr Fortenberry, dont l'étude a été publiée dans le Journal of Sexual Medicine, les adolescents ont davantage recours au préservatif que les jeunes dans la vingtaine parce que leurs parents ont été davantage sensibilisés à la question et donc leur en ont parlé davantage. «Les baby-boomers n'ont presque pas eu d'éducation sexuelle. Les parents des enfants nés au début des années 90 en ont eu.»

Le Québec fait bande à part

Selon le Dr Fortenberry, la diversité des pratiques sexuelles actuelles, notamment l'expérimentation de l'homosexualité et la sexualité dans les danses rave, augmente aussi l'usage du condom parce que ce sont des activités clairement associées à un risque plus élevé d'infections transmises sexuellement (ITS). C'était la première fois depuis 1992 que la sexualité des adolescents américains était sondée de manière aussi exhaustive.

Une étude publiée à l'automne 2008 par Michelle Rotermann, de Statistique Canada, relevait toutefois que les adolescents québécois utilisent le préservatif moins souvent que les autres Canadiens. Le Québec était au dernier rang, avec un taux de 66%, contre une moyenne nationale de 75% et une pointe à 90% en Nouvelle-Écosse.

Ni le Dr Dontigny ni Mme Rotermann ne savent d'où vient cette différence. Le Dr Dontigny souligne qu'elle n'est pas très grande, alors que Mme Rotermann explique que le Québec fait souvent bande à part en matière de santé: il y a plus de fumeurs et de buveurs, mais moins d'obèses.

L'explication réside-t-elle dans une immigration et une migration interprovinciale moins grande, ce qui rend les Québécois francophones plus confiants envers les étrangers s'ils sont aussi québécois francophones? «Personne n'a jamais proposé cette hypothèse, dit Mme Rotermann. C'est tout simplement l'un des mystères des recherches sur les préservatifs. Par exemple, pour expliquer la différence entre les garçons et les filles, on pense qu'elles sortent avec des garçons plus âgés, donc moins susceptibles d'utiliser un préservatif. Mais on n'en est pas sûr.»

Mme Rotermann a aussi publié, l'an dernier dans le Journal canadien de la sexualité humaine, une étude sur la chute du port du préservatif avec l'âge. «On pense que c'est dû au fait que plus de gens ont une relation monogame. Ils deviennent habitués à ne plus utiliser le condom et, quand ils se retrouvent avec un nouveau partenaire, ce comportement perdure.»

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L'orgasme chez les ados

Les garçons surestiment l'atteinte de l'orgasme par leur partenaire, confirme par ailleurs l'étude de l'Université de l'Indiana sur la sexualité des adolescents. Plus de 85% des garçons estiment que leur partenaire a atteint l'orgasme lors de leur dernière relation sexuelle, mais seulement 65% des filles disent en avoir eu un. Presque tous les garçons affirment quant à eux avoir atteint l'orgasme, et les filles estiment que c'est le cas.

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Le préservatif au Québec et au Canada

Au Québec en 2009, chez les jeunes de 16 à 24 ans:

> 50% considèrent qu'un test de dépistage d'ITS est une condition nécessaire pour abandonner le condom avec un nouveau partenaire;

> 52% de ceux qui abandonnent le condom avec un partenaire stable l'ont fait après moins d'un mois;

> 62% utilisent toujours le condom avec les partenaires occasionnels;

> 75% utilisent toujours le condom avec un partenaire d'un soir.

Proportion de ceux qui ont utilisé un condom lors de leurs dernières relations sexuelles*

> 15-19 ans, garçons: 80%

> 15-19 ans, filles: 70%

> 15-17 ans: 81%

> 18-19 ans: 70%

> Québécois de 15-19 ans: 66%

> Ontariens de 15-19 ans: 77%

* Au Canada en 2005

Sources: Statistique Canada et ministère de la Santé du Québec