La récession pourrait changer radicalement nos habitudes de vie. Voilà qu'on se mettrait à acheter plus de préservatifs, que les standards de beauté changeraient du tout au tout et que les poilus reprendraient du service. Et même, que l'on n'écouterait plus la même musique. Petit tour d'horizon des effets de la crise qui laissent parfois perplexe.

Ruée dans les bibliothèques

Les ordinateurs des bibliothèques new-yorkaises sont pris d'assaut par des chômeurs désireux de mettre à jour leur curriculum vitae et de chercher dans l'internet des postes disponibles, a fait savoir le New York Times la semaine dernière. À Montréal, le nombre de volumes empruntés à la Grande Bibliothèque est à la hausse. En mars 2008, par exemple, 425 000 documents ont été empruntés; en mars 2009, ce chiffre a été de 458 000. La fréquentation n'a cependant pas augmenté, ce qui peut porter à croire que les gens qui succombaient au plaisir d'acheter un livre à la librairie optent maintenant plus souvent pour l'emprunt. (Louise Leduc)

Une exécution, c'est cher, finalement!

Et si l'abolition de la peine de mort passait par la crise? Au moins huit États américains envisagent de l'abolir, comme l'a fait le New Jersey en 2007. Une logique moins éthique que mathématique: chercher à faire condamner à mort un accusé coûte très cher. Il faut des preuves béton et beaucoup d'avocats. Au Maryland, l'Institut des études urbaines a évalué en 2008 que les 56 condamnations à la peine de mort recensées entre 1978 et 1999 ont coûté au moins 186 millions à l'État. (Louise Leduc)

 

Moins de mauvais films?

Dans une entrevue accordée à un journal allemand en février, l'actrice Meryl Streep a exposé la théorie qu'en raison de la crise, moins de mauvais films trouveront le chemin du grand écran. L'actrice oscarisée croit que si moins de films sortent, ils seront moins nombreux à se disputer les mêmes cinéphiles et que chacun pourra tenir l'affiche un peu plus que les quelques semaines qui sont de mise ces temps-ci. «Dans ce milieu, nous avons vécu très au-dessus de nos moyens», a-t-elle déclaré. (Louise Leduc)

Les foetus mâles plus vulnérables

Une étude émanant de l'Université Berkeley, en Californie, avançait en 2006 que les foetus mâles, déjà plus nombreux que les foetus femelles à finir en fausses couches, seraient encore plus vulnérables aux moments des grandes crises, le stress de la mère les affectant tout particulièrement. (Louise Leduc)

Bonne période pour les avocats spécialisés en divorce

À la liste des professions peu affectées par la crise économique ici comme aux États-Unis - qui compte déjà les actuaires et les huissiers -, il faut ajouter les avocats spécialisés en divorce. Aux États-Unis, les tribunaux se disent submergés par les demandes d'ajustement à la baisse de pensions alimentaires. À Milwaukee, notamment, la hausse enregistrée l'an dernier serait de 20%. (Louise Leduc)

L'arroseur non arrosé

Ironie des ironies, les agences de notation, montrées du doigt pour n'avoir rien vu venir et pour avoir donné des évaluations trop favorables d'entreprises, compteront probablement parmi les grandes gagnantes des mesures de relance en cours. Une quantité d'obligations seront mises sur le marché dont les émissions devront recevoir la bénédiction de ces mêmes firmes de notation. Le Wall Street Journal a fait savoir en mars que ces agences empochent entre 30 000$ et 120 000$ pour chaque portion de 100 millions de valeurs mobilières qu'elles ont à évaluer. (Louise Leduc)

Retour aux études?

À la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys, on note une hausse ces derniers mois des demandes d'informations sur l'éducation aux adultes et la formation professionnelle. Il est cependant trop tôt pour voir si la crise actuelle fera réellement augmenter les inscriptions. À la Commission scolaire de Montréal, on indique que ces secteurs sont très courus depuis 2000 et que les listes d'attente pour certaines spécialisations sont déjà très longues, notamment dans les métiers de la construction. (Louise Leduc)

Vive les chansons réconfortantes!

Selon une étude parue dans la revue spécialisée Psychology of Music et citée dans le New York Times en octobre, même nos goûts musicaux sont affectés par la récession, montre une recension des palmarès américains de 1955 à 2003. Ainsi, lors des périodes plus difficiles, les gens préféreraient les chansons plus lentes et plus profondes du genre That's What Friends are For et Bridge Over Troubled Water. Les chercheurs admettent cependant que la corrélation n'est pas parfaite: la chanson Macarena a fait un malheur lors d'un creux de vague économique. (Louise Leduc)

Ingurgiter sa récession

La firme Nielsen a dressé la liste des produits dont la consommation est en hausse. Au Canada, les ventes de café que l'on achète à l'épicerie ont augmenté de 7% l'an dernier. La même firme signale que l'alcool a le vent dans les voiles en France, de même que les préservatifs, la volaille surgelée et la farine. Aux États-Unis, le tabac et les oeufs se vendent mal lors de récessions, mais les résultats du troisième trimestre de Hershey illustrent bien le fait que les bonbons, chocolats et autres douceurs sont des gâteries qui ne coûtent pas cher et que l'on s'offre plus facilement quand les temps sont durs. (Louise Leduc)

Des jupes plus longues

C'est une idée qui a la vie dure. Dans les années 30, l'économiste américain George Taylor a avancé que les jupes étaient plus longues, en période de récession, parce que la modestie était de mise. Il fondait ses conclusions sur ses observations personnelles de la mode des années 20, dont le faste était accompagné de robes et de jupes plus courtes. Depuis, sa théorie ressort des boules à mites à chaque récession. Durant celle des années 70, on s'est éloigné des minijupes des années 60. Au début des années 90, les robes courtes des stars des années 80 (pensez à Julia Roberts dans Pretty Woman) ont pris quelques centimètres. Et cette fois? Il est trop tôt pour confirmer la tendance. La critique de cinéma du Los Angeles Times a toutefois noté que les costumes du dernier film de Hannah Montana étaient beaucoup plus pudiques que les autres. (Mathieu Perreault)

Barbes et cheveux longs

La récession influence-t-elle les choix capillaires? Oui, si l'on en croit plusieurs stylistes. Cet hiver, l'expression «barbe de récession» a été inventée pour expliquer l'attrait du mannequin-vedette français Patrick Petitjean, dont la barbe fournie ornait récemment le magazine GQ. L'explication est simple: dans des temps difficiles, mieux vaut montrer sa sagesse que son intrépide jeunesse. L'équation vaut aussi pour les femmes: une économiste britannique, Susanna Sallstrom-Matthews, de l'Université Cambridge, a dévoilé au Daily Mail des résultats préliminaires sur l'influence de l'économie sur la longueur des chevelures féminines. Dans les périodes prospères, les coiffures sont paradoxalement plus conventionnelles, avec de longs cheveux lisses. Selon Mme Sallstrom-Matthews, les temps plus durs poussent les femmes à faire davantage d'expériences avec différentes coiffures courtes, pour compenser la réduction de leur budget d'achat de vêtements. (Mathieu Perreault)

Maquiller son stress

Dans les mois suivant les attaques du 11 septembre 2001, Estee Lauder et L'Oréal ont vendu un nombre record de bâtons de rouge à lèvres. Les femmes, selon les fabricants de cosmétiques, compensaient le stress des attentats, et surtout du ralentissement économique qui les a suivis, en s'achetant un petit bâton de rouge à lèvres, une dépense limitée mais gratifiante. Par la suite, des économistes ont partiellement confirmé la théorie, relevant que les ventes ont augmenté de 25% durant la récession des années 30, mais qu'elles grimpaient aussi en période de prospérité. L' «index rouge à lèvres» est maintenant menacé par le fond de teint, dont les ventes ont progressé six fois plus vite que celles de rouge à lèvres (15% contre 2,5%) en 2008, selon le Daily Telegraph. (Mathieu Perreault)