Annie Howard ne met jamais les pieds à l'église. Mais dimanche dernier, elle n'a pas eu le choix. Ce sont ses deux petits chiens, qui l'ont entraînée. Et surprise: une foule d'autres pitous étaient aussi au rendez-vous!

Non, la dame n'avait pas la berlue. L'église, cet après-midi-là, était bel et bien ouverte aux chiens, une première au Québec. C'est que l'église anglicane Christ Church, de Beaurepaire, à Beaconsfield, vient de lancer un tout nouveau concept, Museaux et Prières. Cette cérémonie a lieu le premier dimanche de chaque mois, à 13h (jusqu'en janvier), pour les maîtres et leurs chiens, histoire de célébrer le rôle du meilleur ami de l'homme.

 

«Émouvant»

«Ce sont eux qui m'ont emmenée ici, raconte la jeune femme, qui vit autour du carré Saint-Louis. Je ne viens jamais par ici, je suis en visite chez ma soeur. Ils m'ont tirée jusque sur le terrain de l'église, je croyais qu'ils voulaient faire un pipi. Même pas! Et puis j'ai cru voir des oreilles de chiens par la fenêtre...»

Éberluée, mais visiblement remuée, elle se promet aussi de revenir, comme tous les autres fidèles rencontrés. «J'ai vraiment trouvé ça émouvant, dit-elle. Il faut respecter les animaux. Mes deux chiens sont des chiens de refuge. Un service comme ça nous rappelle tout le travail qu'il reste à faire en terme de respect des animaux.»

L'initiative vient d'ailleurs d'un organisme de défense des droits des animaux: les CaacQ (Centres d'adoption d'animaux de compagnie du Québec). «L'idée, c'est d'ouvrir le débat sur le bien-être des animaux au Québec, confirme la présidente Johanne Tassé. Et nous pensons que l'église a un rôle à jouer là-dedans.»

De son côté, le révérend Michael Johnson, de l'église Christ Church, a trouvé l'idée tout a fait appropriée: «il s'agit d'honorer les chiens, qui, chez certains, font partie de la famille, dit-il. Nous célébrons les chiens renifleurs, les chiens sauveurs, pourquoi pas célébrer les chiens compagnons? Nous leurs montrons ici tout le respect que nous leur devons, à titre de créatures de Dieu.»

Changer la vision des gens

Non, il ne croit pas que son initiative réussira à elle seule à remplir les églises. «Mais peut-être que les gens auront une attitude différente face à l'église, espère-t-il. Certains ont une vision négative. Peut-être que cette initiative pourrait la changer. J'espère que les gens vont se sentir chaleureusement accueillis.»

Chose certaine, les chiens, eux, l'ont été. Cajolés par leurs maîtres (ils étaient une cinquantaine) pendant tout le service, ils ont même participé à la communion: en guise d'hostie, on leur a servi un petit biscuit.

Hérésie? Bryan Pearce, révérend dans une autre église anglicane, qualifie plutôt l'idée de «novatrice». «Et puis pourquoi pas? Après tout, quand on parle de création, on parle de toutes les créations, et cela inclut les chiens! Mais mon avis est complètement biaisé», confie celui qui vit par ailleurs avec des chiens depuis plus de 45 ans. Certes, certains pourraient s'offusquer de la présence des chiens dans une église. «Certaines personnes ont des visions différentes de ce qui est approprié ou non, dit-il. Et on voit évidemment que le révérend Johnson n'a pas une vision trop coincée de la chose...»

Du côté de l'archevêché de Montréal, l'abbé Roy signale qu'il existe un rite de bénédiction des animaux «assez élaboré», mais que celui-ci se déroule habituellement «en privé», bref, dehors. «On ne fera pas entrer des animaux, à ma connaissance, dans l'église, dit-il. Non, je ne pense pas que du côté de l'église catholique, on aurait cette ouverture-là.» Question «de convenance et de propreté. Ce n'est pas un sacrilège, mais ça ne convient pas, explique-t-il. De la même façon que si l'on voulait faire la bénédiction d'une bicyclette, on ferait ça dehors.»

Prochains services Museaux et Prières: 1er novembre, 6 décembre, et 3 janvier, à 13h. Christ Church, Beaurepaire. Renseignements: 514-697-2204