Le journaliste Patrice Bergeron a vécu son dernier carême en Afghanistan, où il était en reportage. C'était un carême allégé, tout de même. Alors qu'il se prive normalement de café, d'alcool et de dessert pendant le carême, il s'est exceptionnellement permis sa dose de caféine quotidienne. Lorsqu'il a quitté Kandahar, le carême était terminé. La première chose qu'il a faite en atterrissant à Dubaï a été de s'acheter une bouteille de vin. «C'était un bourgogne aligoté. Je l'ai bu seul, dans ma chambre d'hôtel, et c'est sans doute la meilleure bouteille de vin que j'ai bue de ma vie!»

Celui qui, normalement, apprécie les bonnes choses de la vie accompagne ces restrictions d'une démarche spirituelle. «Pendant le carême, je me penche sur le sens des valeurs qu'on se donne dans la vie. À la fin du carême, ce que j'ai économisé en m'abstenant d'aller au café et d'acheter du vin, je le donne à un organisme de charité.»

 

Bien qu'il s'assume tout à fait, Patrice ne fait pas de prosélytisme. «Lorsque tu dis que tu fais carême, tu t'associes à une forme de religiosité qui a bien sûr des aspects négatifs.»

Mais au-delà de la religion, le carême est un moment où on teste sa discipline et sa maîtrise de soi, croit-il. «Aujourd'hui, les gens pensent que c'est impossible de s'imposer des restrictions. À mon avis, la restriction est aussi une forme de liberté. Il ne faut pas voir cela comme un moment de repli sur soi, de contrariété et de frustration. Qu'une fois par année je limite mes excès, ce n'est pas la fin du monde. Ça me permet de mieux apprécier tout ce que la vie me donne.»