Au début des années 80, Jacques a subitement perdu son emploi. Il était extrêmement compétent et productif. Mais son alcoolisme le rendait agressif avec ses collègues, au point où son patron n'a pas eu le choix de le congédier.

«J'étais extrêmement arrogant au travail», explique Jacques, joint par l'entremise d'Alcooliques anonymes. «On faisait une bonne job, on faisait de l'argent comme de l'eau. J'étais devenu très agressif, même avec la haute direction. Je me pensais au-dessus des relations de travail. Ce qui comptait, pour moi, c'était les résultats. Dans le monde des transports, où je travaillais, ce n'était pas une attitude qui détonnait. Mais même là, je dépassais les bornes.»Jacques se souvient en particulier d'un collègue à qui il faisait la vie dure. «Il avait une famille. Il s'en allait chez lui à 5 h pour les cours de patin et de natation de ses enfants. Je n'arrêtais pas de dire qu'il était nono. À un moment donné, on était tous les deux candidats pour une promotion et je suis passé en avant de lui. Ça m'a conforté dans mon idée. Mais en rétrospective, il avait beaucoup plus d'éducation et de finesse que moi, ça aurait été un meilleur candidat pour l'entreprise.»

En 2008, un rapport du ministère britannique de la Santé a estimé à 6,4 milliards de livres par année l'impact de l'abus d'alcool sur l'économie - en ce qui concerne l'absentéisme, le chômage et la perte de productivité au travail. Appliqués au Canada, ces chiffres signifient que les impacts purement économiques de l'alcool sont de 6 milliards $CDN par année. L'an dernier, une étude du Centre de toxicomanie et de santé mentale de Toronto estimait à 1 % du PNB les coûts totaux - économiques est sociaux - de l'alcool, soit 12 milliards pour le Canada ; cette étude avançait que les coûts en productivité perdue sont plus élevés que les coûts de santé, ce qui confirme les chiffres britanniques.

Sur le seul point de l'absentéisme, une étude norvégienne a estimé l'an dernier qu'une augmentation d'un litre par année de la consommation d'alcool pur augmente de 13 % l'absentéisme au travail. Une telle augmentation équivaudrait à une augmentation de 13 % de la consommation québécoise d'alcool.