Plus que trois semaines. C'est en effet le 18 novembre qu'arrive sur nos écrans le très attendu quatrième chapitre de la saga Twilight. Et si la tendance se maintient, outre la foule d'adolescentes hystériques, la première du film risque aussi d'attirer son lot de jeunes mères, de fières quadragénaires, même des grands-mères. Parce que le charme du vampire laisse visiblement peu de femmes insensibles. En effet, mêmes majeures et vaccinées, plusieurs avouent craquer pour cet éternel sanguinaire au teint pâle. Pourquoi?

Est-ce sa beauté, son raffinement, sa distance? Son côté gentleman ou bien son éternelle souffrance? Depuis le succès monstre de la saga Twilight, les analystes de toutes parts cherchent à comprendre: mais pourquoi diable les femmes craquent-elles pour les vampires?

Il faut dire qu'un groupe d'admiratrices fait bien parler d'elles depuis cinq ans déjà: les Twilight Moms (www.twilightmoms.com), qui compte pas moins de 43 200 membres aux États-Unis, toutes âgées de plus de 21 ans, séduites par l'univers des vampires en général, et par la saga Twilight en particulier. «Tout le mérite revient au livre. Le récit est tellement intense! L'histoire nous a toutes rappelé nos premières amours adolescentes, du temps où on n'avait rien d'autre au monde, pas d'hypothèque ni de compte d'épargnes-études pour les enfants, quand tout ce qui comptait, finalement, c'était cet amour, résume la fan et responsable des médias de Twilight Moms, Kara O'Grady, de New York. C'est comme si l'histoire d'amour faisait ressortir l'adolescente en chacune de nous.»

Le site, conçu au départ par une jeune mère de famille de l'Utah en 2006, a littéralement explosé. D'une centaine de membres le premier mois, il compte désormais des «chapitres» dans une foule de grandes villes américaines, notamment Los Angeles et New York. Régulièrement, les membres les plus actifs (actives) se réunissent («Ce sont des sorties de filles!»). Et chaque année, un visionnement du plus récent film de la série est organisé en avant-première.

«Échapper du quotidien»

«Si je me sens ridicule? Mais absolument, répond sans honte la trentenaire New-Yorkaise, par ailleurs auteure de scénarios pour la télé et le cinéma. Chaque fois que je vais à une avant-première et que je me retrouve entourée d'adolescentes, je me dis que c'est absurde. Pourquoi je fais ça? Mais parce que c'est un univers fantastique fascinant, et que ça m'offre un excellent moyen de m'échapper du quotidien.»

L'an dernier, deux acteurs de la saga se sont même pointés au visionnement new-yorkais (Kellen Lutz, alias Emmett, et Peter Facinelli, alias Carlisle, deux «gentils» vampires de la saga), pour participer à un tirage, et aller souper avec «six mères un peu timbrées». Ce qu'en dit son mari? «Il pense que je suis folle; lui, c'est plutôt un fan de Star Trek, répond-elle en riant. Mais vous savez, un petit peu de fantaisie, c'est bon pour tout le monde. Cela nous permet de prendre du recul par rapport à la réalité, en lisant, en visionnant les films, on se donne enfin un peu de temps pour soi.»

Et elle n'est pas seule. Il suffit de sonder autour de soi pour réaliser à quel point la série a séduit. Une amie, qui enseigne la littérature au cégep, nous a aussi avoué, les yeux brillants d'excitation, avoir été «complètement dedans» en dévorant la série. «C'était l'idée de reprendre mon roman d'adolescente», dit-elle. Une collègue quinquagénaire, par ailleurs amatrice de littérature, de romans policiers et d'essais, avoue également sans gêne son «plaisir coupable» à découvrir ce «phénomène de la culture populaire».

L'érotisme de l'abstinence

«Je pense qu'il y a un côté sexy au vampire, c'est l'ultime bad boy, analyse la spécialiste des comportements des consommateurs, Anne Darche. Il est toujours bien habillé, et puis c'est un gars qui embrasse dans le cou! On aime ça (rires)! Il a un côté classe, ténébreux, mystérieux et incompris. Cela donne aux femmes le goût de le sauver.»

Le site Vampiric Studies consacre tout un chapitre à ce charme impérissable qui entoure le vampire. «On nous le montre toujours d'une beauté parfaite, distant, mystérieux, mais surtout intense, peut-on y lire. À la fois, les femmes sont grisées par le danger qu'il représente et par la sécurité que leur procure cette force surhumaine.»

Plus récemment, divers observateurs y sont aussi allés de leurs explications. Dans le magazine Time (qui a d'ailleurs sacré Stephenie Meyer, l'auteure de Twilight, de «nouvelle J.K. Rowling»), le romancier Lev Grossman souligne la présence d'une sorte d'«érotisme de l'abstinence», due à la nature même du vampire. «Le lecteur se demande toujours si le vampire veut coucher avec l'héroïne, ou la déchiqueter en morceaux», souligne-t-il, d'où la tension sexuelle sous-jacente. Il souligne aussi cette phrase culte du vampire Edward, le héros de Twilight, à sa douce, Bella: «Ce n'est pas parce que je résiste au vin que je ne peux pas apprécier son bouquet...» «Il y a plus de sexe dans ce paragraphe que dans tout le bécottage des sept tomes d'Harry Potter, écrit le romancier. C'est ce qui fait tout le pouvoir de ces livres de vampires: ils sont proprets en surface, mais délicieusement coquins en profondeur.»

Les mères seraient-elles tout particulièrement séduites par cette apparente chasteté? Probablement. Ainsi, Donna Freitas, auteure de Sex and the Soul, un essai portant sur la sexualité, la spiritualité et l'amour sur les campus universitaires américains, écrit dans le Wall Street Journal que le vampire incarne en ce sens le «retour du parfait gentleman»: «Le vampire, c'est tout ce que les gars du secondaire ne sont pas!» Il est romantique, plein de principes, et surtout, refuse de toucher sa bien-aimée avant le mariage!

Et vous, pourquoi craquez-vous?

«C'est vrai que d'un point de vue moral, c'est super pour les adolescentes. Cela démontre qu'elles ne sont pas obligées de coucher avec un gars pour être aimées. Qu'un vrai copain qui va vraiment les aimer saura attendre et patienter», conclut Kara O'Grady, des Twilight Moms. L'idéal masculin serait-il devenu le vampire?

«Je dois avouer avoir lu (et relu) les livres de Twilight en assez peu de temps. (...) En même temps, les vampires d'Anne Rice me font autant craquer. Louis le tourmenté (aussi!) qui n'a jamais voulu être vampire, le côté sadique, mais sensuel de Lestat. Et le bel Eric Northman de Charlaine Harris ne me laisse pas indifférente non plus (surtout celui qui l'incarne dans True Blood). J'aime son côté badass.» mcdoux

«Dans le mythe du vampire, tout tourne autour de la jeunesse éternelle, celle-ci combinée à la dialectique puissance/vulnérabilité provoque un sentiment de séduction difficile à ignorer. Pour les plus jeunes, le vampire témoigne de la marginalité ressentie par ceux-ci en regard du monde extérieur.» lapinblanc

«Parce que c'est irréel. Tout simplement. Une histoire d'amour adolescente ne me ferait pas rêver, une histoire d'amour entre un immortel et une adolescente ouvre la porte à l'imaginaire, au rêve. (...) Je suis une fan de vampire, de Stoker à Ann Rice, en passant par Twilight, True Blood et cie. C'est une échappatoire. Une illusion.» momcaro

«Enfin, il est mystérieux, beau, jeune, omnipotent, attentif, protecteur, et se retient de ne pas boire votre sang pour ne pas altérer votre réalité fragile et virginale, parce qu'il vous aime juste comme cela, sans moins sans plus. Il se fout dans la merde avec son monde juste pour vous et il s'en fiche complètement. Il assure superbement. Vous n'êtes pas aimée pour ce que vous faites, performez ou accomplissez, mais purement et simplement pour ce que vous êtes. (...) Euh, l'un dans l'autre, c'est pas trop mal, comme tension fantasmatique...» ysengrimus

«Aucun intérêt. J'ai aimé ce type de séries quand j'étais ado et jeune adulte (par exemple: Charmed), maintenant je suis passée à autre chose.» cathou_76

(Commentaires tirés du blogue La mère blogue: www.lapresse.ca/mere)