Cuba a beau être la deuxième destination d'outremer (après la France) pour les Québécois, bien peu d'entre eux savent comment les Cubains vivent, au-delà des grilles de ces ghettos de luxe que sont les tout inclus de Varadero, Holguin et Cayo Coco. C'est pour leur permettre de bronzer en meilleure connaissance de cause que le journaliste Hector Lemieux vient de publier Comprendre Cuba aux éditions Ulysse.

Même les touristes les plus aventureux, ceux qui sortent plus souvent de leur tout inclus que les villégiateurs de base qui se contentent d'une excursion en cours de séjour, sont peu au fait du mode de vie des Cubains, qui se livrent difficilement aux étrangers. Et pour cause: la surveillance policière est omniprésente et ils risquent l'interpellation pour activité contre-révolutionnaire, voire pour prostitution dans le cas des femmes. Les carrières policières sont d'ailleurs très prisées au pays de Fidel, puisque le flic de base perçoit un salaire équivalant à 40$ par mois, alors que le médecin ne gagne que 25$ et que le salaire moyen flotte entre 10$ et 12$.

Hector Lemieux, qui séjourne à Cuba plusieurs fois par année, publie régulièrement des reportages sur la plus grande île des Antilles dans quelques grands journaux européens: Le Figaro, Le Soir de Bruxelles, Le Temps de Genève... Dans Comprendre Cuba, il nous apprend que le lot de sept Cubains sur dix est une «misère sans famine». Ces damnés des tropiques ne survivent que grâce à la libreta, carnet de rationnement qui donne droit à des aliments de base largement subventionnés par l'État: 3,5 kg de riz, 500 g de haricots, 2,5 kg de sucre, 10 oeufs et 230 g de steak haché par mois. Les autres améliorent leur ordinaire avec les pourboires en pesos convertibles s'ils sont employés d'hôtel, ou, s'ils ont la chance d'avoir de la famille aux États-Unis ou au Canada, avec les remesas, ces sommes d'argent qui leur parviennent sous forme de mandat. Hector Lemieux nous renseigne aussi sur la nomenklatura (les membres de haut rang de l'armée ou du Parti communiste), dont les enfants roulent en Mercedes ou en Peugeot, sur le racisme larvé (les Noirs occupent toujours des emplois du bas de l'échelle) ou sur les jineteras, ces «cavalières» qui dispensent leurs faveurs sexuelles aux touristes contre des ayudas - des «aides» financières qui leur permettent de se payer le nec plus ultra en matière de consommation: le cellulaire.

Comprendre Cuba, par Hector Lemieux, aux éditions Ulysse, 17,95$.