À Dakar, j'ai enfin trouvé un petit hôtel qui me sied bien: l'Océanic, rue Thann, entre le port et la place de l'Indépendance. À un jet de pierre du centre-ville, sans le vacarme des boîtes de nuit et avec, le soir, un bon petit vent de la mer.

Selon le dépliant, cet établissement, au charme colonial, est le plus ancien de Dakar. Et il propose, en permanence, des expositions d'art contemporain et africain.

Dans les faits, vous écrire assis au patio, sous un manguier en fleurs, entouré de peintures et de sculptures, avec une connexion Wi-Fi fiable et de bons petits plats sénégalais, moi, ça me plaît...

Du coup, la ville de Dakar m'irrite un peu moins. Peut-être parce que je ne suis même plus obligé de sortir dans la rue. Ha!

«Et il où est, Gaston Therrien de RDS, monsieur Blanchet?»

Oh, les nerfs! J'y arrivais dans deux minutes!

Non mais, que se passe-t-il, je vous sens fébrile ce matin... Vous l'aimez, Gaston Therrien, n'est-ce pas? Vous n'êtes pas les seuls.

Donc, de Dakar, je souhaitais aller en Casamance. Et le moyen le plus rapide, et le plus confortable, c'est le bateau: le Cosama, qui part du port de Dakar le soir et arrive le lendemain matin à Ziguinchor.

Après la catastrophe maritime du bateau Joola en 2002, qui avait entraîné la mort de 1872 personnes, inutile de dire que les conditions de sécurité ont été considérablement resserrées. Et c'est à bord d'un grand navire moderne que je me suis retrouvé, à des lieux du petit Molchanov, pour une journée supplémentaire en mer.

Devinez ce que j'ai fait? Je suis sorti sur le pont et j'ai profité de la remontée de la rivière Casamance pour jouer au birdeur, seul, et non sans un brin de nostalgie. Il y avait des oiseaux de toutes les couleurs, des dauphins... Ah, ce que j'aurais aimé être en compagnie de Graham et Andy!

Bref, arrivé à bon port, je suis aussitôt parti vers la plage, à Cap Skirring, avec en tête un séjour balnéaire et littéraire.

J'ai cherché sur la plage un endroit confortable. Tout était fermé, ou presque.

«La saison touristique est finie!»

En désespoir de cause, je me suis posé en ville, à l'auberge Le Palmier, chez Claude. J'étais le seul touriste dans la baraque et le Claude en question, un hôte très sympathique, était manifestement heureux de me voir débarquer. Il m'a fait un vrai bon prix et m'a offert un café exquis. Puis je suis sorti pour le lunch. Au coin de la rue, j'ai aperçu le resto-bar Le Palet.

Je me suis arrêté en face de l'affiche. Le Palet? Y a-t-il une faute d'orthographe, ou est-ce bien «le palet» comme dans «la rondelle», en France? J'ai été accueilli par Stéphane, le propriétaire. J'étais sous le choc. Était-ce bien un bâton de gardien de but que je voyais, là, entre deux masques africains?

«Oui, c'était le bâton du gardien de MON équipe!»

Stéphane, un Français, est un fan de hockey. En France, il assistait à tous les matchs de SON équipe, les Ours du Vercors, à Villard-de-Lans, une équipe de la Ligue Magnus qui affichait plusieurs joueurs québécois dans son alignement... Dont un certain Gaston Therrien.

«C'était mon idole. J'avais sa photo dans ma chambre!»

Il me tire à l'intérieur du bar.

«Regarde!»

Sur la porte des toilettes était vissé un bâton de joueur avec, bien en vue, le nom «Therrien» écrit dessus...

«C'est mon plus beau souvenir. J'ai été obligé de le scier en deux pour l'amener ici!»

J'ai secoué la tête. Je suis au Sénégal ou quoi? Aussitôt, on s'est mis à parler du hockey de la LNH, qu'il connaissait au moins autant que moi, et du Canadien de Montréal qui affrontait Pittsburgh, dans le septième match de la série, ce soir-là.

«C'est dommage, parce que s'il y avait le signal Wi-Fi, nous pourrions écouter le match sur le web...

- Mais c'est qu'il y a un signal!»

Le soir, j'ai donc apporté mon ordinateur et mes petits haut-parleurs de voyage, et on s'est installés au bar pour écouter la partie sur ckac.com. C'était génial! Fallait voir la tête de Stéphane en entendant les expressions du commentateur.

«Ha! Vissé dans la bande! Elle est bien bonne, celle-là! Vissé dans la bande...»

Cela dit, Stéphane a beaucoup apprécié la description du match, qu'il a trouvée précise et très imagée.

«On devrait seulement dire à l'analyste d'arrêter de répéter "au risque de me répéter"!»

Et, cerise sur le sundae, comme vous le savez, le Canadien a gagné.

Alors, vous devinez peut-être la suite. Je me suis accroché les pieds dans le tapis et j'ai passé deux semaines entre le Sénégal et le Centre Bell, avec Stéphane, Philippe, Xavier, Éva, Rachèle et plein de nouveaux amis...

Je suis reparti après la défaite contre Philadelphie, le coeur un peu gros. On s'est fait la bise.

«À l'année prochaine, Bruno?

- Ouais... Si on fait les séries!»

Photo: Bruno Blanchet, La Presse

Stéphane, Rachèle et deux petites voisines devant Le Palet, à Cap Skirring.