Tous les voyagistes s'entendent pour dire que la Riviera Maya fera un malheur, l'hiver prochain. «L'alerte au virus (A)H1N1 et la crise qui continue à sévir aux États-Unis ont obligé les hôteliers mexicains à réduire leurs prix», constate Benoît Deshaies, vice-président ventes et marketing de Tours Mont-Royal. «Les tarifs à Cancun et sur la Riviera Maya ont baissé dans une proportion de l'ordre de 20% à 25%, comparativement à il y a deux ans.» Un forfait d'une semaine dans un bon hôtel, qui se détaillait 1800$ en moyenne, s'y vendra moins de 1400$, cette année. Et les connaisseurs savent que la qualité des installations et de la restauration est supérieure à celle qu'on retrouve en République dominicaine et, surtout, à Cuba, les deux autres points de chute favoris des Canadiens. Sans compter que, des grands sites mayas comme Chichén Itza, Tulum ou Uxmal, aux parcs naturels comme Xcaret ou Xel Ha, l'éventail des excursions y est beaucoup plus étoffé qu'ailleurs.

La demande pour Cozumel, cette île située à moins d'une heure de bateau de Playa del Carmen, devrait également faire l'objet d'une forte hausse, parce qu'Air Canada y affecte un vol direct et que plusieurs grossistes l'incluent dans leur programmation.

Mais il ne s'agira là que du redécoupage d'une tarte - la fréquentation touristique - dont la Riviera Maya, la République dominicaine et Cuba continueront à s'approprier les plus gros morceaux. «Les consommateurs canadiens n'achètent pas tant une destination qu'une marque hôtelière», remarque Sam Char, directeur exécutif de Vacances Sunwing au Québec. «Les habitués des destinations soleil ont essayé plusieurs marques, ils en ont apprécié une ou deux et ils leur restent fidèles. S'ils aiment la chaîne Iberostar, ils savent qu'à quelques nuances près, ils retrouveront le même type de confort et la même qualité de service et de restauration dans un Iberostar de Punta Cana, que dans un Iberostar de la Riviera Maya ou de Varadero. Pour une bonne proportion de la clientèle, la destination ne présente plus qu'une importance très secondaire.»

Une douzaine de marques de tout-inclus obtient les faveurs des villégiateurs canadiens: Occidental, Bavaro, RIU, Iberostar, Barcelo, Karisma, Palace Resort... La plupart sont espagnoles (les Espagnols se sont fait les dents à Majorque et sur la Costa del Sol lorsque le tourisme de masse a commencé à se développer au début des années soixante). Quelques-unes sont mexicaines ou - c'est le cas des Sandals ou des SuperClubs - jamaïcaines.

Dans un contexte où la propriété devient la destination, on peut se demander pourquoi certains voyagistes s'efforcent encore de trouver de nouveaux endroits pour varier leurs menus. Ainsi, cette année, Vacances Sunwing, justement, lance le Bélize, un pays qui jusqu'ici n'intéressait guère que les amateurs de plongée qui empruntaient des vols réguliers pour s'y rendre. Mais il ne s'agit que d'un programme très limité qui n'attirera que quelques dizaines de voyageurs par semaine. Ils devront, pour arriver au Bélize, prendre un petit avion au départ de l'île hondurienne de Roatan, autre destination de plongée que Vacances Sunwing dessert par vol nolisé une fois par semaine.

Si Nolitours relance Carthagène, en Colombie, c'est justement parce que sa chaîne hôtelière vedette - Decameron - vient d'inaugurer une nouvelle propriété, le Royal Decameron Baru Beach, dans une île située au large de cette ville, une des plus belles cités coloniales d'Amérique latine.

Parallèlement à la majorité des vacanciers qui préfèrent s'installer dans un grand complexe dont ils sortiront peu, il s'en trouve - de plus en plus nombreux - qui veulent diversifier leur expérience en combinant plage et visites. Ainsi, à Cuba, les forfaits alliant un séjour à Varadero à quelques jours de déambulation dans La Havane connaissent un succès croissant. Cela a d'ailleurs incité Vacances Transat à exploiter, l'hiver prochain, des vols pour la fascinante capitale cubaine.

Et les Cubains aimeraient persuader les touristes de bouger davantage dans leur île. Ils viennent de lancer une campagne de publicité qui met en évidence le patrimoine architectural et naturel de l'île, ainsi que des Cubains croqués dans des scènes de la vie quotidienne. «Nous ne sommes pas seulement une île avec des plages: nous sommes un grand pays», observait Maria Elena Lopez Reyes, vice-ministre du Tourisme de passage à Montréal pour le lancement de la campagne.

La ministre du Tourisme du Mexique, Gloria Guevera tient le même discours. «Nous avons accueilli 21,4 millions de touristes étrangers, l'an dernier, mais huit visiteurs sur dix sont des touristes balnéaires», remarque-t-elle. «Il y a là un déséquilibre que nous voudrions corriger. Nous avons, bien sûr, de superbes plages, mais nous avons aussi autre chose: 30 000 sites archéologiques répertoriés, 3000 ans d'histoire, 62 groupes ethniques qui ont tous une tradition culturelle d'une grande richesse, 29 sites inscrits au Patrimoine de l'humanité par l'UNESCO, sans parler des paysages et des joyaux architecturaux qu'on retrouve un peu partout sur notre territoire.» Les Canadiens qui veulent échapper à l'hiver seront-ils sensibles à ce genre de discours? Pour cela, il faudra que les grossistes proposent davantage de programmes combinant plages et circuits.

Au Mexique, les grands sites mayas comme Chichén Itza, Tulum (notre photo) et Uxmal sont fort appréciés des touristes.