Des soldats patrouillent l'arme en bandoulière et des petits drapeaux rouges ornés d'un crâne signalent la position des mines: cela n'empêche pas Séoul d'espérer que la zone frontalière entre les frères ennemis Corée du Nord et Corée du Sud devienne un haut lieu du tourisme.

Cette dernière frontière de la Guerre Froide, inhabitée depuis 60 ans, est un havre pour la vie sauvage, inhabituel dans ce pays très industrialisé.

La frontière longue de 248 kilomètres, qui sépare en deux la péninsule coréenne, a été fixée à la fin de la guerre de Corée (1950-1953). Elle est matérialisée par une zone tampon de 4 km de large entre les deux pays, qui n'ont toujours pas signé de traité de paix.

Cette zone porte le nom paradoxal de zone démilitarisée (DMZ),  bien qu'il s'agisse d'un des endroits au monde les plus surveillés par les soldats des deux camps.

Séoul tente à présent de promouvoir l'attrait touristique de la région, en vantant une faune et une flore préservées, et en y ouvrant des chemins de randonnée.

«La DMZ est un no man's land depuis des décennies, créant ainsi un site naturel parfait pour l'écotourisme», déclare à l'AFP Park Mee-Ja, responsable de la politique sur la nature au ministère de l'Environnement, lors d'une visite près de la frontière.

La DMZ et la bande de terre qui la longe sont inaccessibles aux civils, à l'exception de Panmunjom, un lieu baptisé «village de la paix» et visité chaque année par des milliers de visiteurs sud-coréens.

Les promeneurs ne pourront pas évidemment, arpenter la zone tampon mais Séoul veut développer et mettre en valeur les sentiers des alentours.

La DMZ et ses environs abritent près de 3000 espèces de plantes et d'animaux, dont des loutres, des mouflons et des daims musqués, tous disparus sur le reste du territoire sud-coréen.

Au terme de longues négociations, l'armée sud-coréenne a accepté d'ouvrir au public ces alentours et d'aider au développement de chemins dépourvus de mines.

Ces sentiers de randonnées devraient ouvrir en 2013, dans l'est du pays.

«Vous pourrez marcher le long des fils barbelés de la DMZ, apercevoir la Corée du Nord depuis les collines, ou contempler des champs de bataille restés intacts depuis des décennies», indique Park Mee-Ja.

Plusieurs petites enclaves ont déjà été ouvertes à un public avide de nature mais le programme de développement présenté actuellement est beaucoup plus ambitieux.

Les groupes de randonneurs seront accompagnés de soldats, qui veilleront à ce qu'ils ne s'écartent pas des zones sécurisées et certifiées sans mine.

Séoul va également demander à l'Unesco de désigner la DMZ comme une des 500 «réserves de biosphère» de l'organisation.

Ce programme d'ouverture aux promeneurs avait déjà été évoqué en 2005. Mais les tensions récurrentes entre le Sud et le Nord, et la réticence des militaires à ouvrir aux civils des endroits dits sensibles, n'ont jusqu'alors jamais permis de le concrétiser.

Selon la presse sud-coréenne, le président américain Barack Obama visitera la DMZ fin mars, lors du sommet nucléaire qui se déroulera les 26 et 27 mars à Séoul.

Lors d'une visite en 1993, un de ses prédécesseurs, Bill Clinton, avait estimé qu'il s'agissait de «l'endroit le plus effrayant de la planète».

Mais Jennifer Seif, une Américaine qui s'est rendue très récemment près de la DMZ, encourage Barack Obama à venir. «Il y trouvera l'inspiration», assure-t-elle.

«Cet endroit porte un message, qui engage à résoudre les différends non par la force, mais grâce à des ponts construits entre les pays», ajoute cette responsable d'une association pour un tourisme respectueux en Afrique du Sud.