Des sorties équestres de 24 heures au coeur du parc régional des Appalaches, avec une nuit en refuge, pour jouer au cow-boy? C'est ce que propose la pourvoirie Daaquam depuis le début de l'été et jusqu'à la fin novembre. À cheval!

Lorsque est venu le temps de traverser à gué la rivière Daaquam, Lady s'est fait prier. Ma jument n'avait nulle envie de se mettre les pattes dans l'eau glacée. Ses poils d'hiver ont beau avoir commencé à pousser, c'était beaucoup lui demander.

Il a fallu tout le pouvoir de persuasion de la guide, déjà bien engagée dans la rivière avec sa monture, Cheyenne, pour décider Lady à se mouiller. Un sabot à l'eau, puis l'autre, jusqu'à ce que l'eau lui monte sur les flancs. Les jambes tendues droit devant, je veillais à préserver mes bottes de l'humidité. Essentiel pour ne pas passer les 24 prochaines heures les pieds mouillés...

Depuis l'été, la pourvoirie Daaquam propose des sorties équestres de 24heures au coeur du parc régional des Appalaches, à 115 kilomètres au sud-est de Québec. Vingt-quatre heures, coupées en deux par une nuitée dans un refuge, où les cavaliers peuvent s'imaginer dans la peau d'un cow-boy. Ici, l'expérience ne se limite pas à une sortie à la queue leu leu, où les cavaliers pourraient tout aussi bien être des épouvantails.

Un lien de confiance

Premier constat à notre arrivée, tout juste après dîner: les chevaux ne sont pas sellés, prêts à partir. Ils paissent plutôt dans leur enclos. Marie-Claude Croteau, copropriétaire de la pourvoirie Daaquam, nous accueille. Avant d'aller chercher les bêtes, elle sonde notre niveau d'expérience. Pas besoin d'être des cavaliers aguerris, mais les 24heures à cheval ne sont pas conseillées aux néophytes. Contrairement aux manèges intérieurs, l'équitation en pleine nature comporte des risques, dit-elle.

«Trois fois sur quatre, on croise des orignaux lors de nos sorties. Des perdrix peuvent s'envoler sur notre passage, on peut voir des chevreuils qui bondissent devant nous. Les chevaux sont habitués, mais il faut rester alerte... Ce sont des animaux; on ne sait pas comment ils peuvent réagir. Il faut pouvoir conduire sa monture.»

Il reste maintenant à ramener les bêtes à l'écurie pour les brosser avant de les seller. «Les chevaux ne sont pas des quatre-roues sur lesquels on monte et dont on descend sans s'en soucier. Il faut établir un lien de confiance et le brossage est le moment parfait pour faire un premier contact», dit Marie-Claude.

On me confie Lady, une jument âgée de 8 ans, au pelage blanc. «C'est une bonne jument, mais un peu inquiète. Lorsqu'on s'éloigne trop de l'écurie et de sa zone de confort, elle a besoin d'être rassurée. Il faut lui parler souvent.»

La discussion s'amorce donc entre deux coups de brosse. Je bavarde et les oreilles de Lady suivent ma voix comme des antennes paraboliques. Premier contact réussi.

L'après-midi se déroule sans anicroche, dans une splendide lumière automnale. Pas d'orignaux ni de chevreuils pour mettre les nerfs des chevaux à l'épreuve. Pendant les 15 km de randonnée, nous longeons un lac à truite et une tourbière, traversons à gué la rivière Daaquam, avant de nous diriger vers le refuge Boréal.

Ma cabane à Saint-Just

Fait de bois équarri, le refuge a toutes les caractéristiques de la cabane au Canada, si chère à l'imaginaire des touristes étrangers: poêle à bois, toilettes sèches extérieures, lits superposés en bois, sacs de couchage moelleux... Rustique, mais confortable, surtout après deux heures trente d'équitation au grand air. Des balles de foin pour les chevaux, un chocolat chaud pour les humains. Le bonheur.

Les bêtes dormiront à la belle étoile (sous des milliers d'étoiles, en fait). Pour nous, la soirée se passe à table: soupe aux légumes, tourtière de cerf rouge des Appalaches, légumes grillés, gâteau aux carottes. Et verre de vin... dans un verre de styromousse, ce qui gâche un peu l'effet. Les assiettes et couverts de plastique, jetés au feu après usage, ne sont guère mieux... De la vaisselle en acier émaillé serait plus écolo. Plus authentique aussi.

Au lever, le sol est couvert de givre et le thermomètre indique -5 degrés. Pour combattre le froid, un déjeuner du cow-boy: oeufs, bacon, saucisse, tomate, rôties et confiture, le tout préparé par le guide sur un petit réchaud au propane. Dans la fenêtre de la cuisine, Sonnyse montre son grand nez. Il attend un bout de pain, qu'on ne peut lui refuser.

Au moment du départ, le mercure a à peine franchi le zéro. Mais le ciel bleu promet une autre belle journée. Direction: la frontière canado-américaine. Dans le parc des Appalaches, la forêt, dense, dévoile un sol couvert de mousse. Les feuilles ont pris leurs couleurs automnales. C'est là tout le plaisir d'une randonnée à cheval: pouvoir contempler la nature tranquillement, d'un angle différent.

Dans ce coin du Québec, la frontière avec les Américains se limite à une large bande de terrain défrichée, qui coupe la montagne en deux, avec une simple borne pour marquer l'emplacement exact de la frontière. «Le plus proche village est à 160 km de marche», lance la guide. Il n'y a que les orignaux pour traverser à leur guise, comme cette mère et son petit que l'on voit passer au loin. Mieux vaut rebrousser chemin en direction de l'écurie.

Après une trentaine de kilomètres de randonnée en deux jours et une nuit sous les étoiles, les chevaux ont hâte de rentrer...

Outre les sorties équestres, d'une durée d'une heure à deux jours, offertes jusqu'à la fin du mois de novembre, la pourvoirie Daaquam offre plusieurs activités, dont du chien de traîneau, un safari photo, des expéditions de motoneige ou de quad. Des services de massothérapie sont aussi offerts. En ce qui concerne l'hébergement, la pourvoirie compte une auberge (deux chambres et une suite), ainsi que sept chalets (d'une à quatre chambres) offerts en location. Aussi sur place: service de restauration, piscine intérieure et baignoire à remous extérieures.