De la randonnée dans la région de Thetford Mines? Le réseau de sentiers des trois monts de Coleraine vaut le voyage. Sur place, flore unique, géologie exceptionnelle, vues panoramiques et vestiges miniers combleront les randonneurs les plus exigeants.

Dans la région de Thetford Mines, les activités humaines ont radicalement transformé le paysage. L'exploitation de l'amiante pendant plus d'un siècle a laissé des cicatrices à la grandeur du territoire, sous la forme d'immenses mines à ciel ouvert, de bâtiments industriels abandonnés et de montagnes de résidus miniers à perte de vue. Malgré tout, ce territoire vallonné demeure d'une grande beauté. On en saisit la véritable nature en explorant les sentiers des trois monts de Coleraine.

Situé au sud-ouest de Thetford Mines, ce territoire protégé, d'une superficie de 12 km2, constitue, dans une région exploitée jusqu'à l'os, une enclave de nature sauvage encore intacte. Il englobe la réserve écologique de la Serpentine-de-Coleraine, l'un des rares endroits au Québec où il y a présence de serpentine, roche ultrabasique riche en magnésium. Ce type de roche favorise la présence de plantes particulières, dont l'aspidote touffue, petite fougère que l'on voit seulement dans six endroits en Amérique du Nord.

Les réserves écologiques, qui affichent un niveau de protection supérieur aux parcs nationaux, sont normalement interdites d'accès. Mais lors de la création de cette réserve en 2003, Québec y a autorisé la randonnée, afin de faire accepter le projet à la population locale, qui fréquente les lieux depuis des décennies. Aujourd'hui, les trois monts de Coleraine sont sillonnés de près de 20 km de sentiers, dont une partie sort de la réserve écologique pour se promener dans la zone de préservation de la municipalité de Coleraine.

Les trois monts possèdent deux facettes bien distinctes. Dans la réserve écologique, d'une superficie de 397 hectares, les sentiers larges, qui permettent aux randonneurs de marcher côte à côte, se démarquent par leur aménagement de grande qualité. On marche sur un sol parfaitement drainé, sans racines et sans obstacle pour entraver l'avancée. Dans les fortes pentes, on a même le privilège de descendre ou de monter dans des escaliers en blocs de roche. Résultat: c'est un secteur accessible aux familles ainsi qu'aux personnes plus âgées moins habiles physiquement.

Ces sentiers première classe mènent à deux des trois sommets: le mont Oak, qui recèle une magnifique pinède, un phénomène rare dans la région, et le mont Kerr. Sur ce dernier, à 495 mètres d'altitude, on trouve deux belvédères naturels offrant des vues imprenables sur la région. Notre regard porte jusqu'au mont Mégantic, qui se détache à l'horizon grâce à son altitude dépassant les 1100 m. De là, on surplombe également l'immense cratère de LAB Chrysotile, la dernière mine d'amiante encore en activité au pays, mais dont la fermeture est annoncée pour le 14 novembre, ce qui marquera la fin d'une époque.

Dans la zone de préservation de Coleraine, accessible par la ville minière de Vimy Ridge - de toute beauté, malgré les installations minières délabrées -, les sentiers étroits, boueux et jonchés de racines conviennent davantage aux adeptes de randonnée sauvage. On y chemine à un rythme beaucoup plus lent que dans la réserve, mais les panoramas qui se succèdent valent amplement l'effort supplémentaire.

Sur le dos du mont Caribou, à 558 m d'altitude, on réalise toute la démesure de l'activité minière qui a façonné la région. Se dressent devant nos yeux des dizaines de montagnes grisâtres de pierre broyée, constituant ce qu'on appelle des haldes. Ces résidus miniers, que plusieurs considèrent comme des pustules dans l'environnement, donnent bizarrement une couleur, une personnalité à la région. Chose certaine, ces panoramas spectaculaires ne laissent pas indifférent.

Les parois escarpées du mont Caribou, constituées de serpentine, une pierre de couleur rougeâtre assez spectaculaire, procurent des vues dans toutes les directions; la randonnée n'est jamais monotone. Chemin faisant, on contemple les monts Adstock et Ham, les lacs Saint-François et Aylmer ainsi que des vallons à l'infini. Les randonneurs font aussi l'exploration de deux grottes où l'on exploitait jadis de la chromite, minerai qui servait à la fabrication d'armement. Géologie, nature, histoire, une randonnée dans les trois monts nous en met plein la vue.

La traversée des trois monts

Deux portes d'entrée existent pour découvrir ce territoire: par Saint-Joseph-de-Coleraine, jouxtant la réserve écologique, et par Vimy Ridge, qui donne accès à la zone de préservation de la municipalité de Coleraine. Si vous n'avez qu'une seule journée pour découvrir les trois monts, je vous suggère d'y aller à deux autos. Cela vous permettra de faire la traversée complète du territoire sans jamais emprunter le même chemin. Avec l'itinéraire le plus court, c'est une journée de 12 km minimum qui vous attend, mais en y ajoutant les boucles, le plaisir peut se prolonger pour une longue journée en plein air. Attention, certaines portions ne sont pas faciles!

Situés à plus de trois heures de route de Montréal, les sentiers pédestres des trois monts de Coleraine sont accessibles à l'année. Pour séjourner sur place pendant la saison froide, deux options d'hébergement s'offrent aux randonneurs: une yourte confortable, située à proximité d'un stationnement, ainsi qu'un refuge près du lac Johnston. Cette option plaira aux aventuriers, car il faut transporter ses bagages sur des kilomètres pour s'y rendre. La récompense: la tranquillité totale. Vous n'avez pas vos raquettes? Pas de problème, on en fait la location sur place.

Info: www.3monts.ca

Les frais d'hébergement de ce reportage ont été payés par Tourisme Chaudière-Appalaches.

Repères

Où dormir?

L'auberge La bonne mine se trouve dans le quartier Mitchell, à Thetford Mines, un secteur autrefois habité par les propriétaires et les dirigeants des mines d'amiante. On y trouve cinq chambres dans une spacieuse maison datant de 1929, occupant un immense terrain boisé. Les propriétaires, Stellie et Adam, n'ont que 27 et 25 ans et ils sont hyperchaleureux. Les soupers valent le débours et les corps fatigués par la marche profitent du spa et du sauna extérieurs.

www.aubergelabonnemine.com

Où manger?

Le centre-ville de Thetford Mines est presque moribond. Toutes les grandes surfaces quittent la rue Notre-Dame pour le boulevard Frontenac, une réplique à petite échelle du boulevard Taschereau. Dommage. Heureusement, quelques Gaulois résistent à l'exode. Cédric Malosse, Français d'origine, a ouvert il y a deux ans le bistro L'maudit Français, qui propose "une cuisine pas fine". Ambiance sympa, cocktail à la bière et menu abordable font le bonheur de la clientèle.

156, rue Notre-Dame O., 418-755-1663

La fromagerie la Bourgade, qui se spécialise dans la fabrication de fromage cheddar en meule ou en grains, possède aussi un resto-pub très populaire chez les locaux, qui profitent à fond de l'immense verrière ensoleillée. À savourer après une journée de plein air: la poutine avec fromage en grains frais du jour, sauce et frites maison. Une des meilleures poutines traditionnelles que j'ai goûtées. À un jet de pierre du centre-ville.

16, rue Caouette E. 418-335-3313

À voir

> Parc national de Frontenac: à une quinzaine de minutes de Thetford Mines, les adeptes de nature peuvent découvrir le secteur Saint-Daniel de cette zone protégée. En plus de profiter de la vue sur le lac Grand Saint-François, de courts sentiers en boucle, sur des trottoirs de bois, donnent accès à une immense tourbière, un milieu de vie exceptionnel où l'on croise souvent des orignaux (en matinée ou à la tombée du jour). Ce secteur est cependant inaccessible en hiver.

> Mont Adstock: cette station de ski possède 26 pistes, dont une majorité sont classées de niveau difficile ou extrême. Un télésiège quadruple dessert le sommet, qui dépasse les 700 m.

> Musée minéralogique et minier de Thetford Mines: pour découvrir la géologie et l'histoire minière de la région.

www.sepaq.com www.skiadstock.com www.museemineralogique.com