Oubliés les bouchons de circulation au moindre flocon, la neige grise et les trottoirs glacés. Pour retrouver le vrai sens de l'hiver, rien de tel qu'un long week-end en Gaspésie, au coeur des Chic-Chocs.

Certes, les 750 km qui séparent Montréal du parc national de la Gaspésie peuvent sembler effrayants, surtout en pleine saison blanche. Dans les plus hautes montagnes du Sud québécois, on n'est jamais à l'abri d'une grosse bordée. Et c'est tant mieux. Les 5 à 6 m de neige qui couvrent la région en moyenne chaque année sont à eux seuls une excellente raison pour rouler jusqu'en Gaspésie. Même si ce n'est que pour quelques jours...

Pour faciliter l'accès aux montagnes enneigées du parc national de la Gaspésie, la Société des établissements de plein air du Québec (SEPAQ) offre depuis cette année un service de navette en autocar reliant Montréal et Québec aux Chic-Chocs (voir encadré).

C'est ainsi que le dernier vendredi de janvier, je me suis retrouvée à déjeuner à Montréal pour ensuite souper au Gîte du Mont-Albert, dans le parc de la Gaspésie. Et ce, sans avoir eu à prendre le volant...

Samedi: le grand blanc

Pour les habitués des stations de ski, la glisse avec de la poudreuse jusqu'aux chevilles est une bénédiction rare. Dans le massif des Chic-Chocs, c'est le lot quotidien.

Photo: fournie par le parc national de la Gaspésie

Au coeur des Chic-Chocs, le paysage est iréel, magique.

Il y a cinq ans, Stéphane Gagnon a créé l'entreprise Ski Chic-Chocs, qui propose plusieurs activités hivernales dans les coins plus reculés du massif montagneux: randonnée guidée en raquettes, safari photo, ski nordique (avec ascension en peaux de phoque) et ski hors-piste avec remontées en véhicule à chenillette (communément appelé Catski).

J'opte pour le Catski, histoire de goûter pour la première fois de ma vie à la glisse en terrain vierge. Les skis paraboliques étant inutiles ici, Ski Chic-Chocs nous fournit des skis de poudreuse, plus larges et moins rigides, pour flotter sur la neige. On nous fournit aussi un appareil de recherche de victimes d'avalanche, un ARVA.

«Aujourd'hui, les risques d'avalanche sont modérés en milieu alpin», explique Stéphane Gagnon, en nous enseignant l'utilisation de ce petit émetteur qui permettrait de nous localiser sous la neige advenant le pire.

Tous les deux jours, le Centre d'avalanche de la Haute-Gaspésie évalue les conditions sur le terrain et diffuse un bulletin sur les risques d'avalanche. Peu importe les degrés de risque, on ne skie pas dans l'arrière-pays sans ARVA, insiste notre guide.

Le groupe grimpe ensuite dans des carrioles fermées attachées à des motoneiges. Direction : le Catski, qui nous mènera au secteur des Mines à Madeleine, l'un des plus grands «trous à neige» du parc.

En raquettes, il faut six bonnes heures pour se rendre au refuge au creux de la cuvette de l'ancienne mine de cuivre. On se rendra au sommet en moins d'une heure: huit skieurs assis bien au chaud pendant que le Catski grimpe à la verticale le long de précipices à donner le vertige.

Le paysage est irréel, magique. Ce n'est pas pour rien que le magazine National Geographic Traveler a inclus la Gaspésie dans son palmarès des destinations à visiter en 2011. Le peu qui dépasse encore des arbres ploie sous la neige. Des sapins hauts de plus de 2 m ont l'air de vulgaires bosquets. Un marcheur imprudent qui s'approcherait trop pourrait disparaître, enseveli sous la neige folle.

Au sommet, sur le plateau alpin, les arbres ont disparu. Autour, tout n'est que blancheur. «On va skier sur la lune», lance un compagnon skieur, émerveillé.

Pendant toute la journée, le groupe dévalera des couloirs enneigés entre des sapins chargés, les planches perdues dans la poudreuse, pour être aussitôt remonté par le Catski. Nos traces s'entrecroisent dans un décor tellement grandiose qu'on se croirait dans un film de Warren Miller, le grand maître du film de ski.

Pour certains (j'en suis!), l'expérience s'avère toutefois une formidable leçon d'humilité. Il y a un monde de différence entre skier sur des pistes damées surfréquentées et un bois plein de poudreuse à flanc de montagne...

J'ai encore des croûtes à manger. Mais qu'importe. L'expérience était exaltante. Et jamais je n'ai entendu autant de wow! de oh! de ah! et de yahou! pendant une journée de ski. Les exclamations se sont d'ailleurs poursuivies longtemps, au bar du Gîte, devant un verre de Caribou fringuant, un mélange de Sortilège, de vin rouge et de bière de bouleau.

Photo: fournie par ski Chic-Chocs

L'entreprise Ski Chic-Chocs propose plusieurs activités hivernales dans les coins plus reculés du massif montagneux, dont du ski hors-piste avec remontée en véhicule à chenillette, communément appelé Catski.

Dimanche: la contemplation



Après l'adrénaline, journée détente au programme, avec une matinée de randonnée raquettes-yoga.

Du yoga en raquettes? Oui, c'est possible! La professeure Julie Ruest propose une balade dans les sentiers qui bordent le Gîte du Mont-Albert, balade ponctuée par de séances de yoga raquettes aux pieds. «Ne vous inquiétez pas, on ne fera que des postures debout», prévient notre guide. L'activité débute face aux sommets enneigés. Posture proposée: celle de la montagne, comme de raison. Les pieds ancrés, la colonne bien droite, on respire, bras au ciel, puis on repart...

Pendant deux heures, la randonnée suivra le sentier de la Lucarne (avec sa vue imprenable sur le mont Albert), puis celui de la chute Sainte-Anne, toute givrée. À chaque arrêt, les postures yogiques s'harmonisent avec le décor: posture de l'arbre sous un merisier noueux, salutation au soleil sur un belvédère en pleine lumière, méditation au son de la rivière...

À chaque arrêt, Julie Ruest ajoute quelques explications sur la faune ou la flore, initie les néophytes aux bienfaits du yoga... Une fois de retour au Gîte, les participants auront effectué 45 bonnes minutes de yoga, gravi quelques montées et marché quelques kilomètres. Et même si les yogis aguerris y trouveront peu de défi, l'activité est parfaite pour étirer les muscles courbaturés par trop de chutes en ski...

Les frais de ce voyage ont été payés par la SEPAQ.



Photo: fournie par ski Chic-Chocs

Pour les habitués des stations de ski, la glisse avec de la poudreuse jusqu'aux chevilles est une bénédiction rare. Dans le massif des Chics-Chocs, c'est le lot quotidien.

S'y rendre

Le nouveau service de navette en autocar de la SEPAQ relie Montréal et Québec à l'Auberge des Chic-Chocs et au Gîte du Mont-Albert. Départs les vendredis matins (à 6h du square Dorchester et à 9h de l'Aquarium de Québec). Retour le lundi en soirée (arrivée à Montréal vers 0h30). Départs les 18 et 25 février ainsi que le 4 mars. À partir de 140$ par personne.

Se loger

Le Gîte du Mont-Albert offre 48 chambres et plus de 20 chalets avec équipement complet. Le Gîte est reconnu pour la qualité de son menu gastronomique, qui met de l'avant plusieurs produits régionaux. Infos: www.sepaq.com/pq/gma

Activités

Le parc national de la Gaspésie offre 22 km de sentiers de ski de fond tracés. Le secteur du Gîte dispose aussi de 13 sentiers de raquettes, dont la distance varie entre 1,7 et 18 km. La location d'équipement est offerte.

Catski

Le tarif pour une journée de ski avec remontée en Catski est de 349$ par personne pour une journée, dîner inclus. Location de ski: 45$ par jour. Infos: www.skichicchocs.com

Yoga-raquettes

Le studio Ékilibre offre la sortie en yoga-raquettes, en plus de plusieurs services de massothérapie. Le prix pour la randonnée guidée est de 24$ par personne (lorsqu'elle est inscrite à l'horaire); elle peut aussi être faite sur demande (coût: 100$ pour un groupe variant entre une et huit personnes.) Réservations auprès du Gîte.

Photo: Roger Laroche, collaboration spéciale

Du yoga en raquettes? Oui, c'est possible!