Sous l'oeil goguenard des viticulteurs, des touristes découvrent le maniement des sécateurs et quelques secrets du champagne pendant une «journée vendange» payante à Oger (nord-est de la France).

Wayne Lui, un Canadien de 47 ans vivant en Angleterre a voulu tester la formule à la lecture d'un article du «Sunday Times». Accompagné de son épouse et d'un couple d'amis, il progresse rapidement, dos courbé, dans la rangée de vigne qui lui a été attribuée, nettoyant consciencieusement les grappes quelque peu noircies par le champignon botrytis.

«Je ne connaissais le champagne que pour l'apéritif, maintenant je sais qu'on peut le boire aussi durant un repas», s'enthousiasme-t-il.

Même ferveur pour Katti Vanwelde, une Belge flamande de Louvain qui «apprécie encore plus le champagne» maintenant qu'elle sait l'effort pour le récolter.

Précurseur du tourisme viticole en Champagne, la maison Milan exploite depuis cinq générations, six hectares de cépage Chardonnay au coeur de la prestigieuse «Côte des blancs» au sud d'Epernay. Depuis 1995, l'entreprise familiale conforte son chiffre d'affaires en dédiant une partie de son activité à l'accueil personnalisé de ses clients.

«Il s'agit de faire venir les gens et de nouer des rapports personnels plutôt que d'expédier anonymement du champagne», précise Caroline Milan, l'ainée des enfants de la maison, qui après des études de marketing a développé l'activité.

«Les clients pour ces journées découvertes sont surtout Anglais et Belges, et cela se ressent sur nos exportations», explique la jeune femme qui avoue avoir traversé la crise sans problème, alors que les confrères champenois accusent une perte moyenne de 4,5% au premier semestre 2010.

Pour 55 dollars CAN la journée, les apprentis vendangeurs sont acueillis dans une ambiance familiale, encadrés par une hôtesse qui distille les informations sur la fabrication du «roi des vins».

Copieux petit déjeuner, visite du village classé «Grand Cru», dominé à perte de vue par les rangées de Chardonnay qui ont donné leur fraîcheur aux plus grands millésimes, observation des différentes méthodes de pressage, jeu de piste, tout est fait pour divertir le client jusqu'au déjeuner.

Celui-ci, concocté par Liliane Milan, mère de Caroline, est l'occasion de déguster les champagnes de la maison, à raison d'un cru par plat avant la distribution des paniers et sécateurs pour une heure et demie de cueillette.

Pour le goûter, les tartes de la grand-mère seront accompagnées du champagne rosé maison, avant la distribution des «diplômes de vendangeurs» et des bons de commandes.

Au Comité interprofessionnel des vins de champagne (CIVC), on se réjouit de la multiplication des propositions de gites, tables d'hôtes et autres promenades en 4X4 qui fleurissent dans le vignoble.

D'autant que «la candidature des paysages de Champagne au patrimoine mondial de l'Unesco a considérablement augmenté la demande touristique», explique Daniel Lorson porte parole du CIVC. «Les viticulteurs s'aperçoivent qu'investir dans l'accueil pour fidéliser une clientèle est plus efficace que (..) les salons viticoles», remarque-t-il.