À une vingtaine de kilomètres de Milan --la ville la plus «fast» d'Italie, capitale de la finance, du luxe et du design--, Abbiategrasso est fière d'être une ville «slow» où l'on prend le temps de vivre.

Sur les panneaux, un escargot portant une ville sur sa coquille affiche la couleur. C'est le symbole de «Cittaslow», émanation du mouvement écolo-gastronomique Slow Food.

«Cittaslow veut ramener l'homme à un mode de vie plus tranquille, plus humain. Il ne s'agit pas de revenir en arrière dans le progrès mais d'accepter de sacrifier notre confort pour disposer de biens supérieurs: prendre ce que l'environnement nous donne, se créer des moments de silence, développer notre humanité. C'est ça le grand défi», explique Roberto Albetti, le maire de centre-droit.

L'organisation a été créé en 1999 en Italie et Abbiategrasso en fait partie depuis 2000. Cittaslow compte aujourd'hui plus de 140 communes membres dans vingt pays (France, Allemagne, Corée du Sud, États-Unis....). Environ la moitié sont en Italie.

Son objectif est de «maintenir l'identité et l'esprit de la communauté face au monde moderne» mais sans pour autant tourner le dos à la mondialisation.

Un principe qui doit se traduire concrètement dans des politiques environnementales, sociales, urbanistiques et évidemment gastronomiques.

Les villes «slow», qui doivent compter moins de 50 000 habitants, ne doivent pas par exemple accueillir d'entreprises dangereuses ou de grandes zones commerciales.

À Abbiategrasso, vivre «slow» commence par les transports.

Le centre ville est fermé aux voitures le week-end et en partie la semaine et le nombre de vélos est impressionnant. Selon le dernier pointage effectué par la mairie sur une matinée, 9 000 vélos circulaient pour 32 000 habitants.

Un mode de vie qui emporte l'adhésion des habitants et convainc des Milanais de déménager. En dix ans, la ville est passée de 28 000 à 32 000 habitants.

«Ici c'est comme un paradis. C'est une ville très tranquille, belle. Je ne pourrais pas vivre à Milan, c'est trop bruyant, il y a trop de circulation», déclare Sebastiano Petinatto, retraité.

«Je préfère les villes plus petites, il y a plus de rapports humains. Je ne vivrai jamais à Milan ou à Rome où tu ne peux pas savoir si tu peux compter sur ton voisin», abonde Lara Manzoni, enseignante, qui note tout de même que pour les jeunes, la ville est peut-être «trop tranquille».

Vivre lentement «ne veut pas dire empêcher le développement économique», assure en outre le maire.

Alors que la crise a durement touché les industries de la ville, «être une ville slow peut nous aider à développer le tourisme», avance Valter Bertani, son adjoint en charge de «cittaslow».

Abbiategrasso promeut par ailleurs les spécialités gastronomiques locales en Italie ou à travers le monde, une action fondamentale pour Marco Gelmini, directeur de la production d'une entreprise familiale de fromage Gorgonzola.

«Pour nous, c'est très important car nous produisons un produit de niche qui a besoin d'être promu hors de l'Italie et de l'Union européenne, pour gagner des marchés mais en maintenant sa caractéristique artisanale», explique-t-il.

Pour le maire d'Abbiategrasso, vivre lentement ne peut faire que des émules en réaction à une société qui va de plus en plus vite: «je crois que ce message touchera même des villes plus grandes. Pourquoi ne pourrait-on pas récupérer ce concept de la réappropriation des villes par l'homme et non par les voitures et la frénésie à Milan, Paris ou Vienne ?»