Bien des connaissances ont froncé les sourcils quand nous leur avons annoncé mettre le cap sur La Tuque. « Il y a des choses à faire, là-bas ? », doutaient-elles. Eh bien oui, notamment une descente de rivière contemplative et hyper relaxante, grandement facilitée par la mise à l’eau, l’an passé, d’un projet-pilote mené par un couple montréalais qui a pris la clé des champs.

C’est une histoire de virages. D’abord, celui de Pascale Villeneuve et de Nicolas Faust, respectivement coiffeuse et caméraman, qui ont coupé court à leurs activités pour migrer plus au nord, dans les environs de La Tuque. Là, ils ont pris possession de la maison familiale bâtie par les parents de Pascale, entourée d’un vaste terrain bordé par la rivière Croche.

Se sentant en osmose avec leur nouvel environnement à la beauté sauvage, ils ont rapidement pris plaisir à le faire découvrir à des visiteurs, en les recevant dans leur chalet et leurs emplacements de camping. Surtout, le couple a noté qu’une demande revenait systématiquement, telles des vaguelettes sur un rivage. « Les occupants du chalet voulaient descendre la rivière. Ils disaient souvent ‟wow !”, mais nous n’avions pas d’activité à leur offrir et il n’y avait pas de navette pour remonter », racontent-ils. « Mon père disait qu’il verrait bien des kayaks sur ce cours d’eau », se souvient Pascale.

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Pascale Villeneuve et Nicolas Faust ont fondé Méandre pour offrir des activités et de l’hébergement dans ce secteur de la Mauricie.

Des signaux clignotaient, mais aussi des incertitudes. Suivant des formations d’entrepreneuriat et tirant profit de ses talents vidéophotographiques, le couple était fort tenté de pousser plus loin l’offre touristique locale en fondant un site de villégiature écotouristique. « On se trouvait un peu loin de Montréal et de Québec, on doutait un peu », confesse Nicolas. Finalement, faisant fi du labyrinthe que peut représenter un lancement d’entreprise, ils ont lancé l’an passé Méandre, sous forme de projet-pilote.

En plus des hébergements et des embarcations nautiques en location (kayaks, canots, planches à pagaie, tubes), un service de navettes pour déposer ou recueillir les participants au départ ou à l’issue de leur parcours est proposé.

Le terrain de jeu, lui, a fait son lit depuis belle lurette : la rivière Croche, un affluent du Saint-Maurice qui doit son nom à ses multiples lacets. « On a accès à 90 km de rivière, avec différents segments, que ce soit des eaux calmes, des rapides, des sections avec du portage… il y en a autant pour les familles que pour les aventuriers », indiquent les instigateurs de Méandre. Les trois quarts du parcours sont bordés de nature sauvage, et on y trouve, disséminées au gré des virages, diverses petites plages de sable fin. Maintenant que nous avons l’eau à la bouche, sautons dans une embarcation pour tâter le terrain.

  • La mise à l’eau se fait en douceur, d’une plage de sable fin.

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    La mise à l’eau se fait en douceur, d’une plage de sable fin.

  • Très vite, les teintes des arbres forment un tableau ravissant.

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    Très vite, les teintes des arbres forment un tableau ravissant.

  • Virages et plages forgent l’identité du cours d’eau.

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    Virages et plages forgent l’identité du cours d’eau.

  • Le courant est faible dans cette portion, idéale pour les débutants ou les flâneurs.

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    Le courant est faible dans cette portion, idéale pour les débutants ou les flâneurs.

  • On enchaîne les virages au sein d’une nature parfaitement sauvage, passant le long d’un territoire de chasse (elle n’ouvre qu’à l’automne, fiou !).

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    On enchaîne les virages au sein d’une nature parfaitement sauvage, passant le long d’un territoire de chasse (elle n’ouvre qu’à l’automne, fiou !).

  • En prenant son temps, la descente du Pourvoyeur se fait en deux à trois heures.

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    En prenant son temps, la descente du Pourvoyeur se fait en deux à trois heures.

  • Les habitations au bord de l’eau sont rarissimes. On peut aussi descendre vers le village.

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    Les habitations au bord de l’eau sont rarissimes. On peut aussi descendre vers le village.

  • L’eau peu profonde est encore un peu froide lors de notre passage au printemps, mais se réchauffera au fil de l’été.

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    L’eau peu profonde est encore un peu froide lors de notre passage au printemps, mais se réchauffera au fil de l’été.

  • On se sent loin, très loin des autoroutes urbaines…

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    On se sent loin, très loin des autoroutes urbaines…

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Branches et embranchements

Quatre formules s’offrent au navigateur d’eau douce : la Tripante, en descente sur tube (3 km), le Pourvoyeur (8 km), le Village (16 km) et divers parcours de canot-camping (de 30 à 90 km). Nous avons jeté notre dévolu sur la deuxième option, en planche à pagaie. Convoyés en fourgonnette avec l’attirail nécessaire, nous voici largués sur les rives de la Croche, les pieds dans le sable, prêts à se lancer dans le courant. Ce dernier s’avère très docile, il est même possible de remonter le cours d’eau à contre-courant sans trop forcer. Aussi, la faible profondeur et la rareté des roches dans le lit de la rivière procurent un sentiment de sécurité idéal pour les enfants, les débutants et les flâneurs.

En quelques coups de rame, on plonge dans un décor qui n’incite pas, mais impose un décrochage total, surtout pour le citadin ayant absorbé sa surdose annuelle de rénos-autos-sonos. Notre périple se déroulant à la fin du printemps, la végétation a beau être encore en régénération, les lignes d’arbres mêlant feuillus et conifères offrent une magnifique palette de teintes de vert, des nuances les plus sombres aux éclats les plus vifs. On imagine très bien ce poumon forestier enveloppant se gonfler à son paroxysme en été, puis embrayer sur un spectacle éclatant en automne.

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De nombreuses petites plages intimes parsèment le parcours.

On nous avait promis des virages et des plages, et on ne nous a pas menti. Au gré des zigzags qui se négocient à très basse vitesse se découvrent des bancs sablonneux, exigus comme étendus, où il fait bon s’offrir de courtes pauses et des bains de soleil. Et l’eau, peut-on y piquer une tête ? Fin mai, c’était encore très frisquet, mais Pascale nous a assuré qu’elle se réchauffe au fil de l’été pour atteindre des températures très agréables. D’ailleurs, pas de stress : on est là pour prendre son temps et se faire bronzer sur une serviette, puisque le service de navette prévoit les haltes-détente dans sa planification.

En poursuivant le chemin sinueux, des monts boisés se succèdent au détour des lacets, ainsi que des scènes naturelles aux penchants dramatiques, comme des sortes de glissements de terrain sablonneux ayant entraîné troncs et branches d’arbres dans leur affaissement. Les cours d’eau sont innombrables au Québec, mais force est d’avouer que la Croche recèle un charme tout particulier, qui vous projette (littéralement) aux antipodes des artères urbaines surchargées. Sur la planche à pagaie, on se surprend à s’allonger et à se laisser doucement dériver…

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Des sortes de glissement de terrain sablonneux bordent le trajet.

Dans les méandres du sommeil

Méandre, qui a connu des débuts très encourageants l’an passé, a déjà mis en œuvre divers projets, notamment en matière d’hébergement. « On ne veut pas un Tremblant avec plein d’activités, garder ce côté où l’on n’est pas entouré de plein de monde », précise le couple d’entrepreneurs, qui met la gomme sur le développement du camping rustique avec un bloc sanitaire et des options de glamping avec cuisinette extérieure. Des microcabines sont aussi en cours de construction, de même qu’une paire de cocodômes écolos de conception gaspésienne. Outre les descentes de rivière, un sentier cycliste de gravier a été aménagé (il faut amener, pour l’instant, son propre destrier à pédales) et des classes de yoga seront à l’agenda.

Tant mieux, car cibler un aller-retour depuis une métropole dans la journée serait plutôt intense – il faut compter de 3 h 30 min à 4 h de route de Montréal. Cela dit, le lieu s’avère sans conteste un arrêt idéal pour les vacanciers en route vers (ou depuis) le Lac-Saint-Jean… quitte à faire un crochet par la Croche !

Consultez le site de Méandre