A Toliara, grande ville du sud-ouest de Madagascar, comme dans le reste de la Grande Ile, les professionnels du tourisme dépriment, touchés de plein fouet par la crise politique opposant le président malgache au maire destitué de la capitale.

Les hôtels du centre et de la périphérie de cette ville alanguie sont désespérément vides.Toliara est pourtant une étape traditionnelle des groupes de touristes qui y séjournent une à deux nuits avant de rejoindre les plages paradisiaques des environs, au terme d'un périple à travers les paysages grandioses des hauts plateaux malgaches et dans les parcs nationaux.

«2008 a été une très bonne année. La saison 2009 partait bien. Manque de bol, la crise est arrivée. C'est comme si on avait coupé l'électricité: tout s'est arrêté», explique Maueze Popat, propriétaire de l'hôtel Victory, 43 chambres et une piscine.

«Nous avons un groupe de touristes dans l'hôtel. Ils étaient sur la côte. Quand ils ont entendu ce qui se passait, ils sont immédiatement venus ici pour partir sur Antananarivo. Après eux, ce sera le calme plat», ajoute-t-il.

En tout, une centaine de personnes ont été tuées à Madagascar dans les violences qui ont émaillé depuis le 26 janvier le bras de fer entre Andry Rajoelina, qui a pris la tête d'une «haute autorité» de transition censée remplacer le pouvoir en place, et le président Marc Ravalomanana.

«Normalement, en saison basse comme maintenant, on fait 20 chambres sur 50. En ce moment, je n'ai que quatre chambres prises. Et encore, ce sont des Chinois qui travaillent sur un projet», témoigne Rose, la directrice commerciale de l'hôtel Le Palétuvier, situé sur l'esplanade du bord de mer.

«J'ai mis au chômage 50% du personnel depuis 15 jours et les autres ne travaillent qu'à la demi-journée», précise-t-elle.

«Sur l'ensemble du pays, 70% à 80% des hôteliers ferment momentanément, faute de clients et pour diminuer le coût des charges fixes», confirme Eric Koller, président de la Fédération des hôteliers et restaurateurs de Madagascar. A Antananarivo, les taux d'occupation sont en chute libre de 60% et les restaurateurs paient au prix fort le couvre-feu nocturne.

Quelque 378 000 touristes, en majorité des Français, ont visité Madagascar en 2008, générant l'équivalent de 393 millions de dollars de recettes en devises étrangères, une manne pour ce pays pauvre de l'océan Indien.

En 2007, le tourisme, qui représente 25 000 emplois directs et beaucoup plus d'emplois indirects (artisanat, transporteurs, etc), se hissait en troisième position des secteurs pourvoyeurs de devises étrangères, après les mines et l'aquaculture (industrie de la crevette notamment).

La crise devrait plomber dangereusement la saison 2009 et laisse déjà planer des incertitudes sur 2010.

«Il y a environ 60% de séjours en stand-by d'ici à octobre. Ils sont réservés mais ils ne sont pas confirmés. La crainte, c'est que cela se transforme en annulations pures et simples, au profit de destinations comme l'Australie ou le Costa Rica», explique à l'AFP Vola Raveloson, directrice exécutive de l'Office national du tourisme.

«Notre autre souci, c'est la saison 2010. Les tours opérators sont en train de confectionner leurs catalogues. Les plus importants vont sûrement diminuer leur offre sur Madagascar. Pour les autres, qui ont des petites brochures, ils ne vont pas mettre Madagascar dedans», s'inquiète-t-elle.