Saint-Martin est la plus petite terre au monde qui soit partagée par deux États. Et ce, depuis plus de 350 ans. Une histoire bien particulière.

Lorsque Christophe Colomb a débarqué sur Saint-Martin le 11 novembre 1493, personne dans les jours suivants ne s'imaginait que cette petite île allait tomber dans l'oubli pendant presque deux siècles. Jusqu'à ce qu'en 1631, les Néerlandais s'y intéressent. Boutés hors de l'île par les Espagnols, ils y reviennent en 1648 et tombent nez à nez avec des Français. De cette rencontre fortuite, est signé le traité de Concordia, stipulant le partage de l'île et établissant la frontière: aux Français le Nord, aux Néerlandais le Sud. Aucune goutte de sang n'aura été versée.

Le Nord est maintenant une collectivité d'outre-mer française. Le Sud appartient encore à l'une des cinq régions des Antilles néerlandaises, sous le nom de Sint-Maarten.

Saint-Martin est une terre de mélanges. Français, Néerlandais, Espagnols, Créoles, Latinos, tout ce beau monde fait aujourd'hui la richesse de cette île. Culturellement et socialement, il s'entend. La nature, quant à elle, a un peu plus gâté sa partie nord. Qu'est-ce qu'il faut retenir alors de ce Saint-Martin français? Ses paysages côtiers, sa forêt luxuriante, ses lolos, ses îlots et plus encore...

Si Saint-Martin se vante d'être le centre gastronomique des Antilles, le petit village de Grand Case, côté français, peut se targuer d'être à lui seul le porte-étendard de la cuisine de l'île. On ne s'y arrête pas sans y manger un morceau de poulet ou une côte de porc grillée, en bordure de la mer. Et on est ici très loin du cliché. Manger dans un des lolos de Grand Case, c'est manger hors des sentiers battus.

Rue Bertin-Maurice, une demi-douzaine de lolos proposent cette cuisine locale saint-martinoise. Sous des effluves de poissons grillés et dans une ambiance ti-punch, barbecue et musique créole, touristes, pêcheurs et villageois se rassemblent à toute heure du jour et de la soirée autour d'une des bonnes tables. Ici, le temps s'est presque arrêté. Les propriétaires de Chez Cheryl et Naldo ont les pieds dans les eaux de la magnifique baie de Grand Case depuis 1980. Les gens que l'on y croise sembleraient presque s'être échoués sur ce lieu de farniente pour finalement ne plus jamais en repartir.

Plus loin dans la rue, les anciennes cases et les dernières maisons à galettes proposent un menu plus varié. Habitat authentique, ambiance détendue et cuisine locale, le tout sur fond de mer, font de Grand Case et de ses restaurants un lieu unique.

Passer par Grand Case suppose que l'on poursuive sa route sur la côte nord. Que l'on fasse un crochet par l'anse à Marcel. Que l'on apprécie l'ambiance plage et cocotier de Baie orientale ou encore le kite-surfing du côté de l'étang aux Poissons.

Au nord, ancré à quelques encablures de la côte, l'îlet Pinel est un havre de paix paradisiaque. On s'y rend par le premier bateau du jour, on ne peut théoriquement y passer la nuit. C'est l'un des meilleurs endroits pour échapper à la relative frénésie de Saint-Martin.

À la descente du bateau, un rapide tour de l'île à pied nous permet de découvrir les deux autres plages, sauvages et caillouteuses. Dans un rayon de 10 minutes, on a vite fait le tour de Pinel, mais on a le sentiment d'être sur une île déserte.

Un îlot qui est aussi un des meilleurs sites de plongée en eau peu profonde. À la pointe sud, près de l'ancienne jetée, on se jette à l'eau. Masque sur le nez, tuba à la bouche et palmes aux pieds, on entame notre descente au... paradis. Dans une eau claire, parmi les récifs coralliens et ces poissons multicolores. Un spectacle pour les yeux. Un sentiment de plénitude dont on ne se lasse pas.

Changement d'environnement

Nichée au coeur de la forêt dense et luxuriante de l'île, Lottery Farm, une ancienne sucrerie du XVIIIe siècle, est un petit bijou tropical où espèces végétales et animales sont répertoriées et protégées. Pour mieux en apprécier la valeur, son parcours d'hébertisme est tout indiqué - et c'est un euphémisme - pour les petits comme pour les grands. Car à chaque niveau correspond son degré de difficultés et d'adrénaline.

La «fly zone extreme» a, de loin, notre préférence en matière de sensations fortes. Sa dizaine de tyroliennes fait l'unanimité chez les amateurs du genre et au sein de notre groupe en cette matinée. Des flancs du pic Paradis, on descend d'arbre en arbre en direction de la sucrerie. Vitesse assurée et vue plongeante sur la baie de la Potence. On plane littéralement au-dessus de la forêt.

C'est au coeur de cette forêt et au départ même de Lottery Farm que l'on accède au pic Paradis, point culminant de l'île. En grimpant, la vue sur Grand Case et La Savane se dégage à Chewbaca. Au sortir du sentier, il faut emprunter un peu plus loin les quelques marches puis le sentier qui conduit réellement au plus haut point de vue de l'île, à 424 mètres. De là-haut, la côte Est et Saint-Barthélemy apparaissent.

Arpenter Saint-Martin de ce côté-ci, c'est inévitablement flâner à Marigot, la charmante capitale de cette partie française. Qu'a-t-elle à offrir? Peu et beaucoup à la fois. Au-dessus d'elle, se dresse ce qu'il reste du Fort Louis. En bordure du front de mer, son marché et surtout ses restaurants ne laissent personne indifférent. Au point qu'il y est difficile de faire un mauvais choix.

Pour ceci comme pour tout le reste, une seule notion est à proscrire à Saint-Martin: le temps.

Entre plage et nature

Saint-Martin, c'est aussi Sint-Maarten. La partie néerlandaise de l'île vit et vibre au rythme des bars, restaurants et commerces. C'est le coeur économique de ce caillou de 110 km2. C'est aussi la plage - beaucoup - et la nature - un peu.«Regardez! La frontière est ici, au milieu de la mangrove. Matérialisée par ce qui reste de cet alignement de pierres. On dit que lors de certains soirs trop arrosés, les soldats français ou néerlandais déplaçaient des pierres. Et donc la frontière.»

Frédéric est aujourd'hui notre guide sur l'eau. Sans nous en rendre compte, nous venons de franchir en kayak cette frontière qui sépare depuis 1648 le côté français du côté néerlandais de l'île de Saint-Martin.

Sur le vaste lagon de Simpson Bay, à coups de pagaie, on apprend l'histoire et on fait un peu de géographie. Ce matin, le «cours» porte sur les mangroves, ce fragile écosystème tropical dont les arbres ont les «pieds» dans les eaux salées. Grâce à ses racines, la mangrove stabilise et protège la côte. Elle est un lieu de reproduction et une source d'alimentation importante pour les animaux. On apprend ainsi que la moitié des espèces d'oiseaux de Saint-Martin vivent grâce aux mangroves. À la fin de cette matinée, notre assiduité est récompensée par une petite baignade sur la vaste plage de Simpson Bay.

Dans cette partie ouest de l'île, les plages se succèdent. Au bout de la piste de l'aéroport, Maho n'est pas réputé pour son sable mais plutôt pour l'impressionnant spectacle qu'offrent les avions au décollage et à l'atterrissage. Les touristes s'y font refaire la mise en pli sous la force des réacteurs, suffisamment puissants à cet endroit pour tout balayer et même repousser au large les vagues. Décoiffant!

Sur la côte est, de Guana Bay Point à Geneve Bay, la randonnée peut être parfois décoiffante aussi. Lorsque le vent se lève au-dessus de la côte un peu escarpée. La marche prend rapidement des allures de balade champêtre, tantôt dans un paysage verdoyant de douces collines, tantôt dans un milieu aride et venteux. La mer est omniprésente. Sur la grève de Geneve Bay, on fait une pause sous l'abri de fortune auquel chaque marcheur de passage apporte sa pierre à l'édifice dans un geste rituel. Au retour, on sort du sentier battu, pour monter à flanc de colline en direction de la crête. Un peu d'escarpement et d'effort pour finalement être accueilli en haut par des chèvres.

Mais les chèvres ne sont pas vraiment représentatives de Sint-Marteen. Le côté néerlandais est dynamisé par sa capitale, centre commercial et économique, qu'est Philipsburg. Fondée en 1720, sa «vieille ville» est coincée entre les eaux de l'océan et celles de cette surface lacustre qu'est Salt Pond. Boutiques, bars et restos se succèdent sur la promenade qui fait face au sable fin et aux eaux turquoise de Great Bay. Un lieu très touristique, très fréquenté. Il faut se faufiler dans les arrière rues pour apprécier cette partie de la ville et découvrir par exemple son église méthodiste séculaire et son ancien palais de justice.

D'une manière ou d'une autre, à Sint-Marteen, on en revient toujours à Philipsburg.

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Les frais de ce voyage ont été payés par Vacances Transat.