Deux conseillers municipaux, une ex-députée et plusieurs anciens militants viennent de porter plainte au Directeur général des élections du Québec (DGEQ) contre le parti du maire de Saint-Constant, Gilles Pepin, qu'ils accusent d'avoir inventé de fausses activités de financement camouflant des entrées d'argent occultes.

Au DGEQ, le porte-parole Denis Dion confirme que l'organisme mène des vérifications sur l'Équipe Gilles Pepin, lesquelles pourraient mener à une enquête en profondeur et à des constats d'infraction, si la preuve le justifie. «On va d'abord évaluer la plainte», dit-il.

Les documents de plainte obtenus par La Presse portent la signature d'une quinzaine de personnes qui dénoncent le parti du maire Pepin.

Par exemple, le parti a déclaré avoir vendu 216 billets pour un cocktail, en mars 2008, qui lui auraient permis d'amasser 5400$ pour sa caisse électorale.

«Nous soussignés affirmons que cette activité n'a jamais eu lieu», déclarent plusieurs signataires, dont les conseillers municipaux André Sauvé et Mario Arsenault, qui étaient dans l'équipe du maire à l'époque, mais siègent maintenant comme indépendants.

Denise Poirier-Rivard, ancienne députée bloquiste et ex-conseillère de l'Équipe Pepin, signe la même déclaration, tout comme l'ancien organisateur électoral Pierre Arcouette.

«D'où vient l'argent?»

«Quand j'ai découvert ça, je n'en revenais pas. D'où vient cet argent?», demande M. Arcouette.

Scénario semblable pour une soirée électorale en avril 2008, pour laquelle la vente de billets a rapporté 6000$, selon le parti, et une «soirée des bénévoles» au cours de laquelle 5000$ ont été récoltés. Plusieurs signataires prétendent qu'aucun prix d'entrée n'a été exigé pour ces événements.

Les conseillers Sauvé et Arsenault remettent aussi en doute le rapport financier 2009 du parti, selon lequel 579 cartes de membre à 20$ auraient été vendues.

Or, les conseillers Sauvé et Arsenault, qui étaient membres de l'Équipe Gilles Pepin jusqu'à récemment, affirment qu'à leur connaissance, le parti ne remet pas de cartes de membre.

«Ça m'insulte beaucoup. En tant qu'élu et que membre, je pense bien que s'il y avait des cartes de membre, j'en aurais une!», lance André Sauvé.

Gilles Pepin était furieux lorsque La Presse l'a joint. «Ce qu'ils veulent, c'est déstabiliser l'organisation, dit-il au sujet des plaignants. Nous, ce qu'on veut, c'est être tranquilles et faire notre travail.»

Les plaignants colportent de fausses accusations, insiste-t-il. «Sont-ils sûrs qu'ils étaient au courant de tout?», demande-t-il. Il refuse de fournir des preuves pour contredire ses détracteurs, mais songe à les poursuivre en diffamation.

Habitué aux controverses

À l'époque des faits reprochés, l'Équipe Gilles Pepin comptait sur l'aide d'organisateurs expérimentés issus du Parti libéral, dont Jacques Roy et Daniel Rochette, deux vétérans de l'entourage du ministre Jean-Marc Fournier. M. Roy a refusé de nous parler, alors que M. Rochette a dit n'avoir rien constaté d'irrégulier lorsqu'il était présent.

«Ça me surprend, parce que je me souviens que les candidats avaient exigé que tout soit tissé très serré pour les dépenses. J'avais donné un coup de main pour faire sortir le vote, mais ça, ce sont des événements locaux auxquels je n'ai pas assisté et dont je ne suis pas au courant», a-t-il expliqué hier.

Le maire Pepin est habitué aux controverses électorales. En 2007, la Cour supérieure a annulé son élection et celle de ses conseillers parce que son parti avait dépassé de 40% le maximum de dépenses autorisé. Gilles Pepin avait réussi à se faire réélire lors d'une élection partielle en 2008 et aux élections générales qui ont suivi, en 2009.

Depuis, le DGEQ lui a remis deux constats d'infraction, pour avoir aidé un citoyen à faire un don au parti «autrement que sur ses propres biens» et pour avoir collecté de l'argent lui-même, une tâche réservée à l'agent officiel.

Son fils Danny Pepin, agent officiel du parti, a reçu deux constats d'infraction, pour avoir remis des rapports de dépenses électorales faux ou incomplets. Le père et le fils contestent les quatre constats d'infraction.