Un des plus importants exportateurs de légumes surgelés de Chine a ouvert les portes de son usine de 10 500 m2 à La Presse. Mangera-t-on bientôt uniquement des aliments chinois? Non. Avec 1,3 milliard de bouches à nourrir, la Chine devient de plus en plus un marché... d'importation.

C'est en arrivant à Hangzhou qu'on réalise à quel point nos légumes surgelés viennent parfois de loin. Ville au climat subtropical, embrouillée par le smog lors du passage de La Presse, Hangzhou est situé à 200 km à l'ouest de Shanghai. Qui est lui-même à plus de 10 000 km de Montréal. Un long voyage, que les végétaux font par camion, par train ou par bateau, dans des conteneurs gardés bien en-dessous de zéro.

Zhejiang Zhongda Newland, un des plus importants exportateurs de légumes surgelés de Chine, vient d'y inaugurer une grande usine moderne, capable de traiter 100 000 tonnes de fruits et légumes surgelés par an. Fait rare en Chine, l'entreprise a accepté de nous ouvrir ses portes.

«Nous surgelons des mangues, des ananas, des fraises, des bleuets, des framboises, du chou-fleur, du brocoli, du soya, des pois sucrés, etc.», énumère Xu Huihui, jeune directrice des ventes de Newland, en faisant le tour de l'usine de 10 500 m2. «Tout est surgelé au maximum 24 heures après la récolte.»

Environ 40% de la production actuelle de Newland est envoyée en Amérique du Nord, notamment au Québec. Le reste est expédié en Europe, au Japon, au Moyen-Orient et en Afrique. «Les plus populaires chez vous sont les choux-fleurs», indique Mme Huihui, dans un excellent anglais.

Ce qui est cueilli à la main vient d'ailleurs

Pourquoi aller chercher nos légumes si loin? «La règle informelle, c'est que les légumes dont la culture demande beaucoup de main-d'oeuvre tendent à venir de Chine», explique Jonathan Morgan, président de Newland North America. De ses bureaux de Vaudreuil-Dorion, au Québec, M. Morgan fournit des surgelés à l'Amérique entière.

Au contraire, «les légumes dont la culture est automatisée, comme les petits pois et le maïs, sont toujours majoritairement surgelés par des sociétés locales, en Amérique du Nord», précise M. Morgan.

L'avantage de la Chine est facile à comprendre: à Hangzhou, les employés de l'usine - logés dans des dortoirs - sont payés de 320$ à 480$ par mois, pour six jours de travail par semaine. Même si les salaires ont bondi de 20% en moyenne dans bien des provinces chinoises en 2011, ils restent minimes comparativement à ici.

Fermiers au pic et à la pelle

À Hangzhou, Newland possède une «ferme de démonstration» de 300 acres. C'est avec des pelles et des brouettes, un chapeau de paille sur la tête, que les fermiers y cultivent la terre, juste à côté de la nouvelle usine, dont les chaînes de production dernier cri ont été importées de l'Europe et de l'Amérique. Le contraste est saisissant. Quant aux légumes qui y sont cultivés - tomates cerises, concombres, choux, etc. -, ils sont délicieux.

Au total, 23 000 agriculteurs, établis dans 14 provinces chinoises, produisent les fruits et légumes de Newland. «L'entreprise contrôle l'usage de pesticides et prend beaucoup de précautions», assure M. Morgan. «Je suis sûr à 100% que nos produits satisfont toutes les normes des Canadiens», corrobore Luo Jun, directeur de l'entretien du matériel de Newland.

La société est certifiée HACCP et ISO 9001. «Ces normes indiquent que la société est conforme à certaines pratiques managériales pour gérer les risques, confirme Sylvain Charlebois, doyen par intérim du collège de management et d'économie de l'Université de Guelph. Mais elles n'empêchent pas les rappels alimentaires ou d'autres problèmes.»

Loin de nier la multiplication des scandales alimentaires en Chine, Newland dit en... tirer profit. «Les clients réalisent qu'ils doivent acheter des aliments provenant d'usines bien contrôlées, comme la nôtre, fait valoir M. Morgan. Les acteurs les plus faibles de notre industrie ont disparu.»