Pierre-Hugues Boisvenu a reconnu avoir erré, mercredi, lorsqu'il a dit que chaque assassin devrait avoir «droit à sa corde dans sa cellule».

«Des tueurs en série, des gens qui n'ont aucune possibilité de réhabilitation... Moi, je dis toujours: dans le fond, il faudrait que chaque assassin ait droit à sa corde dans sa cellule. Il décidera de sa vie», avait déclaré M. Boisvenu en matinée, au cours d'une discussion avec des journalistes dans un couloir du parlement.

Ses propos ont soulevé un tollé jusqu'à Québec, où le gouvernement et l'opposition ont mis en doute sa légitimité en tant que porte-parole du gouvernement Harper sur les questions de justice criminelle. Pendant ce temps, à Ottawa, des collègues du propre parti du sénateur ont condamné ses paroles. Au Royaume-Uni, même la BBC a repris la nouvelle en une de son site web.

Le fondateur et ancien président de l'Association des familles de victimes assassinées ou disparues a dû revenir sur ses propos quelques minutes plus tard. Il a insisté sur le fait qu'il évoquait des cas comme ceux des meurtriers en série Clifford Olson ou Robert Pickton.

«Je parlais de cas tout à fait exceptionnels, a-t-il affirmé en entrevue au 98,5 FM, mercredi midi. Là, c'est comme si j'avais ouvert un débat sur la peine de mort, alors que je suis tout à fait opposé à la peine de mort...»

«Je l'avoue, c'était un commentaire totalement inapproprié», a-t-il conclu.

Inacceptable et illégal

Il a rappelé que, aux dernières élections, le premier ministre Stephen Harper avait promis qu'il ne rouvrirait pas les débats sur des dossiers explosifs comme la peine de mort ou le droit à l'avortement. Réitérant cet engagement au cours d'une entrevue à CBC il y a quelques mois, M. Harper s'est par contre dit personnellement en faveur de la peine de mort, dans certaines circonstances.

À la période de questions, M. Harper s'est porté à la défense de son sénateur. «Ce gouvernement existe pour aider les victimes, a-t-il déclaré. La famille de M. Boisvenu a été victime d'un crime terrible. Ce gouvernement veut agir pour défendre de tels incidents à l'avenir.»

Pierre-Hugues Boisvenu a perdu deux filles en moins de quatre ans, dans les années 2000: l'une a été sauvagement assassinée et l'autre est morte dans un accident de la route.

Mais ses commentaires ont été vivement dénoncés tant à Ottawa qu'à Québec et à Montréal, où l'Association québécoise de prévention du suicide les a qualifiés d'inacceptables, surtout «à la veille de la 22e Semaine de prévention du suicide».

À Québec, la porte-parole du Parti québécois en matière de justice, Véronique Hivon, a soutenu que le sénateur n'avait plus «la crédibilité ou la légitimité» pour demeurer porte-parole du gouvernement Harper en cette matière au Québec. Le ministre québécois de la Justice, Jean-Marc Fournier, a fait écho à cette position, tout comme les partis de l'opposition à Ottawa.

Même des conservateurs ont manifesté leur malaise. «M. Boisvenu est un homme qui se donne entièrement pour changer les choses, mais c'est inacceptable de penser de cette façon», a lancé le sénateur Jacques Demers.

Les partis de l'opposition sont allés encore plus loin: «Il est contre la loi de conseiller ou d'encourager une personne à se donner la mort, a souligné la chef intérimaire du NPD, Nycole Turmel. C'est exactement ce que le sénateur conservateur Boisvenu vient de faire en disant qu'une corde devrait être disponible dans chaque cellule.»

Son homologue du Parti libéral, Bob Rae, a lui aussi évoqué le caractère illégal de ces propos: «C'est une suggestion qui va complètement à l'encontre de toutes les lois au Canada. Les gens en prison doivent être protégés. Il suggère quelque chose qui est franchement criminel.»

Dans un communiqué de presse publié en milieu d'après-midi, le sénateur a réitéré son intention de «retirer publiquement cette déclaration» et s'est excusé auprès des personnes dont un proche s'est suicidé.