Une semaine avant le début des audiences du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) sur les nouveaux médias, sept associations d'artistes sonnent l'alerte: il faut que l'internet soit réglementé pour protéger la production de contenus canadiens et québécois, à l'image de ce qui se fait dans les médias traditionnels.

«On veut empêcher qu'il y ait un nivellement pas le bas», indique Robert Pilon, consultant pour l'Union des artistes (UDA).

En 1999, le CRTC a décrété l'Ordonnance d'exemption relative aux entreprises de radiodiffusion de nouveaux médias. Le contexte a changé depuis. Il est possible d'écouter LCN, RDI ou CKOI en ligne.

L'Union des artistes et d'autres associations de créateurs (voir la liste à la fin du texte) ont cru bon d'inviter les médias, mardi matin, pour faire valoir leur point. «On craint que la cause soit jugée d'avance», a souligné M. Pilon, qui est par ailleurs le cofondateur de la Coalition canadienne de la diversité culturelle.

Dans le mémoire conjoint qu'ils déposeront mercredi prochain, les associations concernées citent l'avis public du CRTC du 15 mai 2008 où le président Konrad von Finckenstein affirme: «Notre intention n'est pas de réglementer les nouveaux médias.» C'est ce que veulent les compagnies de radiodiffusion et de télécommunication. Mais pas l'UDA, qui demandait déjà une réglementation en 1999. «Il y a beaucoup de lobbying qui se fait auprès du CRTC avec des moyens énormes», souligne le président de l'UDA, Raymond Legault.

«Le CRTC change l'esprit de la loi par une série d'exemptions», dénonce-t-il.

À long terme, l'UDA craint, par exemple, que des stations de radio ou de télévision généralistes présentent un contenu différent en ligne, sans avoir à respecter les quotas et les critères exigées pour la radiodiffusion traditionnelle. «Le jour où ça va arriver, c'est évident que tout le monde va vouloir faire la même chose», dit Raymond Legault.

Pressions sur les chaînes spécialisées

Les canaux spécialisés ont fragmenté l'auditoire et mettent déjà de la pression sur les chaînes généralistes, qui ont des règles strictes en matière de contenu (contenu canadien, nouvelles, dramatiques, etc.). «Il n'y a plus de séries lourdes», rappelle M. Legault.

«Plus il y a de déclinaisons, plus il y a de pression sur le système, renchérit Yves Légaré, directeur général de la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma. On a une diversité de l'offre qui est assurée par la loi. Ça permet aux artistes francophones et québécois d'avoir une vitrine.»

Éventuellement, l'UDA pense même qu'une déréglementation des nouveaux médias pourrait mener à déréglementation des chaînes généralistes, qui n'auront plus les moyens de répondre aux exigences du CRTC. Surtout dans les autres provinces. «Du côté du Québec, toute la réglementation n'a jamais empêché les télés généralistes d'être rentables», rappelle Raymond Legault.

Même Quebecor, dont TVA doit largement sa rentabilité grâce aux productions québécoises, prône une déréglementation des nouveaux médias.

À l'image du Fonds canadien de télévision, les associations d'artisans propose également la création d'un Fonds des nouveaux médias, financé par des cotisations des fournisseurs internet.

Les audiences sur la radiodiffusion canadienne des nouveaux médias débutent mardi prochain à Ottawa.

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Les associations signataires du mémoire sont:

> Union des artistes (UDA)

> Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec (SPACQ)

> Société du droit et de reproduction des auteurs, compositeurs et éditeurs du Canada (SODRAC)

> Société des auteurs de radio, de télévision et cinéma (SARTEC)

> Guilde des musiciens et des musiciennes du Québec (GMMQ)

> Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (ARRQ)

> Alliance québécoise des techniciens de l'image et du son (AQTIS)