Tous les ingrédients étaient réunis pour que le Canadien transforme la Classique Héritage d'hier en formidable effet de levier en vue de la dernière ligne droite du calendrier.

Vendredi soir, le président de l'équipe, Geoff Molson, a invité les joueurs et leurs proches à un sympathique repas de groupe, une initiative appréciée.

Samedi, les joueurs se sont franchement amusés lors de l'entraînement au stade McMahon. Dans le vestiaire, les mines étaient réjouies. Personne ne se plaignait du froid ou de la qualité de la patinoire. À l'image de P.K. Subban, ils répétaient leur plaisir de participer à cette rencontre hors de l'ordinaire.

«La glace? Personne ne se fait de souci avec ça, expliquait P.K., de son enthousiasme habituel. Au bout du compte, c'est comme à l'habitude: il faut patiner, lancer et faire des passes. Non, c'est plutôt un privilège de disputer ce match.»

Ce n'est pas tout: le Canadien saluait le retour de Hal Gill et Michael Cammalleri, en plus de compter sur la présence inspirante de James Wisniewski, sévèrement blessé au visage, jeudi, à Edmonton.

Une victoire aurait permis au Canadien de briser une pathétique série d'insuccès dans l'ouest du pays: à peine quatre victoires en 29 matchs depuis la saison 2000-2001. Cela aurait valu son pesant d'or avant d'affronter les puissants Canucks, demain, à Vancouver.

Rien de tout cela ne s'est produit. Le Canadien s'est bêtement incliné 4-0 devant 41 000 intrépides spectateurs. «Les gens ont bravé le froid durant trois périodes, c'est assez remarquable», a déclaré avec admiration Alex Tanguay, des Flames.

Hélas pour le Canadien, le beau party du week-end s'est plutôt métamorphosé en Classique de l'occasion manquée!

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Des imperfections à la patinoire ont retardé le match à quelques reprises. La rondelle a pris des bonds bizarres et les joueurs ont parfois éprouvé des ennuis à la contrôler. Cela dit, malgré un froid glacial, les responsables ont offert une glace de qualité acceptable.

«La glace n'était pas dangereuse, a dit Gary Bettman, après le match. Et une glace, c'est une glace. Ce n'est pas un diamant poli. Vous savez, j'entends aussi des plaintes à propos de glaces qui sont recouvertes d'un toit!»

L'état de la patinoire représente un élément critique de la Classique Héritage. Heureusement, personne ne s'est blessé en raison d'une fissure oubliée. Sinon, parions que les directeurs généraux opposeraient leur veto à la reconduction de l'événement.

Ce serait dommage car la LNH a développé une initiative originale avec ces matchs à l'extérieur. En présentant une rencontre entre deux équipes canadiennes à Calgary cette année, elle a aussi corrigé une aberration.

Il était en effet inconcevable que seules des formations américaines puissent se mettre en évidence lors d'un événement au si vif retentissement. Compte tenu des impératifs de la télévision américaine, aucune équipe établie au nord du 49e parallèle ne sera invitée à la Classique hivernale du jour de l'An. On a plus de chance d'y croiser le Wild du Minnesota que le Canadien ou les Maple Leafs. Les cotes d'écoute auront toujours le meilleur sur la tradition.

La LNH a organisé un excellent spectacle à Calgary. Mais sans surprise, le français a été relégué aux oubliettes. Dans le stade McMahon, toutes les affiches de la Classique Héritage étaient en anglais, malgré l'existence d'une version française.

Sans la présence des journalistes québécois qui ont signalé ce manque de tact, l'affaire serait passée inaperçue. Embarrassé, John Collins, le chef de l'exploitation de la LNH, a expliqué qu'il ne s'agissait pas d'un match en territoire neutre, mais plutôt d'une rencontre locale des Flames, qui ont agi selon leurs pratiques habituelles.

L'argument n'est pas sans mérite, mais demeure un peu court. L'organisation de ce match était clairement l'affaire de la LNH, qui est débarquée en force à Calgary. Plus de 75 de ses employés étaient présents pour encadrer l'affaire. Et le Canadien de Montréal était un des participants. «Nous devrons repenser à tout cela en vue des événements futurs», a néanmoins reconnu Collins.

Au chapitre de la place du français dans la LNH, le retour des Nordiques constituerait une très bonne affaire! Je quitte cependant Calgary convaincu que Winnipeg devance largement Québec dans la course à une concession.

Pas seulement parce que Don Cherry a garanti aux partisans des Jets, hier, sur les ondes de CBC, que leur souhait le plus cher deviendrait réalité. (Cherry croit aussi au retour éventuel des Nordiques.) Mais surtout parce que beaucoup d'informations convergent vers cette conclusion, notamment celles de mon collègue Pierre LeBrun, d'ESPN, un solide journaliste toujours bien renseigné.

En bâtissant un amphithéâtre susceptible d'accueillir une équipe de la LNH, Winnipeg a pris une importante longueur d'avance sur la Vieille Capitale, une longueur qu'il n'échappera pas. Je sais aussi que la patience des Manitobains dans ce dossier impressionne la LNH. Si les Thrashers quittent Atlanta - le «si» est important -, ils devraient aboutir à Winnipeg, qui récolterait ainsi les fruits de plusieurs années d'efforts.

Gary Bettman n'apprécie pas ces conjectures. Lorsque je l'ai questionné à ce sujet la rencontre terminée, son irritation était manifeste. Le commissaire voulait d'abord parler du succès de la Clasique Héritage. «Je déteste ces spéculations parce qu'elles gonflent inutilement les attentes des gens», a-t-il répété.

N'en reste pas moins que ce dossier demeurera chaud au cours des prochains jours. Tout comme le rendement du Canadien qui, mine de rien, s'enlise de plus en plus.

Photo: Reuters

Il n'y aura pas de Classique Héritage en 2011-12.