Ce n'est pas une journée exceptionnelle pour le hockey lorsqu'une équipe comme les Bruins de Boston remporte la Coupe Stanley. Nous sommes ici à des années-lumière du jeu imaginatif des plus récents champions, comme les Blackhawks de Chicago, les Penguins de Pittsburgh ou les Red Wings de Detroit.

Hier encore, dans les rares occasions où ils ont attaqué en surnombre, on sentait les Bruins désemparés! Cette équipe est bâtie pour lancer la rondelle dans les coins et cogner l'adversaire. Et lorsque les choses tournent mal, elle se fie à Tim Thomas, le désormais légendaire gardien, pour limiter les dégâts. Simple, mais efficace.

Cette absence de fantaisie, les Bruins la compensent en pugnacité. Ils franchissent souvent les limites, mais ne s'en laissent pas imposer. Voilà un groupe solidaire, une véritable équipe. Sur ce plan, les Canucks de Vancouver n'ont pas fait le poids.

Je suis heureux de cette victoire des Bruins. Dans mon esprit, les Canucks ne méritaient pas de remporter la Coupe. Ils auraient constitué les champions les plus ordinaires des dernières années.

On ne peut pas, comme les Canucks, s'écrouler trois matchs de suite à l'étranger par un score combiné de 17-3 et prétendre aux plus grands honneurs. Leurs abyssales performances à Boston ont été gênantes.

J'espère simplement que les Canucks ne justifieront pas leurs mauvaises performances par des blessures. En finale, tous les joueurs sont amochés.

Prenons Patrice Bergeron, un héros du match d'hier. Victime d'une commotion cérébrale en deuxième ronde, son état n'est sans doute pas optimal. Ce qui ne l'a pas empêché de disputer une rencontre exceptionnelle.

C'est quoi, déjà, la vieille devise des Bruins? Ah oui, du cran et du coeur...Patrice Bergeron porte le bon uniforme.

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Depuis 10 ans, existe-t-il, dans tout le sport professionnel, un poste plus ingrat qu'entraîneur-chef des Bruins?

Imaginez: dans cette ville passionnée de sport, le pauvre homme est comparé à Bill Belichick, génie à la tête des Patriots de la Nouvelle-Angleterre. Et à Terry Francona, qui a mené les Red Sox à la conquête de la Série mondiale après des années de petite misère. Et à Doc Rivers, qui a redonné du lustre à la mythique concession des Celtics.

Surgit alors, aux portes de ce panthéon, un personnage à la bouille ronde, s'exprimant avec un accent francophone, qui s'appelle Claude Julien.

Claude Julien! Comme joueur, il n'a même pas été fichu de connaître une carrière potable dans la LNH; comme entraîneur, il a été congédié par le Canadien et les Devils du New Jersey, avant d'aboutir à Boston. Contre toute attente, voilà que cet homme, mal servi par son physique, conduit les Bruins à la Coupe Stanley!

Pour convaincre les sceptiques, rien ne vaut la réussite. Voilà pourquoi, comme l'a indiqué Mathias Brunet sur son blogue hier, un chroniqueur du Boston Globe, Dan Shaughnessy, s'est excusé de toutes les petites méchancetés prononcées à l'endroit de Julien depuis son arrivée à Boston.

On peut maintenant dire que Boston compte sur quatre excellents entraîneurs-chefs: Belichik, Francona, Rivers et Julien. Ils ont tous conduit leur équipe au championnat.

Oui, le nom de Julien mérite d'être mentionné aux côtés de ses renommés collègues de Boston. Lui-même ne doit pas en être surpris. Pour vaincre les obstacles, ce gars-là a cru en son potentiel et à sa bonne étoile.

Bravo, M. Julien.

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La série finale à peine terminée, les préparatifs de la saison 2011-2012 commencent. Le repêchage des joueurs amateurs s'amorcera le 24 juin. En cette journée de fête nationale, un Québécois, Jonathan Huberdeau, pourrait être sélectionné au premier rang.

Une semaine plus tard, la chasse aux joueurs autonomes sera lancée. L'avenir de plusieurs joueurs du Canadien, dont Andrei Markov et James Wisniewski, sera alors connu.

J'ai hâte de connaître les décisions de Pierre Gauthier. J'espère simplement que le magnifique parcours des Bruins ce printemps ne l'incitera pas à surévaluer son équipe.

Oui, le Canadien est venu à un but d'éliminer ses vieux rivaux. Mais il ne faut pas en tirer de conclusions ensoleillées. Ce serait un dangereux raccourci. La réalité, c'est que le Canadien a été éliminé dès la première ronde, perdant quatre de ses cinq derniers matchs. Rien pour bomber le torse.

Il faudra aussi surveiller l'annonce du nouveau plafond salarial. En avril dernier, j'ai estimé qu'il approcherait 64 millions, une hausse appréciable de 5 millions.

La nouvelle politique en matière de coups à la tête soulèvera également les débats. Le comité de compétition, auquel s'est joint Michael Cammalleri, a fait une proposition dont le texte reste à mûrir. L'objectif est de faire en sorte que tout devienne «noir et blanc» pour les arbitres et le nouveau préfet de discipline, Brendan Shanahan.

Le resserrement des règles représentera un pas en avant. Mais puisque la LNH refuse toujours d'interdire tous les coups à la tête, des incidents controversés se reproduiront.

La LNH est aux prises avec un enjeu éthique: la sécurité des joueurs et leur qualité de vie à long terme. Mais elle tente de régler ce problème par de modestes ajustements aux règlements. Tant qu'elle poursuivra dans cette veine, elle optera pour des expédients au lieu de s'attaquer à la racine du mal.

L'action ne manquera donc pas au cours des prochaines semaines. Mais aujourd'hui, contentons-nous de lever notre verre en l'honneur des Bruins.

Photo: Reuters

Menacé de congédiement advenant l'élimination de ses Bruins en première ronde, l'entraîneur-chef Claude Julien avait des raisons de sourire à 23h, heure de l'Est.