Les bourdons, des pollinisateurs essentiels pour favoriser les cultures et sauvegarder la flore sauvage, disparaissent à un rythme préoccupant aux États-Unis depuis ces vingt dernières années, selon une étude publiée lundi.

Un phénomène similaire est observé en Europe, faisant craindre une dépopulation de ces insectes sociaux à l'échelle planétaire, écrivent les auteurs de ces travaux parus dans le numéro des Annales de l'académie nationale américaine des sciences (PNAS) daté du 3-7 janvier.

Un degré élevé d'infestation par un pathogène microscopique appelé Nosema bombi et une faible diversité génétique paraissent être deux des causes liées à cette disparition spectaculaire des quatre espèces les plus communes en Amérique du Nord, sur les quinze qui y sont répertoriées. Il y en a 250 au total connues dans le monde.

Les petites cousines des bourdons, les abeilles domestiques, connaissent aussi depuis 2006 un phénomène de dépopulation appelé Colony Collapse Disorder (ou CCD), qui vide soudainement les ruches sans que les causes n'en aient été encore déterminées avec certitude.

Les bourdons pèsent moins lourds aux États-Unis que les abeilles domestiques, qui pollinisent plus de 90 variétés de fruits et légumes (pommes, avocats, myrtilles ...), des productions estimées à 15 milliards de dollars par an au total et qui comptent pour un tiers de la production alimentaire.

Ils jouent néanmoins un rôle important en Amérique du Nord pour certaines récoltes, surtout de baies comme les myrtilles mais aussi de tomates, sans compter leur contribution clé au cycle de reproduction des plantes sauvages.

En Europe, comme en France et en Allemagne, des bourdons sont élevés pour polliniser les tomates, les poivrons verts ou les fraises cultivés en serre, des récoltes qui pèsent des milliards de dollars par an sur le vieux continent, beaucoup plus qu'en Amérique du Nord, précise Sydney Cameron, entomologiste à l'Université de l'Illinois, principal auteur de ces travaux.

Aux États-Unis, les récoltes pollinisées par les bourdons ne se chiffrent qu'en quelques dizaines de millions de dollars par an, selon elle, mais devraient prendre de plus en plus d'importance.

Des industries d'élevage de bourdons existent au Japon et en Israël notamment, tandis que le Mexique et la Chine sont en train de développer la leur, indique cette entomologiste dans un entretien avec l'AFP.

Cela montre «que cette industrie est importante» et pourrait compenser les lourdes pertes subies par les abeilles domestiques et les bourdons.

«Les abeilles souffrent énormément et nous devons commencer à promouvoir d'autres espèces de pollinisateurs comme les bourdons pour l'apiculture... et c'est ce que s'efforce de faire actuellement un des membres de notre équipe de recherche au ministère américain de l'Agriculture», relève Sydney Cameron.

Pour ce faire, des reines bourdon appartenant à d'autres espèces sauvages sont apportées dans un laboratoire afin d'y observer leurs colonies et d'en déterminer la vigueur.

Les nids de bourdons contiennent beaucoup moins d'individus que les ruches, généralement de 250 à 300 contre de 5000 à 10 000, voire 20 000.

«Nous ne créons pas de nouveaux insectes mais étudions en laboratoire d'autres espèces sauvages pour déterminer si elles peuvent être utilisées par l'industrie de la pollinisation», dit-elle.

Cette scientifique a par ailleurs souligné que d'autres facteurs non étudiés dans l'étude pourraient contribuer au déclin des bourdons nord-américains comme les pesticides ou le changement climatique.