La perspective de devoir annuler une de ses prévisions sur la fonte rapide des glaciers de l'Himalaya porte un mauvais coup supplémentaire aux experts climat du GIEC, après le scandale du «climategate», et devrait réjouir les sceptiques du changement climatique.

Le président du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC), l'Indien Rajendra Pachauri, a annoncé lundi le lancement d'une enquête, après une mise en cause du quotidien britannique, le Sunday Times.

En 2007, dans son 4è rapport - qui lui avait valu le Prix Nobel de la Paix -, le GIEC avait prévenu que les glaciers de la chaîne de l'Himalaya reculaient plus vite que les autres glaciers du monde et «pourraient disparaître d'ici 2035, voire avant».

Selon le Sunday Times, cette échéance de 2035 pourrait n'être fondée sur aucune recherche valide et avait été utilisée à l'origine par l'organisation environnementale WWF.

Interrogé par l'AFP lundi, un éminent glaciologue autrichien et l'un des co-auteurs du rapport de 2007, le Pr Georg Kaser, de l'Institut de glaciologie d'Innsbr-ck, a assuré avoir attiré l'attention de ses pairs sur cette «erreur» dès 2006.

«Fin 2006 (...) j'ai pris connaissance de cette erreur et de quelques autres. C'était après la dernière revue, mais avant la publication, donc on avait encore une possibilité de modifier» le texte, a-t-il expliqué.

«Je l'ai fait remarquer», a-t-il insisté. «Pour une raison que j'ignore, ils n'ont pas réagi», a-t-il ajouté, regrettant «un certain amateurisme» de la part de certains de ses collègues chargés de ce chapitre.

Le rapport du GIEC comporte traditionnellement quatre chapitres: le premier porte sur les prévisions purement physiques du changement climatique; le second sur les impacts régionaux et l'adaptation des systèmes naturels; le troisième sur les impacts économiques; et le dernier est un «résumé à l'attention des décideurs» qui s'appuient sur ces travaux pour fonder la riposte politique au réchauffement.

Le Pr Kaser, l'un des auteurs du premier volet, a également été sollicité en tant qu'expert des glaciers par les rédacteurs du 2è chapitre - celui concerné par l'erreur sur l'Himalaya.

Cette erreur, avance-t-il, pourrait n'être qu'une «coquille» reprenant de manière erronée une étude d'un scientifique russe, le Pr Vladimir Klotlyakov, tablant en 1996 sur une disparition des glaciers de l'Himalaya «d'ici 2350».

Cette affaire, même si elle relevait de la simple erreur, s'avère malencontreuse pour le GIEC, déjà confronté à la veille du sommet climat de Copenhague au «climategate», une affaire de couriels piratés qui avait fortement perturbé l'ouverture de la conférence.

Des milliers de courriels de chercheurs collaborant avec l'université britannique d'East Anglia, victime d'un piratage informatique ou de fuites, avaient été publiés sur Internet.

Certains laissaient entendre que la communauté scientifique avait manipulé les données sur le climat pour étayer la thèse d'un réchauffement dû aux activités humaines.

Cette affaire avait alimenté le scepticisme et la contestation des conclusions du GIEC par certains politiques et groupes de pression.

Le Pr Kaser a avoué redouter, lundi, un effet rebond similaire.

«Je suis prudent», a-t-il expliqué, «car les gens vont de nouveau en profiter pour discréditer le GIEC, mais ils auraient tort».

«Le chapitre I, c'est de la science pure, sans aucune implication politique, qui s'appuie sur 150 à 200 ans d'expérience: les équations, les observations, sont bonnes ou sont fausses».

En revanche, estime-t-il, les méthodes de rédaction du second chapitre devront être reconsidérées d'ici la prochaine édition, en 2013.