Les opérations humanitaires se déployaient mercredi en Haïti sous la protection des troupes américaines, dans une capitale en ruines et sous tension, frappée par un nouveau séisme au petit matin.

Huit jours après le tremblement de terre du 12 janvier, une secousse de magnitude 6 a ébranlé Haïti mercredi à 6h03. Au moins trois bâtiments se sont effondrés à Port-au-Prince et à Carrefour, une banlieue proche, mais sans faire de victimes.

Cette nouvelle réplique, la plus forte depuis le séisme de magnitude 7 qui a dévasté Haïti, a ajouté au traumatisme des habitants, déjà bouleversés après avoir perdu au moins 75 000 de leurs compatriotes. «Tous les Haïtiens vont finir par mourir parce qu'ils sont maudits», assurait une mère de famille à bout de nerfs.

Un semblant de vie normale paraissait cependant lentement s'instaurer. Depuis mercredi matin, un drapeau haïtien, en berne, flotte de nouveau devant le palais présidentiel effondré de Port-au-Prince.

Plus de 300 campements improvisés regroupent environ 370 000 sans-abri dans la capitale haïtienne, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM). Le gouvernement haïtien avait estimé mardi le nombre total de sans-abri à un million.

Les chances de retrouver des survivants semblent infimes mais les sauveteurs poursuivent leurs efforts. Des secouristes mexicains et taïwanais étaient engagés dans une course contre la montre mercredi à Port-au-Prince pour tenter de sauver un ou deux survivants détectés par des chiens renifleurs.

Jusqu'à présent, les équipes de secours venues du monde entier ont retrouvé 121 personnes sous les décombres, a annoncé la porte-parole de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) à Genève, Elisabeth Byrs.

Plusieurs survivants avaient encore été encore sortis des gravats mardi, notamment un bébé de 23 jours, une petite fille prénommée Elisabeth, qui a été dégagée vivante des ruines d'une maison à Jacmel, une ville du sud d'Haïti, par des secouristes français.

Le désespoir n'en attise pas moins la violence et la tension est extrême dans les rues de Port-au-Prince. Mercredi, des militaires américains, lourdement armés, patrouillaient les rues commerçantes de la capitale, livrées ces derniers jours aux pillards.

Les Etats-Unis ont annoncé mercredi l'envoi en Haïti de 4 000 soldats supplémentaires, ce qui portera à 15 000 hommes leurs effectifs dans le pays. Ces renforts pourraient arriver avant vendredi.

Alors que des milliers de soldats américains poursuivaient leur déploiement dans les régions sinistrées, le navire-hôpital américain «Comfort» est arrivé au large de l'île. Entre 30 et 50 victimes du séisme, sélectionnées parmi les cas les plus graves, vont pouvoir y être soignées en même temps, a indiqué l'armée américaine. Le Comfort dispose d'une capacité de 1 000 lits.

L'armée canadienne remettait en état l'aéroport de Jacmel, ce qui permettra de désengorger celui de Port-au-Prince, distant d'environ 50 km, a annoncé mercredi le ministre canadien de la Défense, Peter MacKay.

L'aéroport de la capitale reste pour l'heure la principale voie d'accès de l'aide humanitaire, qui peine toujours à atteindre ses destinataires vu le chaos qui règne dans la ville.

«Il s'agit d'une des situations les plus compliquées auxquelles nous ayons jamais eu à faire face», a souligné un porte-parole de l'Ocha, Nicholas Reader. Le Programme alimentaire mondial a précisé avoir distribué «environ un million de rations alimentaires à plus de 200 000 bénéficiaires».

Le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, a ordonné de dégager le port de Port-au-Prince, dans l'espoir de le remettre en service «d'ici une semaine ou deux». La réouverture du port devrait permettre de faciliter considérablement l'arrivée des secours.

Le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, a appelé les Etats du monde à lancer «une sorte de plan Marshall» pour Haïti, dont la reconstruction pourrait prendre au moins 25 ans, selon l'ambassadeur haïtien en Espagne.

Selon l'ONU, des promesses de dons de plus de 1,2 milliard de dollars, provenant d'Etats, de personnes privées et d'entreprises, ont déjà été recueillies.

Mais dans un bidonville de Port-au-Prince, les habitants attendent toujours un premier camion d'aide. «On ne sait pas si l'aide est arrivée dans d'autres endroits de la ville. Mais ce qui est certain, c'est que nous n'avons rien vu», lance un père de quatre enfants, Placide Jemais.

USGS

Carte montrant l'épicentre et l'intensité du séisme du 20 janvier 2010 à Haïti.