La nouvelle installation nord-coréenne d'enrichissement d'uranium constitue une nouvelle provocation mais «pas une crise», a jugé lundi l'envoyé spécial américain pour la Corée du Nord, Stephen Bosworth, en visite en Asie.

L'envoyé spécial américain commentait des informations sur l'existence d'un programme d'enrichissement d'uranium en Corée du Nord. Pyongyang a fait visiter la semaine dernière une nouvelle et vaste usine d'enrichissement, disposant d'au moins un millier de centrifugeuses, à un scientifique américain.

Il s'agit d'«une série supplémentaire de provocations», a déclaré Stephen Bosworth, après une rencontre à Séoul avec le ministre sud-coréen des Affaires étrangères, Kim Sung-Hwan. «Cela dit, ce n'est pas une crise», a-t-il ajouté.

«Nous ne sommes pas surpris, nous avons suivi et analysé les aspirations (du Nord) à produire de l'uranium enrichi depuis quelque temps, cela remonte à plusieurs années», a précisé M. Bosworth.

Ce programme viole une résolution des Nations Unies et un accord intervenu en 2005 dans le cadre des pourparlers à six (Etats-Unis, Russie, les deux Corées, Chine, Japon), qui vise à faire renoncer le régime communiste à ses ambitions nucléaires en échange d'une aide importante.

Mais l'émissaire américain «n'écarte pas du tout la possibilité de nouvelles prises de contact avec la Corée du Nord». Il n'y aura pas cependant de «discussion juste pour le plaisir de discuter» et Pyongyang doit montrer qu'il est prêt à prendre des décisions claires sur sa dénucléarisation, a précisé Stephen Bosworth.

Interrogé sur l'avenir des pourparlers à six, qui paraissent moribonds, l'Américain a déclaré: «ils respirent encore et je continue de penser qu'il y a l'espoir de les ressusciter».

Pyongyang a claqué la porte des pourparlers à six en avril 2009 et procédé un mois plus tard à un essai nucléaire, le deuxième après l'essai d'octobre 2006.

L'usine visitée par le scientifique américain Siegfried Hecker est située sur le site nucléaire de Yongbyon, dont la Corée du Nord a annoncé le redémarrage après les sanctions imposées par l'ONU l'an dernier.

Les autorités nord-coréennes ont affirmé au scientifique que les centrifugeuses étaient destinées à produire de l'uranium faiblement enrichi pour alimenter un nouveau réacteur expérimental à eau légère actuellement en construction.

Si cette nouvelle installation ne semble pas conçue pour un usage militaire, l'enrichissement de l'uranium peut cependant être facilement porté à un taux suffisant pour fabriquer des armes nucléaires, a rappelé Siegfried Hecker.

Les autorités nord-coréennes affirment que leur usine compte 2000 centrifugeuses (M. Hecker en a vu un millier).

Selon David Albright, président de l'Institut pour la science et la sécurité internationale, basé à Washington, 2000 centrifugeuses peuvent produire quelque 26 kilos d'uranium pouvant être enrichi par an, une quantité suffisante pour la conception d'une arme nucléaire.

En dévoilant ses installations au scientifique américain, un ancien responsable du laboratoire nucléaire national de Los Alamos, Pyongyang peut vouloir se créer une nouvelle marge de manoeuvre pour marchander ou chercher à obtenir une exception pour utiliser de manière pacifique son programme d'enrichissement, à indiqué M. Albright à l'AFP dans un courriel.