Dix-sept manifestants ont été tués par balle lundi à Taëz, au sud de Sanaa, dans une poussée de violence ajoutant aux difficultés du président yéménite Ali Abdallah Saleh qui semble avoir perdu le soutien d'un allié de poids, les États-Unis. Les victimes sont tombées sous les balles des forces de l'ordre mais aussi de civils armés postés sur des toits lors d'une marche sur le siège du gouverneur de province.

«On a désormais 17 morts et le nombre de blessés se compte par dizaines», a déclaré à l'AFP Sadok Choujaa, un médecin qui dirige un hôpital de campagne soignant les protestataires.

Les manifestants ont pu atteindre le siège du gouverneur de province et entrer dans la cour du bâtiment. Mais ils ont été accueillis par des salves de tirs d'hommes armés dont certains étaient postés sur des toits, ce qui a alourdi le bilan des victimes, selon les protestataires.

À Sanaa, des militaires ralliés à l'opposition ont empêché sans violence quelque 200 policiers de s'approcher de la place de l'Université où campent les contestataires depuis le 21 février, selon un journaliste de l'AFP.

Dimanche à Taëz, un jeune a été atteint mortellement par les tirs de la police alors qu'il déchirait un portrait du président Saleh, ont rapporté de nombreux témoins mais les autorités ont démenti cette mort.

Dimanche encore, au moins treize personnes ont été blessées par des tirs de la police lors de manifestations à Hodeida, sur le mer Rouge. En outre, des centaines de manifestants ont été indisposés par des gaz lacrymogènes et des dizaines blessés par des jets de pierre, selon des sources médicales.

Les heurts ont débuté lorsque des dizaines de milliers de manifestants ont commencé à marcher sur le palais républicain de cette ville de 400 000 habitants, aux cris de «À bas le régime», selon des témoins.

Les affrontements se sont prolongés dans la nuit, alors que l'opposition continue d'exiger un départ immédiat du président Saleh, 69 ans, qui lui se dit prêt à le faire à la fin de l'année, après des élections générales.

Ce regain de violences intervient après des indications sur un changement de position de l'administration américaine à l'égard du chef de l'État yéménite qui était considéré comme un allié dans la lutte contre le réseau Al-Qaïda.

Le New York Times, citant des responsable américains et yéménites, a écrit dimanche que des responsables américains ont indiqué à leurs alliés yéménites que la position de M. Saleh était intenable, compte tenu de l'important mouvement de contestation et qu'il devrait quitter son poste.

Des négociations portant sur le départ du président yéménites ont débuté il y a plus d'une semaine, rapporte le quotidien. Il s'agirait de proposer à Saleh de remettre le pouvoir à un gouvernement provisoire jusqu'à la tenue de nouvelles élections. Ce principe en soi «n'est pas l'objet de contestation», a déclaré au journal un responsable yéménite.

Cela ne remet pas en cause la position de Washington concernant les opérations américaines de contre-terrorisme au Yémen, relève le Times.

Les incessants affrontements entre Saleh et les opposants «ont eu un impact négatif direct sur la sécurité dans tout le Yémen», a déclaré pour sa part au Times un responsable américain ayant gardé l'anonymat.

Dans ce contexte, les monarchies arabes du Golfe ont proposé leur médiation entre l'opposition et le pouvoir au Yémen, tout en restant vague sur le sort du président yéménite, à l'occasion d'une réunion de leurs chefs de diplomatie.

«Les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) ont convenu de mener des contacts avec le gouvernement et l'opposition yéménite» pour proposer «des idées» qui permettraient de débloquer la situation, selon un communiqué publié par la réunion qui ne donne pas de précisions sur cette initiative.