Une pomme unique, dans un emballage de plastique rigide. Un poivron bio, dans une barquette de styromousse, momifiée dans une généreuse couche de pellicule plastique. Quelques croustilles entassées, dans le fond d'un énorme sac d'aluminium.

Trouvez l'erreur...

D'un côté, les centres de tri croulent sous les ordures, le marché des matières recyclables s'effondre, les élus métropolitains exigent un milliard pour «gazéifier» les déchets domestiques, dont ils ne savent plus quoi faire.

Et de l'autre, l'industrie continue de suremballer ses produits, comme si la planète avait arrêté de tourner dans les années 1980.

Il y a là un problème, que l'on ne saurait voir. Pas plus les citoyens, qui prennent à témoin leur bac vert débordant pour exhiber leur sensibilité environnementale, que les gouvernements, qui n'osent tout simplement pas parler de ce sujet tabou qu'est la réduction à la source.

Pourtant, le meilleur déchet n'est pas celui qu'on «valorise», mais bien celui qu'on ne produit pas.

S'il y a crise aujourd'hui, si les centres de tri sont pris depuis trois mois avec d'énormes ballots de matières recyclables qu'ils sont incapables d'écouler, c'est en raison de la crise économique. Mais c'est aussi en raison des quantités phénoménales de déchets que nous produisons et de notre incapacité à confronter le problème d'où il origine.

«La politique québécoise de gestion des matières résiduelles 1998-2008 n'a débouché sur aucune mesure concrète en matière de réduction à la source», faisait récemment remarquer le Front commun pour une gestion écologique des déchets.

Résultat : la population a crû de 6 % au Québec de 1996 à 2006, tandis que la quantité de déchets générés a bondi de 55 %.

Certes, le gouvernement Charest a mis de l'avant des mesures pour réduire la consommation de sacs de plastique, mais il s'agit là de la pointe de l'iceberg : ils ne représentent qu'à peine 2% de l'ensemble des déchets résidentiels, selon Recyc-Québec.

Le problème est donc plus large, et aussi plus encombrant : il s'agit du suremballage.

Les statistiques à cet effet n'existent pas au Québec, mais si l'on se fie à celles recueillies ailleurs en Occident, environ la moitié des déchets domestiques, en volume, sont constitués d'emballages.

Les citoyens peuvent évidemment faire une différence et préférer les produits moins emballés. Mais leur influence réelle restera limitée, comparativement aux gouvernements, qui eux ont le pouvoir d'influencer les producteurs.

Il faut se rappeler que le Canada a ratifié le Protocole national sur l'emballage en 1998, une entente qui a incité l'industrie à réduire de moitié la quantité d'emballages acheminés au dépotoir.

Le problème, c'est que la cible à atteindre avait été fixée en tonnes plutôt qu'en volume : le poids des emballages a ainsi été réduit grâce à l'utilisation de matériaux plus légers, mais sa quantité, elle, n'a cessé d'augmenter depuis.

Pour éviter ce genre d'erreurs, la France s'y est pris autrement, avec des résultats plus probants. Les producteurs ont le choix entre la mise en place d'un système de consigne, la récupération des emballages ou la création d'une société qui a pour mandat de prendre en charge ces emballages.

L'idée est à explorer, au moment où l'on prépare à Québec la politique qui succédera à celle qui vient à échéance le mois prochain. Plutôt que de voler au secours des organismes lorsqu'ils sont en crise, on pelletterait ainsi le problème dans la cour des compagnies qui, après tout, en sont responsable.