Guy Carbonneau a été encore meilleur que je ne l'espérais. Je m'attendais évidemment à ce qu'il soit très poli envers l'organisation. Normal puisqu'on lui versera plus de 2 millions au cours des 26 prochains mois.

De plus, c'est au Centre Bell qu'il a rencontré les journalistes. Et la conférence de presse avait été organisée par Donald Beauchamp et Dominic Saillant, les deux manitous des relations publiques du Canadien. Ça voulait dire qu'on savait que Carbo serait civilisé.

Mais il y a différentes façons d'être politiquement correct. Il y a celle où on se vautre dans les clichés et l'autre où on demeure solidaire d'une organisation qu'on aime, qu'on a servie de toutes ses forces et qui continue à nous payer. C'est la deuxième voie qu'a choisie Guy Carbonneau. C'était la voie de la dignité et du respect.

Il a été excellent. Pour un homme qui avait des problèmes de communication comme l'a souligné, après coup, le «valeureux» capitaine Saku Koivu, Carbo a répondu aux questions pendant plus de 45 minutes. Sans se réfugier dans des lieux communs pour détourner une réponse peut-être délicate.

Et quand il a fait la démonstration par l'absurde de sa capacité à communiquer en demandant aux journalistes: «Depuis quatre ans, je vous ai rencontrés une ou deux fois par jour, selon vous, ai-je été capable de communiquer?». En ajoutant qu'il fallait être deux pour communiquer. Et en reconnaissant qu'il était conscient d'une certaine lacune de ce côté. Tellement, qu'il a choisi un homme aussi souriant et volubile que Kirk Muller pour l'assister. Justement parce qu'il était un communicateur hors pair.

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Carbo a évité de compliquer la vie de Bob Gainey quand on a abordé le sujet des «pommes pourries». Il a été généreux dans ses réponses. Mais en disant que Gainey avait onze joueurs sans contrat pour la saison prochaine et qu'il aurait l'occasion de se débarrasser de ces pommes pourries, il a donné de précieuses indications. Cherchez parmi ces onze joueurs et vous saurez qui sont ceux qui empêchent l'équipe d'obtenir les succès qu'elle mériterait.

Il a été impressionnant. Et s'il a toujours parlé avec dignité, on a compris à quel point il avait eu mal. On pouvait ressentir sa douleur quand Bob Gainey s'est rendu à sa maison pour lui dire en dix minutes qu'il était dehors. On pouvait imaginer cette totale incrédulité qui était sienne.

Et pendant ces neuf jours, il faudrait être complètement insensible pour ne pas se douter de l'immense peine d'amour qu'il traversait. Cet amant du hockey qui refuse de regarder les matchs de son équipe parce qu'il n'est plus capable de supporter la simple vision de ses joueurs, c'est l'amant abandonné par l'amour de sa vie qui ne peut plus regarder une simple photo de son amour. Même douleur, même sentiment de trahison, même révolte refoulée. Surtout que c'était la première fois de sa vie que ça lui arrivait.

Je discutais avec un de mes amis qui occupait une fonction un peu similaire à celle de Carbo. Un gros job très visible où on est toujours en plein coeur des décisions et de la compétition pour faire gagner une entreprise qu'on adore. Il a été tassé il y a quelques mois. Il a employé le mot «se désintoxiquer» pour expliquer à quel point la coupure est brutale quand on se fait congédier aussi brutalement.

Ça ne fait que neuf jours que Carbo est entré en désintoxication. L'homme calme et solide qui a rencontré les journalistes hier est encore blessé profondément. C'est certain. Et ce n'est pas une petite semaine en Floride qui va lui permettre de prendre du recul. Il aura besoin de vacances pour se remettre.

Hier, Carbo a été un excellent élève. Depuis deux ans, il suit des cours pour mieux communiquer avec les médias. Très bon français, bonne tenue, réponses précises pas trop élaborées, il a encore fait augmenter sa cote de respect et d'amour auprès des fans du Canadien et surtout du grand public.

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Alexei Kovalev a parlé de Carbo à Richard Labbé. En apparence, c'est très critique du coaching de Carbonneau. Mais en lisant attentivement, on réalise que c'est tout simplement du Kovalev tout craché. Un libre penseur qui n'a pas peur de ses opinions qu'il livre sans arrière pensée.

Je ne pense pas que Kovalev ait tenté d'avoir la tête de Carbo. Je pense plutôt que l'Artiste avait beaucoup trop de préoccupations à tenter d'aider les frères Kostitsyn pour jouer dans le dos de son entraîneur. Et plus j'en apprends sur ce qu'a fait Kovalev dans ce dossier et plus je l'aime bien.

Qu'il n'ait pas compris certaines décisions de Carbonneau, c'est évident. Et rien ne dit que Kovalev n'a pas raison dans ses critiques. Puisque jamais personne n'a dit que Carbo avait toujours raison derrière le banc et dans le vestiaire.

Mais Kovalev n'est pas celui qui a corrompu le vestiaire. C'est un autre K...