L'exploration et l'extraction des gaz de schiste captent l'intérêt d'une grande partie de la population québécoise. Les membres du Regroupement pour la responsabilité sociale des entreprises (RRSE) sont sensibilisés à cette réalité. En tant qu'investisseurs, nous sommes conscients des nombreux risques sociaux, économiques et environnementaux que génère l'extraction des gaz de schiste.

L'exploration et l'extraction des gaz de schiste captent l'intérêt d'une grande partie de la population québécoise. Les membres du Regroupement pour la responsabilité sociale des entreprises (RRSE) sont sensibilisés à cette réalité. En tant qu'investisseurs, nous sommes conscients des nombreux risques sociaux, économiques et environnementaux que génère l'extraction des gaz de schiste.

Nous croyons que la situation actuelle représente des risques économiques importants pour les actionnaires des différentes compagnies impliquées dans le processus actuel. Pour limiter ces risques à long terme, nous sommes d'avis qu'il serait judicieux pour l'industrie de marquer un temps d'arrêt afin de mettre en place des procédures visant à obtenir non seulement l'acceptabilité sociale de ces projets, mais le véritable consentement libre, préalable et éclairé des communautés affectées par ceux-ci. Dans cette perspective, nous croyons qu'un appui de votre association à l'élargissement du mandat du Bureau d'audience publique sur l'environnement (BAPE) et une prolongation de sa durée contribuerait à favoriser l'obtention de ce consentement et pourrait atténuer la crise sociale actuelle.

Le fait que les shales de l'Utica soient situées dans des régions agricoles et peuplées de la province accentue cette obligation et l'urgence d'arriver à rétablir le lien de confiance avec la population du Québec. Or, l'insatisfaction et l'inquiétude manifestées par un nombre grandissant de citoyennes et citoyens québécois s'expliquent par l'absence des conditions propres à l'obtention d'un consentement libre préalable et éclairé.  

Pour obtenir l'adhésion d'une population sur un projet donné, il ne suffit pas seulement de s'entendre sur le comment d'un projet, mais dans un  premier temps, d'être convaincu que le projet doit être fait. Le consentement libre d'une population ou d'une communauté ne s'obtiendra que seulement, et seulement si, il existe une possibilité de refuser sans contrainte ni pression la venue d'un projet. Un consentement préalable ne peut être obtenu devant un fait accompli.

La population doit avoir accès à une expertise scientifique indépendante et crédible. Actuellement, il n'existe pas d'étude d'impact environnemental satisfaisante sur les effets combinés de ces projets à court, moyen et long terme.

Une information complète sur ces projets détaillera également les bénéfices économiques de chaque partie impliquée dans ce processus. Au-delà des redevances de 12,5% et d'un certain nombre d'emplois promis, il importe de se rappeler que les Québécois subventionnent un pourcentage important de tous les frais d'exploration des compagnies impliquées dans le processus. En effet, le crédit d'impôt relatif à des dépenses d'exploration pétrolière et gazifière peut atteindre 35%. Il apparaît aussi important de connaître quelle sera la valeur du passif légué à l'État sous la forme de puits abandonnés.

À ces constatations, s'ajoutent des questionnements sur la part respective des responsabilités imparties aux compagnies d'exploitation, à leurs sous-traitants ou encore au ministère de l'Environnement en cas d'incident ou de contamination. Quelles sont les garanties financières fournies par les entreprises en cas de désastre? Les propriétés situées à proximité des puits demeureront-elles assurables? Quelle est la durée de vie des coffrages protégeant les nappes phréatiques des boues de forage? Qui paiera pour l'entretien des routes de campagne surutilisées par un trafic lourd imprévu? Qui aura priorité sur les ressources hydriques, en cas de sécheresse ou d'épuisement des nappes phréatiques? Ces questions, et bien d'autres encore, doivent être résolues avant que la population du Québec et les collectivités qui la constituent ne donnent leur assentiment.

La compagnie Talisman Energy a déjà pris le courageux pari de publier une étude sur les exigences relatives à l'obtention d'un consentement libre, préalable et éclairé. Cette demande lui avait été soumise par le RRSE et Bâtirente après que ces organismes aient pris connaissance de tensions sociales entre des communautés Achuars et l'entreprise au Pérou. Ne conviendrait-il pas de s'inspirer de cette étude?

Les membres du RRSE sont conscients de l'ampleur du projet envisagé. Ils reconnaissent que du point de vue de la finance corporative, tout ralentissement apporté à la mise en place du développement d'un projet peut contribuer à la réduction de sa valeur nette actuelle. Toutefois, ils sont aussi soucieux de s'assurer que les richesses naturelles du Québec soient exploitées en faveur du bien collectif. Nous souhaitons que nos investissements soient faits dans une perspective qui assurera à long terme une adéquation entre le rendement financier et l'amélioration de la vie collective. Les actionnaires que nous sommes souscriront aux projets qui sauront protéger l'environnement, obtenir le consentement des communautés affectées et ainsi garantir des rendements appropriés.