On a introduit l'ordinateur dans les classes d'école, on remplace l'ardoise par des tableaux interactifs branchés sur internet, on multiplie les portails, les didacticiels et les labos informatiques.

On a introduit l'ordinateur dans les classes d'école, on remplace l'ardoise par des tableaux interactifs branchés sur internet, on multiplie les portails, les didacticiels et les labos informatiques.

Et pourtant, encore aujourd'hui, la plupart des élèves québécois ne savent pas comment naviguer adéquatement dans cet océan d'information. Affligeant!

Bien sûr, les jeunes se meuvent avec aisance dans l'univers technologique, ils savent comment utiliser un traitement de texte, calculer en déplaçant leur souris et mener une recherche sur Google. Mais la plupart d'entre eux sont incapables d'aller plus loin que les premiers résultats présentés, de naviguer de façon efficace, de discriminer les bons des mauvais sites, de lire ce qu'ils dénichent avec un sens critique. Bref, de surfer intelligemment.

Les parents le voient bien. Leurs enfants n'ont parfois, comme tout devoir, qu'à «faire une recherche» sur le web ou à «trouver de l'information» sur un événement, sans qu'il soit question du choix des sources, de la fiabilité des données ou de l'éthique entourant le copié-collé...

La chose ne fait pas les manchettes, mais elle n'en est pas moins choquante, car les exclus de la société du savoir seront ceux qui ne s'y retrouveront pas.

Tout comme un crayon ne permet pas d'apprendre à écrire, un branchement à internet ne permet pas d'apprendre à s'en servir de façon intelligente. Et malgré cela, dans tout le débat sur la réforme et les compétences transversales, jamais les autorités n'ont-elles parlé des «compétences informationnelles», ce que les Américains appellent l'information literacy.

Voilà pourquoi, encore aujourd'hui, le sujet est carrément absent du cursus obligatoire des futurs maîtres. Voilà pourquoi bien des profs s'en tiennent trop souvent à une banale «intégration des technologies» à des fins de «pilotage d'activités d'apprentissage». Voilà pourquoi le développement de cette compétence dans les classes repose sur l'intérêt de l'enseignant pour les technologies de l'information.

Or il s'agit, pour l'école, d'un des défis les plus importants du XXIe siècle. Comme le soulignait récemment le philosophe Umberto Eco, «à l'avenir, l'éducation aura pour but d'apprendre l'art du filtrage».

Le Québec, à ce chapitre, a un sérieux retard à rattraper, d'autant que cette matière est obligatoire dans la plupart des écoles américaines. On peut bien se féliciter des résultats de l'évaluation PISA, mais la province aurait eu de bien piètres résultats si on y avait mesuré ce qu'on appelle la «littératie», c'est-à-dire l'habileté de comprendre comment l'information est organisée, de trouver les données recherchées, d'identifier les meilleures sources et d'utiliser ces dernières de manière critique.

À n'en pas douter, au fur et à mesure du développement de la société du savoir, les «illettrés numériques» s'ajouteront aux analphabètes. Assurons-nous que les Québécois ne soient pas du nombre.

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