Il y a 100 ans, les Cubs de Chicago remportaient la dernière Série mondiale de leur histoire. Alors que l'équipe vient de décrocher un deuxième championnat de division consécutif, les partisans rêvent de voir enfin leurs favoris mettre fin à leur disette. Mais une chèvre semble obstinément leur mettre des bâtons dans les roues.

Le 6 octobre 1945, les Cubs affrontent les Tigers de Detroit dans le quatrième match de la Série mondiale. En avance 2-1 dans la série, les Cubs ont l'avantage du terrain pour les quatre derniers matchs. Un homme, William Sianis, se présente aux tourniquets du Wrigley Field, deux billets en main et accompagné de sa chèvre, Murphy.

Sianis est propriétaire d'une taverne de Chicago. Un jour, Murphy, heurtée par un camion, trouve refuge dans son commerce. Elle devient rapidement pour lui un porte-bonheur, une mascotte. Souhaitant porter chance aux Cubs, il décide d'amener sa chèvre au stade. C'est le propriétaire des Cubs lui-même, P.K. Wrigley, qui refuse l'accès à l'animal «parce qu'elle pue». Insulté, Sianis lève alors les bras au ciel et dit: «Les Cubs ne gagneront plus jamais. Les Cubs ne gagneront plus une Série mondiale tant que la chèvre ne sera pas admise au Wrigley Field.»

Ainsi naissait la malédiction des Cubs, qui ont finalement perdu les quatre derniers matchs et la Série mondiale. Quelques jours plus tard, M. Wrigley recevait un télégramme: «Who Stinks Now!»

Des chèvres et des chats

Les malheurs s'accumulent alors pour les Cubs. Dans les 20 années qui suivent, soit tant que Murphy est vivante, les «Lovable Losers» terminent au fond du classement.

En août 1969, les Cubs sont en tête de leur division avec une avance de neuf matchs et demi sur les Mets de New York. Le 9 septembre, les deux équipes disputent une série cruciale au stade Shea. Alors que Ron Santo, des Cubs, est au cercle d'attente, un chat noir apparaît sur le terrain et se met à tourner autour de lui. Les Cubs perdent le match et s'effondrent. Ils terminent la saison neuf matchs derrière les Mets.

Le 4 juillet 1974, un cousin de William Sianis, Sam, et un journaliste du Chicago Tribune se présentent au Wrigley Field accompagnés d'un descendant de Murphy appelé Socrates. Sur son dos, une affiche: «Tout est pardonné. Laissez-moi mener les Cubs au championnat». Les autorités du stade refusent de laisser entrer la chèvre. Les Cubs, qui menaient alors la division par huit matchs, s'effondrent et perdent 16 de leurs 20 rencontres suivantes, en route vers une autre saison perdante.

Lors du match d'ouverture au Wrigley Field en 1984, les Cubs invitent Sam et sa chèvre. Cette année-là, l'équipe remporte facilement sa division. Lors du championnat de la Nationale, les Cubs gagnent les deux premiers matchs contre les Padres de San Diego et la série se transporte en Californie. Mais les Cubs refusent d'amener Sam et Socrates. Les Padres égalent la série. Dans le dernier match, les Cubs parviennent à prendre les devants et ne sont plus qu'à huit retraits de la Série mondiale. Une série d'erreurs coulent les Cubs, qui s'inclinent.

Le scénario se répète, presque identique, en 1989.

«Laissez entrer la chèvre!»

En 1994, les Cubs connaissent le pire début de saison de leur histoire, perdant 12 matchs de suite à domicile. Sam et sa chèvre se présentent alors au Wrigley Field, où on leur refuse l'accès, malgré la foule qui scande: «Laissez entrer la chèvre!» C'est Ernie Banks en personne qui se rend auprès de Sianis et qui l'escorte dans le stade. Les Cubs gagnent le match et mettent fin à leur série de défaites.

Le 28 septembre 1998, au Wrigley Field, les Cubs disputent un match suicide contre les Giants de San Francisco pour l'obtention du quatrième as. Sam et sa chèvre sont présents. Les Cubs remportent le match. Mais encore une fois, la chèvre reste à Chicago et les Cubs sont balayés par les Braves d'Atlanta.

En 2003, alors que les Cubs sont impliqués dans une chaude lutte avec les Astros de Houston, ils envoient la chèvre dans la ville texane. Les Astros se mettent à perdre, alors que les Cubs gagnent et accèdent aux séries. Ils prennent ensuite rapidement les devants 3-0 dans la finale de la Nationale contre les Marlins de la Floride, mais refusent encore d'amener la chèvre avec eux à Miami.

Lors du sixième match, à Chicago, les Cubs mènent 3-0 en huitième manche et ne sont plus qu'à cinq retraits de la Série mondiale. Un partisan, Steve Bartman, capte alors une balle hors ligne que Moises Alou pouvait attraper, privant ainsi les Cubs d'un précieux retrait. Une chaîne d'erreurs s'ensuit. Les Cubs perdent le match et la série.

La balle de Bartman, achetée pour 100 000$, a été détruite en 2004 dans un ultime effort pour briser la malédiction. Mais l'an dernier, après avoir remporté le championnat de la Centrale, les Cubs ont été balayés par les Diamondbacks de l'Arizona dès la première ronde.

Que nous réserve 2008? C'est à suivre. Mais si vous êtes un partisan des Cubs et que vous croisez une chèvre, soyez très poli avec elle. Mine de rien, ça peut être très rancunier, une chèvre...