Parmi les jeunes ayant commis des attouchements ou un viol, seulement un sur dix est arrêté par la police à la suite d'une nouvelle agression sexuelle. Par contre, près de la moitié d'entre eux commettront un autre crime quelconque.

C'est le constat fait par les criminologues Julie Carpentier et Jean Proulx, qui ont suivi pendant environ huit ans 351 jeunes agresseurs ayant été évalués à l'Institut Philippe-Pinel.

«C'est rare de voir des adolescents avec des préférences fixées pour les plus jeunes ou pour la violence. Leur problème, c'est qu'à cause de leurs carences, ils n'ont pas la chance d'expérimenter de façon adéquate avec quelqu'un de leur âge. Souvent, s'ils avaient le choix, ils préféreraient avoir une blonde», explique Nathalie Auclair, criminologue de Pinel.

«Le plus important, c'est de poser l'interdit, de leur faire réaliser la gravité de ce qu'ils font, dit-elle. Ils sont tellement pris dans leurs propres problèmes qu'ils n'arrivent pas à se placer dans les souliers de l'autre.»

Initialement, l'immense majorité d'entre eux minimisent leurs gestes. Avec le temps, lorsqu'ils comprennent qu'on ne les considère pas comme des pédophiles irrécupérables, ils s'ouvrent un peu. Officiellement, seulement 9 des 351 agresseurs étudiés par Julie Carpentier et Jean Proulx avaient des antécédents d'infraction sexuelle. Dans les faits, d'après ce qu'ils ont finalement admis, 78 d'entre eux en avaient déjà commis - apparemment, sans avoir été pris.

Comment évitent-ils de recommencer? «On les aide à déterminer ce qui déclenche leurs idées et toutes les étapes qui mènent à l'agression, parce qu'il y a toujours une préparation minimale, expose Caroline de Brouwer. On leur montre qu'ils ont le pouvoir d'arrêter à n'importe quel moment.»

Facteurs de récidive

Chez certains, cela s'avère plus difficile. Selon l'étude menée avec Pinel, le fait d'avoir été abandonné par son père et d'avoir agressé un enfant inconnu rend la récidive beaucoup plus probable. Le fait d'avoir été agressé sexuellement aussi. Car les problèmes d'attachement aux parents peuvent favoriser l'adoption de comportements antisociaux et empêcher de vivre une relation d'intimité.

Ceux qui récidivent le font rapidement, dans les deux ans pour la moitié d'entre eux. «Il faut donc organiser rapidement des services autour de ces ados», prévient Julie Carpentier.

Il faut aussi rester vigilant parce que, selon Statistique Canada, seulement 8% des agressions sexuelles sont déclarées à la police. Le taux de récidive réel risque donc d'être supérieur à ce que révèlent les études.