Les Autochtones ont été touchés par l’écoute du pape François cette semaine, mais demandent que l’Église participe davantage aux indemnisations.

« Je vois le progrès depuis ma première rencontre avec le pape Benoît XVI en 2009 », a déclaré Phil Fontaine, ancien chef de l’Assemblée des Premières Nations (APN), en conférence de presse après une rencontre de deux heures de l’APN avec le pape jeudi. « Il est important que l’Église demande pardon pour la souffrance qu’elle a causée dans les pensionnats pour Autochtones et reconnaisse la résilience des Premières Nations. Mais il faut que l’Église catholique fournisse des indemnisations appropriées. »

Natan Obed, président de l’Inuit Tapiriit Kanatami (ITK), avait tenu un discours similaire en conférence de presse après la rencontre de la délégation inuite avec le pape lundi. « Il y a un écart entre les engagements de l’Église catholique et ce qui a été fait en vertu de l’entente d’indemnisations de 2006 », a dit M. Obed.

Les Métis ont quant à eux déploré d’avoir été exclus des ententes d’indemnisation. « J’appelle le pape à créer un fonds d’indemnisation pour les Métis, qui serait administré par les Métis », a dit Mitchell Case, historien ontarien qui fait partie de la délégation politique métisse, en conférence de presse lundi. Les deux rencontres de lundi, avec les Métis et les Inuits, ont duré une heure parce que les délégations comptaient de deux à trois fois moins de participants que celle de l’APN.

PHOTO RICCARDO DE LUCA, ASSOCIATED PRESS

L'Association touristique autochtone du Canada faisait aussi partie de la délégation qui était à Rome cette semaine.

Les trois délégations ont demandé au pape de présenter des excuses lors de son voyage au Canada, prévu cet été. Mandy Gull-Masty, de Waswanipi, qui est cheffe du Grand Conseil des Cris, a souhaité en conférence de presse jeudi que ces excuses soient présentées sur les lieux d’un ancien pensionnat pour Autochtones.

L’Église catholique, plus précisément les communautés religieuses impliquées dans le système des pensionnats pour Autochtones, a déjà versé plus de 50 millions dans ce dossier. L’engagement de 2006 prévoyait une collecte de fonds auprès des fidèles avec un objectif de 25 millions, qui n’avait abouti qu’à 3,7 millions. Une nouvelle collecte de 30 millions a été annoncée en septembre et l’Église canadienne s’est engagée à verser cette somme quels que soient les montants versés par les fidèles.

Anciens pensionnaires

Une ancienne élève des pensionnats pour Autochtones, Martha Craig de Kuujjuaq, a témoigné en conférence de presse lundi avoir été touchée par l’accueil du pape. « Il se tenait devant la porte et a accueilli chaque personne, a dit Mme Craig. Nous avons besoin pour guérir de pardon, de la part des deux parties. Quand on ne pardonne pas, on est grugé de l’intérieur. »

La visite des trois délégations, qui rencontreront ensemble le pape vendredi midi une dernière fois, n’a pas fait l’unanimité, selon une journaliste crie qui a demandé jeudi midi, en cri et en anglais, à Mme Gull-Masty de commenter ces tensions.

« J’en ai parlé avec les autres délégués, a répondu Mme Gull-Masty aussi en cri et en anglais. Ils ont aussi dû faire face à des gens qui remettaient en question ce voyage. Je sens que nous faisons la bonne chose pour les survivants [des pensionnats]. Le message du pape aujourd’hui traduisait un authentique sentiment de communauté avec les Premières Nations. Son commentaire le plus fort a été sa douleur et sa honte devant la dévastation du système colonial. »