Des employés du CHSLD privé Villa Val des Arbres ont manifesté lundi à Laval pour demander au CISSS de revoir sa décision de mettre fin à son contrat d’achat de places avec l’établissement. Quelque 80 aînés installés à Val des Arbres par le réseau public devront déménager d’ici quelques mois.

Plus de 300 personnes attendent actuellement une place en CHSLD sur le territoire de Laval.

Malgré cela, le CISSS de Laval a annoncé la semaine dernière aux familles des bénéficiaires touchés son intention de ne pas reconduire son entente avec le CHSLD privé non conventionné Val des Arbres, où il achète la majorité des 145 places. L’établissement a été très durement touché par la première vague de la pandémie, avec 58 morts, soit 40 % de la clientèle. L’armée est intervenue.

« En février 2022, certains éléments portés à l’attention du CISSS de Laval [nous] ont amené à mandater une gestionnaire pour s’assurer de la qualité des soins et pour soutenir l’équipe clinique du CHSLD Villa Val des Arbres. Il y a eu des enjeux cliniques, c’est pourquoi le CISSS ne renouvelle pas l’entente », explique la porte-parole Marie-Eve Despatie-Gagnon.

Une annonce que personne n’attendait. Les employés croyaient au contraire que l’établissement allait être converti en CHSLD privé conventionné par Québec – le gouvernement a annoncé son intention de changer rapidement la vocation de quelques dizaines de maisons d’hébergement entièrement privées.

« On veut des réponses », martèle Julie Charbonneau, infirmière auxiliaire dans ce centre pour aînés depuis 20 ans. « On a demandé le pourquoi. La seule chose qu’on nous a répondue c’est qu’il y a des enjeux cliniques. Des enjeux cliniques, c’est large. Il n’y a aucun CHSLD au Québec qui est parfait. Tout le monde a des lacunes et nous aussi, mais on s’attendait à un partenariat avec le CISSS pour régler les problèmes. Depuis 20 ans, on a toujours eu des ententes avec le public. On s’explique mal [la décision]. »

L’infirmière s’inquiète pour le sort des 80 aînés, dont quelques centenaires, qui auront à déménager. « Ça nous fait beaucoup de peine. C’est beaucoup de déménagements et de déchirement. Les résidants, ce n’est pas facile pour eux. Les cas de démence, on fait juste les changer de chambre et on en a pour des mois à les rediriger, ils perdent complètement leurs repères. Là, un déménagement dans une autre bâtisse, avec de nouvelles personnes… »

Sa collègue préposée aux bénéficiaires Michaelle Audain est à Val des Arbres depuis presque aussi longtemps que Mme Charbonneau. Elle y a occupé son tout premier emploi. « C’est un gros coup », dit-elle.

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Michaelle Audain, préposée aux bénéficiaires

Pour les aînés « c’est un gros impact ». Certains locataires vivent au même endroit depuis plusieurs années, précise la femme. « On connait leurs habitudes. »

« On a des gens qui ont des pertes. Les changer complètement d’environnement, ça va être un autre impact. » Ce qu’elle demande : « qu’on nous donne la chance d’apprendre pour qu’on puisse garder nos aînés avec nous. »

« Si les gens n’étaient pas bien, ça ne ferait pas 20 ans que je suis ici, dit sa consœur Julie Charbonneau. On est des gens de cœur. C’est notre deuxième famille. »

Au CISSS, on assure être bien au fait des effets d’un tel changement sur les aînés. « Le CISSS de Laval est conscient qu’un déménagement constitue un évènement majeur pour les personnes aînées et leurs proches », dit Mme Despatie-Gagnon.

Mais : « la sécurité des résidants est un enjeu ; la qualité des services et des soins sont prioritaires », explique-t-elle.

L’an dernier, le CISSS a mis fin à un autre contrat avec le privé, cette fois avec le CHSLD Villa des Tilleuls où il achetait une soixantaine de places. L’établissement avait besoin d’une mise à niveau des soins et services et d’une modernisation des espaces de vie, explique-t-on. Avec l’ouverture prochaine d’un nouveau CHSLD public et de deux maisons des aînés, on a préféré laisser tomber l’entente. « La transition des résidants s’est bien déroulée », assure Mme Despatie-Gagnon.

La présidente du Syndicat québécois des employées et employés de service, Sylvie Nelson, qui représente les infirmières et les employés de bureau de Val-des-Arbres, s’inquiète pour le sort de ses travailleurs. Elle déplore le manque d’information et demande au moins que les employés aient un « fast track » pour être réembauchés par le CISSS. Le syndicat en a fait la demande. À date, la réponse a été non.