Oui, mais... Bip ! Bip ! Bip ! Quand la météo s’est déchaînée au Québec le 21 mai dernier, certains ont reçu trois alertes sur leurs cellulaires… alors que d’autres n’en ont reçu aucune. Que se cache-t-il derrière cette technologie ?

Après les textos des copains, les notifications des médias, et les alertes AMBER, voilà qu’Environnement Canada s’empare de mon téléphone pour me faire vibrer. À quoi sert cette nouvelle intrusion ?

Le samedi 21 mai dernier, alors que des orages s’abattaient sur le Québec, Environnement Canada a envoyé une alerte qui devait faire résonner les régions visées par la tempête. C’était la première fois que cet organisme de compétence fédérale employait cette disposition. Depuis le mois d’avril, Environnement Canada peut émettre des alertes en cas de vents de plus de 130 km/h, de tornade ou de grêle dépassant la taille d’une balle de baseball (7 cm et plus).

Le but est évidemment de donner le temps à la population de se mettre à l’abri. Par exemple, ce fameux 21 mai, un groupe de triathloniens à l’entraînement se trouvait près du lac Moore, dans les Laurentides, quand les orages ont transformé le paysage le 21 mai. Mais le système d’alerte n’est pas parfait. Sur les 60 personnes présentes, certaines ont reçu des alertes très rapidement, d’autres 30 minutes plus tard, décrit Annie-Claude Bédard, présidente du club Triathlon Laval. Un peu plus et les athlètes se retrouvaient pris au piège dans le lac, en pleine séance de natation. Grâce aux alertes, ils ont pu se réfugier à temps à l’auberge Manitonga.

Photo fournie par Triathlon Laval

Les membres de Triathlon Laval à Mont-Tremblant, au lendemain des orages du 21 mai 2022

Est-ce que mon GPS doit être allumé pour recevoir une alerte ?

Non. « Le GPS n’est pas utilisé du tout, explique Jonathan Bonneau, professeur associé à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal. C’est une question de connexion cellulaire : si vous êtes capable de faire des appels d’urgence, vous devriez être capable de recevoir les alertes. »

Les téléphones cellulaires sont en constante communication avec les tours cellulaires les plus près, détaille Stéphane Hamel, spécialiste en cybermétrie et informatique. « Ce faisant, l’identification du téléphone est échangée (le fameux identifiant de la carte SIM unique à chaque cellulaire et à chaque fournisseur), ajoute-t-il. Une triangulation de ces tours permet de positionner assez précisément le cellulaire. »

Qu’est-ce que ça veut dire exactement ? On parle d’approximativement 125 m en milieu urbain, de 300 m en milieu semi-urbain et de jusqu’à 4 km en milieu rural, répond le spécialiste. C’est le fameux système de géolocalisation GSM (pour Global System for Mobile communication).

Avec cette triangulation, le fournisseur peut connaître le numéro de téléphone et envoyer l’alerte aux personnes se trouvant dans un périmètre délimité.

Est-ce que ça respecte mon droit à la vie privée ?

Votre numéro de téléphone, votre identifiant et votre localisation sont des informations personnelles protégées. Cependant, la Loi sur la protection des renseignements personnels du Canada indique qu’il y a une exception en cas de « situation d’urgence mettant en danger la vie, la santé ou la sécurité de tout individu », signale Stéphane Hamel.

Pourquoi mon téléphone n’a-t-il pas reçu d’alarme ?

Votre téléphone n’est peut-être pas compatible avec le Service d’alerte sans fil au public (SASFP), qui est utilisé par le service canadien En alerte.

Consultez la liste des appareils mobiles compatibles

De plus, votre téléphone doit à la fois utiliser un réseau LTE et être connecté à un réseau LTE au moment où l’alerte est émise (certaines régions ou tours de téléphonie utilisent encore des réseaux 3G, soit la technologie préalable à LTE).

Au Québec, c’est le système Québec en alerte, relevant du ministère de la Sécurité publique, qui émet les alertes en cas d’urgence.

Consultez le site de Québec en alerte

Plusieurs personnes situées au même endroit peuvent-elles recevoir le signal à des moments différents ?

L’envoi des alertes se fait simultanément à tous les appareils mobiles dans une certaine zone en utilisant une méthode appelée Cell Broadcast, explique Marc-Étienne Léveillé, chercheur en logiciels malveillants.

Cependant, la façon dont l’alerte sera reçue par chaque personne variera en fonction du type d’appareil mobile et de son fournisseur de service de téléphonie. Deux personnes au même endroit avec des appareils ou des fournisseurs différents peuvent donc recevoir les alertes à des moments différents.

Dans quelles circonstances recevons-nous des alertes sur notre cellulaire ?

Le gouvernement canadien diffusait déjà des alertes par radio et par télévision. Depuis le 6 avril, celles par téléphone cellulaire ont été ajoutées par En Alerte.

Au Québec, les alertes sont émises en cas d’évènements qui « présentent une menace réelle ou imminente, comme des catastrophes naturelles, des incendies de forêt, des risques d’explosion de matières dangereuses et des alertes Amber », précise le gouvernement du Québec.

Le ministre fédéral de l’Environnement Steven Guilbeault estime que les alertes comme celle du 21 mai devraient être bonifiées pour s’assurer qu’elles rejoignent les bonnes personnes, au bon moment, rapportait La Presse Canadienne le 25 mai.

Avec la collaboration de Judith Lachapelle, La Presse