Face au succès de la Cantine côtière de la cheffe Colombe St-Pierre, la Ville de Rimouski souhaite dépoussiérer son règlement touchant la cuisine de rue sur son territoire.

Établie dans deux conteneurs posés devant le restaurant Chez Saint-Pierre au Bic, municipalité rattachée à Rimouski, dans le Bas-Saint-Laurent, la cantine très courue qui sert parfois jusqu’à 500 clients par jour faisait l’objet d’une fermeture potentielle l’an prochain.

Mis sur pied au premier été de la pandémie, en 2020, le kiosque de la célèbre cheffe et coach à l’émission Les chefs, entre autres, avait été autorisé temporairement à fonctionner sur ce terrain municipal, une permission renouvelée sans problème l’année suivante lorsque le Québec était toujours sous le coup d’importantes mesures sanitaires.

Lisez « Le coup de poker de Colombe St-Pierre »

Or, informée à l’hiver dernier de la décision de Colombe St-Pierre de poursuivre l’aventure pendant les étés à venir, la Ville l’a prévenue dans un premier temps que cela ne serait pas possible. Une nouvelle qui a d’abord surpris et déçu les propriétaires de Chez Saint-Pierre.

« Pour nous, la Cantine côtière permet quand même de garder le restaurant [Chez Saint-Pierre] en exploitation, car [sinon] ce ne serait pas vraiment viable. C’est une offre dont on peut plus se passer dans la région, et même que ça en prendrait d’autres ! La demande est largement supérieure à l’offre », explique le copropriétaire Alexandre Vincenot, conjoint de la cheffe.

Une question d’équité

En effet, le règlement municipal de Rimouski interdit l’exploitation « d’une remorque à conteneur, d’une roulotte ou d’un autre véhicule […] pour y exercer un usage principal, temporaire ou complémentaire », explique le maire de la Ville, Guy Caron, en entrevue à La Presse.

« Évidemment dans un cas comme la COVID, nous avions décidé de regarder ça au cas par cas afin d’aider les restaurateurs en difficulté », rappelle celui qui a été élu en novembre dernier, et donc après l’apparition du virus.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Guy Caron, maire de Rimouski

Le maire Guy Caron dit tout de même reconnaître la valeur « qu’une cantine comme ça peut avoir pour Colombe et pour nous autres, pour la région, pour le tourisme ». « Mais une ville se doit de faire respecter sa réglementation et il y a aussi une question d’équité. »

D’où l’idée de charger l’administration municipale de réviser la réglementation sur la cuisine de rue « dans une perspective où Rimouski est intéressé à être attractif au point de vue touristique », dit-il.

C’est une chose de dire qu’on fait des exceptions, mais si on le fait, il faut le faire aussi pour les autres restaurateurs, d’où l’importance de voir la situation dans son ensemble.

Guy Caron, maire de Rimouski

« On est rendu là »

Bien qu’il ne veuille pas présumer des conclusions de la consultation qu’il a lui-même commandée, Guy Caron estime « qu’on est rendu là » avec la réglementation sur la cuisine de rue. « Si c’est bien fait, ce peut être […] apprécié des gens de la région et des touristes », juge-t-il.

Une possible compétition des restaurateurs de l’extérieur aux restaurateurs rimouskois avec pignon sur rue constituait l’une des préoccupations soulevées lors des discussions au conseil municipal, indique-t-il.

« On est d’accord, il ne faut pas aller mettre ça à côté de plein de restaurants [qui existent déjà] », opine le copropriétaire de la Cantine côtière Alexandre Vincenot. Ce dernier plaide toutefois pour un règlement assez restrictif afin de « faire une sélection à la base ».

Fier militant de l’autonomie alimentaire québécoise, tout comme sa conjointe, il plaide pour l’inclusion de cibles d’achat local. « [Par exemple], exigez donc que ce soit 95 % d’achat local. C’est des mesures relativement simples et quand on veut, on peut », estime le restaurateur.

[Un règlement], ça se change beaucoup plus facilement que de créer une cantine côtière.

Alexandre Vincenot, copropriétaire de Chez Saint-Pierre et de la Cantine côtière

Se réinventer

Le chef d’hôtel souligne également la nécessité pour la réglementation de s’adapter à la nouvelle réalité post-COVID. « Quand on a choisi de rouvrir [durant la pandémie], on n’avait pas le choix. On nous a demandé quand même au niveau gouvernemental de nous réinventer, on s’est réinventés et ça marche très bien », lance-t-il. La Cantine côtière, « ça fonctionne très très bien ». « Pourquoi on l’enlèverait ? »

Alexandre Vincenot et Colombe St-Pierre ont bon espoir de signer à terme une entente de trois ans avec la Ville de Rimouski afin de pérenniser la présence de leur cantine au Bic.

Le maire Guy Caron s’attend à ce que les conclusions de l’administration municipale quant à la révision du règlement sur la cuisine de rue soient rendues à l’automne ou au début de l’hiver en vue de la prochaine saison touristique. « Pour l’instant, l’intention, c’est qu’elle puisse continuer », ajoute-t-il, au sujet de la Cantine côtière.