(Ottawa) Le chaos guette à nouveau les aéroports du pays d’ici quelques mois, avertit l’Association canadienne du contrôle du trafic aérien (ACCTA). La raison : il y a un nombre insuffisant de contrôleurs du trafic aérien à l’heure actuelle et les efforts déployés pour recruter et former de nouveaux contrôleurs sont inadéquats.

Résultat : les contrôleurs en poste à travers le pays doivent effectuer de nombreuses heures supplémentaires pour répondre à la demande. Mais cette option n’est plus viable à court terme en raison de la pénurie de main-d’œuvre et du départ inévitable à la retraite de certains employés, estime le président de l’Association canadienne du contrôle du trafic aérien (ACCTA), Nick von Schoenberg, dans une entrevue accordée à La Presse.

La pénurie de main-d’œuvre a déjà forcé la tour de contrôle de l’aéroport de Hamilton à cesser ses activités pendant huit heures l’été dernier. Et ce scénario pourrait se répéter ailleurs si rien n’est fait pour corriger la situation, a soutenu M. von Schoenberg.

« Cela fait des années que l’on dit qu’il manque de contrôleurs aériens. Il en faudrait au moins 200 de plus en ce moment. Mais on tarde à former de nouveaux contrôleurs », a expliqué M. von Schoenberg.

Négociations imminentes

L’ACCTA représente 1800 contrôleurs du trafic aérien dans l’ensemble du pays qui sont employés par Nav Canada. Les deux parties doivent entreprendre ce mois-ci des négociations visant à renouveler la convention collective. Les contrôleurs du trafic aérien sont considérés comme des travailleurs essentiels et ils n’ont donc pas le droit de grève. Leur contrat de travail vient à échéance au printemps 2023.

M. von Schoenberg a fait valoir que les voyageurs canadiens pourraient devoir composer de nouveau avec de longues files d’attente ou des vols en retard ou annulés d’ici quelques mois si la direction de Nav Can ne réussit pas à recruter de nouveaux employés.

À titre d’exemple, il a indiqué que la tour de contrôle de l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau à Montréal devrait normalement compter sur une équipe de 36 contrôleurs, mais que seulement 25 contrôleurs sont en poste.

Le même genre de situation prévaut à Ottawa, à Toronto et à Vancouver. Dans les aéroports régionaux du Québec, il y a aussi un manque d’employés. Les contrôleurs doivent travailler de très longues heures et souvent, ils sont seuls. C’est une pratique avec laquelle nous sommes totalement en désaccord.

Nick von Schoenberg, président de l’Association canadienne du contrôle du trafic aérien

M. von Schoenberg se défend d’être alarmiste. Mais il invite la direction de Nav Can à se doter d’un plan pour éviter d’être prise au dépourvu, comme l’a été le gouvernement fédéral lorsque les aéroports ont été pris d’assaut par les voyageurs l’été dernier après deux ans de pandémie. Il a indiqué que son organisation souhaitait travailler de concert avec Nav Canada pour éviter une crise dans ce secteur.

« Il y avait déjà, avant la pandémie, une pénurie de contrôleurs du trafic aérien, et le ralentissement marqué dans l’industrie durant la pandémie a contribué à réduire le nombre de contrôleurs aériens et a entraîné l’arrêt de toutes les activités de formation. Le rythme et la vigueur de la reprise dans le secteur de l’aviation signifient que le Canada est maintenant aux prises avec un manque criant de contrôleurs du trafic aérien », a-t-il déploré.

Faible taux de réussite à l’examen

Il a souligné que la durée totale de la formation est d’environ deux ans ou plus, mais que le taux de réussite chez les candidats s’est toujours situé uniquement entre 30 et 40 %.

« Cette situation, conjuguée à la pénurie générale de main-d’œuvre et au vieillissement de la main-d’œuvre, signifie qu’atteindre le nombre nécessaire de contrôleurs du trafic aérien sera très difficile dans l’avenir », a-t-il fait valoir.

Dans une déclaration à La Presse, Nav Canada affirme déployer les efforts qui s’imposent pour former et embaucher de nouveaux employés.

Plus de 300 personnes suivent actuellement une formation, et plus de 500 personnes devraient se joindre aux programmes de formation au cours des deux prochaines années.

« Nos prévisions actuelles montrent que le taux de personnel nouvellement qualifié dépassera le taux d’attrition », a indiqué Vanessa Adams, porte-parole de Nav Canada.

« La pénurie de main-d’œuvre est un problème complexe auquel est confronté non seulement le secteur des transports, mais aussi une grande partie de l’économie canadienne et mondiale. Il est important de souligner qu’en raison d’absences et de congés de maladie imprévus (congés liés à la COVID-19 ou aux virus en circulation, ou congés supplémentaires accordés aux employeurs sous réglementation fédérale), le personnel fait l’objet d’une forte pression, y compris aux emplacements où les niveaux de dotation sont aux niveaux cibles. »

Elle a ajouté que dans l’ensemble, le manque de personnel n’a eu qu’une faible incidence sur les services offerts jusqu’ici.

Dans la version précédente de ce texte, il était écrit que l’’ACCTA représente 18 000 contrôleurs du trafic aérien dans l’ensemble du pays. Cette organisation représente en fait 1800 employés.