Deux animateurs de radio se sont excusés jeudi après avoir tenu des « propos déplacés » à l’endroit de la mairesse Catherine Fournier, qui avait révélé mardi être celle qui a été agressée sexuellement en 2017 par l’ancien péquiste Harold LeBel.

« Si j’ai une collègue qui ressemble à Catherine Fournier, qu’on prend un verre ensemble dans mon appartement toute la soirée, et je l’invite à venir sur mon divan-lit, à partager mon lit quand il y a une autre chambre, puis elle dit oui, ça se peut que je m’essaie. Si elle dit non, on arrête, mais ça se peut bien que je m’essaie », a affirmé mardi l’animateur Simon Tremblay, sur les ondes de la station KYK, à Saguenay.

À un moment dans l’échange, il demande ce que Mme Fournier « faisait » dans la résidence de M. LeBel au moment de l’agression sexuelle. « Imagine le party. Lui, là, il vient de se séparer avec sa femme, pis sa plus belle collègue arrive dans son lit alors qu’il a une face de cul de singe », poursuit M. Tremblay.

PHOTO ROCKET LAVOIE, ARCHIVES LE QUOTIDIEN

L’animateur Simon Tremblay

Le groupe Cogeco a expliqué jeudi que son employé avait « émis des propos déplacés ». « L’animateur reconnaît qu’il manquait de rigueur, de recul et d’information au moment de faire ses commentaires. Cogeco Média condamne ses propos. Ce type de commentaires n’a absolument pas sa place sur les ondes », affirme la directrice principale aux communications du groupe, Christine Dicaire.

Elle soutient également que « Simon Tremblay a présenté des excuses personnellement à Catherine Fournier, qu’elle a acceptées. Le principal intéressé a aussi présenté des excuses publiques en ondes, aux alentours de 11 h jeudi. Pour la suite, « les mesures disciplinaires prises demeureront de régie interne », précise toutefois Mme Dicaire, sans s’avancer davantage.

Sur Instagram, jeudi, la mairesse Fournier s’est demandée si « on tolère encore ce genre de propos sur nos ondes, en 2023 ? ». « Je confirme avoir reçu les excuses de Simon Tremblay. Je les acceptées en le conscientisant sur les effets de tels propos sur les personnes victimes d’agression sexuelle. Il m’a indiqué regretter sincèrement ses propos et avoir compris plusieurs choses en visionnant le documentaire auquel j’ai participé », a-t-elle réagi dans une déclaration.

Sur son site web, le Conseil canadien des normes de la radiotélévision (CCNR) a dit jeudi avoir reçu « un grand nombre de plaintes très similaires » en lien avec l’émission de Simon Tremblay. « Ceci affecte les capacités techniques de traitement de plaintes du CCNR. En conséquence, le CCNR, bien qu’il traitera ce dossier selon sa procédure habituelle, n’acceptera plus aucune plainte y ayant trait », a-t-on mentionné.

« Tu t’organises pour ne pas sentir bon »

Les propos de M. Tremblay s’ajoutent par ailleurs à ceux tenus mercredi matin par l’animatrice Monika Bourgeois sur les ondes de CFYX, une radio de Rimouski. « Elle a été se coucher sur le lit escamotable. Elle a été prendre sa douche. En partant, prendre ta douche avant de te coucher… Si ça ne te tente pas, tu t’organises pour ne pas sentir bon », avait alors dit l’animatrice en parlant de Catherine Fournier.

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK DE CFYX

Monika Bourgeois

Ses commentaires ont immédiatement provoqué des réactions, plusieurs élus locaux annonçant notamment qu’ils boycotteront la station jusqu’à ce que « d’énormes correctifs s’imposent ». Le préfet de la MRC, Bruno Paradis, a aussi vivement condamné la situation.

« Il est impératif de mettre fin à cette culture d’intimidation, de diffamation et de dénigrement envers les victimes d’agressions sexuelles », a par exemple martelé le conseiller municipal à Rimouski, Sébastien Bolduc. « La liberté d’expression a le dos large. Ce type de journalisme est toxique », a de son côté déploré la conseillère Julie Carré.

En ondes, Monika Bourgeois a admis jeudi « avoir dépassé certaines limites », avouant que ses propos « n’avaient tout simplement pas leur place ». « Je tiens à m’excuser profondément et sincèrement et directement à Catherine Fournier, mais également à tous ceux qui ont pu être offensés par les propos que j’ai tenus », a-t-elle dit.

Dans un communiqué, le Réseau des centres d’aide aux victimes d’actes criminels (CAVAC) a fait valoir jeudi que « peu importe l’habillement d’une personne, qu’elle ait choisi de se rendre chez l’agresseur de son plein gré et peu importe les attentes que ce dernier peut avoir, la responsabilité d’une agression sexuelle ne revient en aucun cas à la personne victime ». « Dans 80 à 85 % des cas, la [victime] fige au moment de l’évènement plutôt que de fuir ou de combattre », a aussi rappelé l’organisme.