(Ottawa) Le gouvernement fédéral a déposé vendredi une nouvelle offre à l’Alliance de la fonction publique du Canada pour le renouvellement des conventions collectives alors que des milliers de travailleurs fédéraux demeuraient en grève pour une dixième journée consécutive.

Le syndicat et une porte-parole de la présidente du Conseil du Trésor Mona Fortier ont confirmé qu’il y avait eu une nouvelle offre, ce qui est le premier signe de progrès depuis que le syndicat a déclaré que les pourparlers étaient dans une impasse mercredi.

L’attachée de presse de Mme Fortier, Monica Granados, l’a qualifiée d’« offre globale », mais n’a fourni aucun autre détail.

Dans une déclaration écrite, le syndicat a confirmé avoir reçu l’offre alors que les pourparlers reprenaient vendredi.

« Nous espérons continuer à négocier ce week-end afin de parvenir à un accord équitable », indique la déclaration.

Le premier ministre Justin Trudeau a déclaré vendredi que le gouvernement faisait des « offres sérieuses » dans le but de mettre fin à la grève du plus grand syndicat du secteur public.

Plus de 100 000 membres de l’Alliance de la fonction publique du Canada ont quitté le travail le 19 avril et les pourparlers se sont poursuivis par intermittence depuis.

Les conventions collectives touchent 155 000 travailleurs fédéraux au total, mais le gouvernement a considéré environ 46 000 d’entre eux comme des travailleurs essentiels qui ne participent pas aux moyens de pression.

Les conventions collectives de l’AFPC sont venues à échéance en 2021.

Plus tôt cette semaine, le président national de l’AFPC, Chris Aylward, déclarait qu’il souhaitait que M. Trudeau s’implique directement dans les négociations, qui, selon lui, se trouvaient dans une impasse parce que le gouvernement n’avait pas fait de mouvement depuis sa dernière offre d’augmentation salariale de 9 % sur trois ans.

M. Trudeau, qui était à New York cette semaine pour une visite axée sur le commerce, a soutenu qu’il était impliqué dans les négociations.

« Depuis les débuts, je suis impliqué dans les stratégies de négociation, dans l’engagement que l’on a autour de la table de négociations », a-t-il déclaré, répondant à une question d’une journaliste lors d’une conférence de presse.

Il s’est dit convaincu que la grève pourra prendre fin par l’entremise d’un accord négocié. Le gouvernement pourrait mettre un terme à la grève avec une loi de retour au travail, mais les ministres libéraux ont même refusé de répondre à une question sur l’utilisation d’un tel outil.

« J’ai confiance dans le processus de négociations. Nous allons continuer de veiller là-dessus, a déclaré M. Trudeau. Nous savons que nos négociateurs font des offres sérieuses. »

Dans un message sur Twitter vendredi matin, la présidente du Conseil du Trésor, Mona Fortier, a déclaré que les deux parties discutaient à la table de négociations.

« Le gouvernement est déterminé à négocier un accord équitable, compétitif et raisonnable », a-t-elle affirmé.

La dernière offre salariale rendue publique par le gouvernement devait être antidatée à 2021, avec une augmentation de 1,5 % cette année-là, suivie d’une augmentation de 4,5 % en 2022 et d’une autre de 3 % en 2023.

Mme Fortier a répété à plusieurs reprises qu’il s’agissait de l’offre salariale recommandée par la Commission de l’intérêt public, un comité nommé l’an dernier par la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral pour aider les deux parties à parvenir à un accord.

Le syndicat a initialement demandé 13,5 % sur la même période et bien qu’il affirme avoir ajusté cette demande, il n’a pas précisé quelle est la nouvelle proposition.

Tôt vendredi, les piquets de grève étaient un peu plus clairsemés au centre-ville d’Ottawa qu’elles ne l’avaient été plus tôt dans la semaine, lorsque des membres du syndicat ont inondé l’enceinte parlementaire dans le but d’intensifier l’impact direct de la grève.

Une poignée de travailleurs sont restés devant les portes de nombreux immeubles de bureaux fédéraux, limitant l’entrée à une personne toutes les cinq minutes.

Mais un rassemblement plus important a eu lieu sur l’un des ponts qui traversent la rivière des Outaouais jusqu’à Gatineau, au Québec, où les membres de l’AFPC ont également marqué le Jour de deuil national pour les travailleurs tués ou blessés au travail.

« Nous prenons le pont », a scandé un grand groupe de grévistes alors qu’ils le traversaient.

Des grévistes se sont rassemblés tôt vendredi matin devant l’édifice de Service Canada situé sur Place de la Cité, à Sherbrooke, afin de prendre des autobus qui devaient les emmener au poste frontalier de Stanstead, en Estrie, pour manifester au dixième jour de leur débrayage.

Ce petit poste de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), qui est ouvert en tout temps, permet de franchir les quelques mètres qui séparent Stanstead de la municipalité de Derby Line, dans l’État du Vermont.

Cette manifestation devait être moins imposante que celle de la veille, lorsque de nombreux syndiqués en grève ont manifesté tout près du poste frontalier de Saint-Bernard-de-Lacolle, en Montérégie, habituellement l’un des plus achalandés au Canada. Plusieurs policiers de la Sûreté du Québec (SQ) étaient aussi sur les lieux ; ils ont formé une barrière humaine limitant les déplacements des manifestants.

Salaires et télétravail

Les membres de l’Alliance de la fonction publique du Canada en étaient vendredi à leur dixième journée de débrayage. Le conflit de travail touche quelque 155 000 travailleurs, soit environ le tiers de l’ensemble de la fonction publique fédérale, dont font partie 35 000 travailleurs de l’Agence du revenu du Canada (ARC) qui négocient séparément leur convention collective.

Les négociations tenues jusqu’ici n’ont pas permis de trouver de terrain d’entente sur des questions telles que les augmentations de salaire et le télétravail.

Mme Fortier a déclaré dans une lettre ouverte plus tôt cette semaine qu’elle proposait de faire un examen conjoint de la politique de télétravail avec les syndicats.

Jennifer Carr, présidente de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada, a déclaré que c’était un bon début, mais que ce n’était pas suffisant.

« Nous avons besoin d’un engagement contraignant dans une convention collective, car nous avons vu trop de cas où l’employeur a abandonné ses promesses ou ignoré le processus après avoir signé un protocole d’entente avec nous », a-t-elle déclaré.

Mme Carr a affirmé que la consultation du gouvernement sur la directive de retour au bureau était « épouvantable » et qu’elle n’était même pas en phase avec les avis des propres conseillers du gouvernement.

Alors que la grève se poursuit, les Canadiens sont confrontés à un large éventail d’interruptions de services fédéraux, notamment l’incapacité de traiter les demandes d’immigration et de passeport.