« Le pire n’est peut-être pas derrière nous, mais peut-être devant nous. » Cette phrase à glacer le sang, c’est le ministre fédéral de l’Environnement, Steven Guilbeault, qui l’a laissée tomber, jeudi, lors d’un bref point de presse visant à faire le point sur les incendies de forêt à travers le pays.

Le ministre s’appuyait sur les prévisions des scientifiques d’Environnement Canada et de Ressources naturelles Canada, selon qui « nous aurons probablement un été très sec et très chaud et, donc, des conditions très propices à ce qu’il y ait d’autres incendies de forêt ».

PHOTO JUSTIN TANG, LA PRESSE CANADIENNE

Le ministe de l'Environnement Steven Guilbeault

Pourtant, le Canada est déjà au pire, avec des incendies qui ont ravagé 5,7 millions d’hectares de forêt-l’équivalent de trois fois la superficie du lac Ontario, a illustré le ministre de la Protection civile, Bill Blair-ce qui est déjà, à la mi-juin, plus du double de la superficie annuelle moyenne de 2,7 millions d’hectares de la dernière décennie.

Jeudi dans la journée, 458 incendies ravageaient les forêts canadiennes, dont 235 étaient hors de contrôle. En tout, plus de 18 600 Canadiens sont chassés de leur foyer.

Espoir à Lebel-sur-Quévillon

Dans le Nord-du-Québec, les habitants de Lebel-sur-Quévillon devraient pouvoir réintégrer leur domicile bientôt alors que le rétablissement des services essentiels progresse bien.

Dans une déclaration sur Facebook jeudi soir, le maire Guy Lafrenière a affirmé que « le plan de réintégration des services et des citoyens sera déployé à partir de (vendredi) ».

« Le travail de sécurisation de l’usine porte ses fruits », a-t-il déclaré, alors qu’il se faisait déjà rassurant plus tôt en journée sur ces travaux effectués pour protéger l’usine Nordic Kraft, qualifiée de véritable poudrière de produits chimiques et de mazout.

« La sécurité civile confirme que les mesures qui ont été appliquées pour sécuriser l’usine sont efficaces et adéquates », a affirmé le maire en soirée.

Concernant le retour des quelque 2000 évacués de la municipalité du Nord-du-Québec, il a assuré que la planification s’effectuait déjà jeudi soir et qu’il pourrait confirmer vendredi « la date officielle du retour » lors d’une conférence de presse à 11 h, en direct sur Facebook.

« De plus, c’est à partir d’aujourd’hui (jeudi) que la gestion du feu 344 a été prise en charge par l’équipe en provenance des États-Unis. C’est à elle que revient de faire le plan d’attaque », a-t-il indiqué, tout en ajoutant que des ressources en provenance du Portugal arrivaient vendredi.

Jeudi soir, on dénombrait 105 incendies de forêt dans la province, dont 26 hors de contrôle, incluant dans la zone critique de Chibougamau.

Les citoyens de Chibougamau sont toujours sur un pied d’alerte après avoir pu revenir après une première évacuation, l’incendie qui menace la communauté demeurant préoccupant pour les autorités.

La SOPFEU précisait cependant qu’il n’y avait aucune menace imminente d’évacuation pour Chibougamau, de même que pour Chapais et Oujé-Bougoumou, mais que la vigilance est à son maximum.

Pas assez de pluie

Plus tôt dans la journée, la SOPFEU avait de bonnes et de mauvaises nouvelles pour les secteurs touchés.

La bonne nouvelle est que la réduction du nombre de feux hors contrôle et du nombre total de feux « va nous permettre graduellement de renforcer les secteurs qui sont encore problématiques », a expliqué le porte-parole de la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU), Sylvain Tremblay, en point de presse à Québec.

« La pluie des derniers jours nous a permis, dans certains secteurs, de commencer à normaliser l’état des feux et de pouvoir confirmer qu’il n’y a plus de progression de façon temporaire sur des incendies un petit peu partout en province », a-t-il précisé.

La mauvaise nouvelle, c’est que Dame nature refuse de verser des pluies abondantes, là où elles sont le plus nécessaires, a-t-il précisé. « Dans les régions du Nord-du-Québec et de l’Abitibi, la pluie n’a pas été significative dans les dernières heures et elle continuera à ne pas l’être pour les deux ou trois prochains jours avant la reprise du beau temps. »

Car oui, ces quantités minimalistes de pluie seront suivies de temps ensoleillé et sec, ce qui ne laisse rien augurer de bon.

Mauvaise qualité de l’air

À ses côtés, le porte-parole du ministère de la Sécurité publique, Jean Savard, a rappelé qu’il y a toujours « quelques panaches de fumée à travers la province qui amènent les mêmes recommandations de santé publique », soit d’éviter l’exercice intense à l’extérieur et, pour les gens qui ont des problèmes respiratoires, de rester à l’intérieur et de ne pas s’exposer à la fumée là où elle est plus présente.

Plus tôt dans la journée, Environnement Canada a lancé des avertissements de smog pour plusieurs secteurs de l’Abitibi-Témiscamingue, des Laurentides et de l’Outaouais. La mauvaise qualité de l’air est due à des concentrations élevées de particules fines en raison des incendies de forêt, précise l’agence.

Au total, ce sont près de 1,3 million d’hectares de forêt qui ont été affectés par les feux cette année. C’est 400 fois plus que la moyenne annuelle des 10 dernières années.

Un total de 1200 combattants du feu sont à l’œuvre au Québec et, parmi eux, se trouvent des Néo-Brunswickois, des Français, des Américains, des Portugais et des Espagnols, notamment. Sylvain Tremblay a dit s’attendre à l’arrivée d’autres sapeurs d’ici à vendredi pour porter le total à 1500.