La Ville de Laval fait preuve d’insouciance dans le contrôle des cartes de crédit mises à la disposition des employés, qui ont été utilisées pour des achats inexpliqués et ont entraîné des frais d’intérêt de 17 000 $ en raison de retards de paiements.

« Il y a un manque de rigueur dans la gestion des cartes, » a dénoncé la vérificatrice générale de la Ville, Véronique Boily, en présentant son rapport annuel mercredi matin en conférence de presse.

L’utilisation des cartes de crédit a explosé à la Ville de Laval : des dépenses de 1,1 million ont été portées sur 84 cartes en 2022, comparativement à 80 000 $ dix ans plus tôt, une progression que Mme Boily attribue à la hausse de popularité du commerce en ligne, particulièrement depuis la pandémie.

À cette somme, il faut ajouter 2,1 millions de dépenses d’essence payées au moyen de 457 cartes de crédit dédiées à de tels achats, surtout au service de police et au service des incendies.

Des montants considérables, donc, qui ne font pas toujours l’objet d’analyses rigoureuses, selon la vérificatrice générale.

Ainsi, au service de police, « de 2020 à 2022, plus de 17 000 $ de frais d’intérêt ont été payés en raison des retards de paiement des soldes de cartes d’essence, sans que la situation soit prise en main », révèle le rapport annuel.

Pour le même service, « parmi les exceptions signalées et inexpliquées figurent des achats à l’extérieur de la province, dont un en Alberta, suivi d’un achat en Ontario à moins de 24 h d’intervalle. La Ville n’a pas déployé d’activités de surveillance des dépenses par cartes d’essence visant à déceler et corriger les inefficiences et les incohérences », peut-on lire dans le document.

Dans trois cas, plus de 90 litres d’essence ont été payés à l’aide d’une carte, pourtant associée à un véhicule dont le réservoir contient seulement 72 litres, a noté Mme Boily.

D’autres incongruités : 60 achats d’essence super avec une carte associée à un véhicule utilisant de l’essence ordinaire et trois achats consécutifs de plus de 30 litres de carburant à deux minutes d’intervalle sur la même carte.

Le bureau de la vérificatrice a analysé 25 transactions d’essence et a découvert que des reçus n’existaient que pour 64 % d’entre elles.

Le Service de police s’est doté d’une directive pour encadrer l’utilisation des cartes d’essence, mais les contrôles prévus sont trop laborieux et coûteux pour l’important volume de transactions (plus de 20 000 en 2021 et 2022), précise le rapport.

La vérificatrice a aussi détecté des déficiences dans le contrôle des dépenses non autorisées. « Dans le cas d’une dépense non autorisée totalisant plus de 1000 $, la Ville a mis plus de cinq mois à conclure qu’il s’agissait de transactions sans contrepartie identifiable, déplore-t-elle. Dans une autre situation, les pièces justificatives relatives à des transactions d’une valeur de 3420 $ portées sur une carte de crédit n’avaient pas été obtenues près d’un an après la date des achats. »

De façon plus générale, Véronique Boily s’inquiète du fait que seulement 67 % des recommandations contenues dans son rapport d’il y a quatre ans ont été appliquées, dans différents domaines.

« Qu’il soit question de la gestion des cartes de crédit, des cartes d’essence, des remboursements des dépenses encourues par les employés municipaux, ou encore de la mise en place des recommandations des années antérieures, les conclusions de la vérificatrice générale relèvent d’importantes lacunes sur le plan de la bonne gouvernance de la part de l’administration publique », a réagi le chef du parti d’opposition Parti Laval, Claude Larochelle, par voie de communiqué.